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Alger, c’est là qu’il naît et vit jusqu’à 11 ans. 1962. Le sang, les armes, les bombes, les nuits de terreur. Un jour d’hiver 1962, son père est assassiné, une balle dans le dos. « le bleu ne fait pas ce bruit là »
Un enfant ne devrait jamais voir la mort en face.
C’est l’exil, l’exode ?
En France Il lui faudra vendre des glaces à 12 ans, son premier amour finira brûlée vive, déjà ! Sa scolarité est chaotique, le coup de poing facile. Mais il découvre que, oui, peut-être c’est la philo et les femmes qui peuvent sauver le monde. « On en discute ?» Il devient un homme qui doute.
L’hôpital, réparer les corps, kiné de choc, c’est sa came mais le cabinet c’est trop tranquille.
Alors partir, toute sa vie il part. est-ce qu’il fuit ? il se fuit ? Il fuit la nuit de l’enfance détruite.
Toute une vie au plus près de la mort c’est ce qui lui aura fallu pour trouver la lumière, neutraliser sa violence, « Oublier la nuit ».
Beyrouth, Damas, l’Amazonie, Israël, Palestine, Rwanda, Bosnie, Cambodge, et comme si les guerres au-delà de nos frontières ne suffisaient pas, la zone parisienne devient son nouveau terrain à explorer. Devenant lui aussi l’invisible sale qui a froid, faim et connaît les planques à dormir dehors sans se faire voler par plus pauvre que lui. Et puis les femmes, les violées, les prostitués, et puis le terrorisme islamiste, toute la violence du monde il la veut sous sa plume, la raconter comme pour la re – porter plus loin, l’exorciser peut-être ?
Des phrases courtes, percutantes comme des poings
Ecrire pour donner un sens dans un monde saturé d’images. Croit-il un temps que la guerre est une rédemption ? Il rend compte du sang hors des veines, de la mitraille, de la peur, des massacres, sans s’arrêter, inlassablement, il se met en danger pour écrire.
Ecrire pour donner à comprendre, pour ouvrir les yeux d’un lecteur qui n’en sort pas indemne. Ecrire pour donner à se comprendre ?
C’est le combat de Jacob avec l’ange qui vaincu, au bout de la nuit, lui donne sa bénédiction.
Le combat de Jean-Paul Mari avec l’ange de la mort, dure bien plus longtemps. Et au bout du tunnel de cet homme hectique, l’enfant peut enfin pleurer et oublier la nuit.
Le 14 février 1962, à Alger, le père et le grand père de l'auteur ont été assassinés.
Trois mois plus tard, avec sa mère et ses deux frères, il débarquait à Marseille.
Son arme les poings, mais si c'était acceptable à Alger, ça le fut un peu moins dans les collèges et lycée français. de ville en ville, au fil des emplois trouvés par la mère, d'emplois d'été sur les plages qui permettaient de compléter les faibles revenus le narrateur grandit dans la débrouillardise. Une prof de philo le marque à jamais, il devient kiné, un kiné très doué, qui assiste le service de neurochirurgie de l'hôpital Purpan à Toulouse, fait un stage en cabinet de ville ....
Avant de tout plaquer pour devenir journaliste, puis grand reporter, toujours parti sur tous les fronts : Liban, Palestine, Syrie, Koweït, Balkans, Afrique, Roumanie, Egypte mais aussi les rues de PAris en immersion avec des SDF ...
Dans cet ouvrage, Jean Paul Mari partage ces aventures de vie, sous forme de chapitres courts à l'écriture vive et rapide, une écriture de journaliste. Un peu perdue au départ par le non respect de la chronologie, j'ai ensuite apprécié le fil conducteur des expériences plus que des dates.
Un ouvrage lu d'une traite mais un sentiment étrange d'avoir découvert un parcours de vie d'un spectateur, d'un témoin , d'un homme qui a eu de la chance quand tant de ses collègues se trouvaient sur le chemin d'un char, d'un obus, d'une maladie ...
Scènes vues, récit des conflits des dernières décennies par un observateur non artisan ...
Et une question qui me grattouille depuis cette lecture : Quel est le but de ce genre d'ouvrage : entre voyeurisme et besoin de s'épancher, de se montrer différent des autres journalistes, de montrer qu'on a pi avoir raison trop tôt en dénonçant le tourisme sexuel en Thaïlande ...
Et ai-je envie de cautionner ces interrogations en lisant ces récits ?
A suivre, ou pas, si je m'abstiens à l'avenir !
Livre reçu de la FNAC dans le cadre de la sélection en tant qu'adhérent membre du jury du Prix 2022.
Ulysse est un mythe né il y a environ 3000 ans, issu peut-être de l'imagination d'un homme, Homère, dont on ne sait quasiment rien... Et 3000 ans après on en parle encore. Et 3000 après il taraude l'esprit de Jean-Paul Mari, né sur les rives africaines de la Méditerranée, qui repart sur les traces du roi d'Ithaque pour revisiter les endroits parcourus par le héros grec.
Ces lieux sont vus avec les yeux d'un grand reporter de notre siècle, rompu aux conflits, aux crises humanitaires, au danger et à la misère humaine. Mari y parle de crise des migrants, de Mafia, de crise grecque, de dictatures et de guerres. Il y voit aussi des motifs d'espoir au travers des personnes qui luttent pour ne pas perdre espoir et relever la tête.
Le portrait de son amie grecque m'a plus particulièrement frappé: une femme qui - dans un pays plongé au plus profond d'une crise dont on se demande si il sera capable de s'en relever totalement - préfère serrer les poings et trouver les ressources pour faire face.
Mari nous parle d'Ulysse mais surtout de notre monde tel qu'il es aujourd'hui. Il nous parle de notre Méditerranée. Cette mer qui peut évoquer la douceur d'un été et la chaleur de la mer. Mais ce n'est pas que cela. Et ce qui est frappant, c'est que Jean-Paul Mari me fait prendre conscience qu'après 3000 ans d'Histoire la Méditerranée est toujours aussi captivante: la violence et la beauté de l'époque d'Homère sont toujours présentes.
En dérivant avec Ulysse
Mon Dieu quelle dérive !!
Dans l'espace et dans le temps Jean Paul Mari nous transporte selon son bon vouloir à travers les âges, les guerres et leurs conséquences, nous balade parmi les dieux grecs, les dictateurs turcs , la Cosa Nostra, nous bouscule dans les vagues de la méditerranée à la recherche d'Ithaque ou des migrants éjectés de Libye, nous secoue au gré des vents mythologiques ou réels, nous interroge : qu'auriez vous fait si vous aviez été Ulysse ou Priam ? Auriez vous suivi Ata Turk dans sa quête de démocratie ou fait route avec Erdogan , jamais cité ??
Auriez vous péri tel le soldat d'Ulysse, celui des dardanelles pour vérifier la phrase célèbre :
« la chose est universelle et éternelle. D’Héraclite à la Rochefoucauld, les anciens le savaient : ni le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face ».
Ou bien la leçon d'Achille : « rien ne vaut la lumière de la vie et il faut en jouir maintenant ! »
Qu'a t'il fait lui..le migrant de 11 ans en 1961, forcé de quitter l’Algérie et toute sa vie pour « rentrer » en France qu’il ne connaissait pas ..
C'est sans doute le migrant qu'il est resté qui a fait de lui le traqueur de vies, décrypteur d’événements, poursuiveur de malheurs et l'écrivain qu'il est devenu.
Certes s' il est d'abord journaliste, cela se sent dans sa façon d'analyser les faits, de les décortiquer et de les rendre au plus près de la réalité, se cache également un excellent connaisseur de la mythologie et surtout un remarquable écrivain, s'appuyant sur des passages de l'Odyssée mais y ajoutant sa patte, sa langue, sa façon de percevoir la mer, les vents, les hommes, les mouvements humains et raconter ses rencontres .
Il est né de la méditerranée, y vit, y revient, tel Ulysse.
Merci Monsieur Mari
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