"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
BD sans fiction remarquable !
Un photographe, un dessinateur et un coloriste unissent leur travail pour un reportage exceptionnel et original d’une mission de Médecins Sans Frontières envoyée en Afghanistan en 1986.
L’équipe médicale rompue aux interventions en zones de guerre dans une situation de dénuement sanitaire, se compose de 3 infirmières dont Juliette qui est la cheffe de mission, (Elle a vécu en Afghanistan avec ses parents jusqu’à l’âge de 15 ans et parle le farsi couramment), un chirurgien de guerre, un docteur, un anesthésiste. Ils sont accompagnés par un guide interprète afghan et de nombreux âniers.
Pour cette mission humanitaire, MSF commande un reportage à un photographe qui va les accompagner. Il va être le narrateur de cette expédition.
Ce sera une longue marche de 35 jours sur 5000 kilomètres, 6 cols à 5000 mètres d’altitude, qui se fera avec des ânes et des chevaux portant le matériel, les médicaments, l’avoine et la nourriture.
Ils devront passer la frontière à Chitral clandestinement en évitant les autorités pakistanaises, les postes militaires russes, l’armée gouvernementale, les zones minées et les factions rivales et souvent de nuit, pour ne pas être pris sous le radar des hélicoptères ennemis qui volent en rase-motte.
La caravane qui, par ailleurs, retrouvera sur le parcours une autre caravane chargée d’armes celle-là, va rallier le nord de l’Afghanistan à Feyzabad et rejoindre 2 petits hôpitaux de campagne, dont celui proche de la ligne des combat, qui n’en a que le nom car sur place, cela se révèle plutôt être un préau au milieu d’un désert de cailloux dans une vallée de montagne isolée.
Dès leur arrivée, de nombreux malades et blessés parmi lesquels des femmes et des enfants, se pressent dans la cour poussiéreuse qui fait office de salle d’attente.
Le photographe, Didier Lefèvre, va signer un journal pas à pas de cette expédition de trois mois, de fin juillet à octobre 1986 alors que la guerre fait rage en Afghanistan.
Un ouvrage prenant dont le récit n’omet pas de nous faire part des ressentis et sait traduire souvenirs, vécu, douleurs et émotions.
Les photos pour la plupart prises en noir et blanc tranchent et se complètent avec les illustrations colorées. Les visuels sont très représentatifs et rendent le reportage vivant, descriptif et d’un réalisme à couper le souffle.
L’édition intégrale nous permet de lire les 3 tomes d’une traite en nous évitant d’attendre une suite au suspens latent particulièrement quand le photographe, novice sur ce terrain dangereux à tous égards (dont un sol truffé de mines anti-personnel) et qui lui est quasi inconnu, décide à la fin de la mission, de rentrer au Pakistan tout seul car il a besoin de s’émanciper du groupe et vivre sa propre expérience, ce qui va être parsemé de mésaventures inquiétantes dont, entre autres, la mort subite de son cheval harassé de fatigue. Il a eu cette chance que l’animal et sa charge ne tombe pas sur lui car cela l’aurait tué, un accident qui arrive fréquemment sur le parcours.
Les bonnes et mauvaises rencontres que je vous laisse découvrir et le vécu dont il témoigne, nourriront son expérience en lui faisant forcément aborder les choses de la vie avec plus de recul et de distance.
Amitié et solidarité humaine ne seront plus de vains mots…
Les membres de ce petit groupe ne se perdra plus de vue.
Une BD choc qui ne se lâche pas !
En sus, un CD « A ciel ouvert », offre le journal filmé de la mission MSF en Afghanistan par Juliette Fournol qui force le respect quant aux missions engagées par Médecins Sans Frontières dans les déserts médicaux pour soigner et sauver des vies mais aussi pour enseigner à des locaux des méthodes de soins de première urgence.
Par contre si les images des paysages afghans sont magnifiques, le film qui est une réplique complémentaire au livre (sa bande son et live) est assez insoutenable quant à la violence que subissent les chevaux et les mules ainsi que l’état des blessés dont des enfants qui viennent dans cet hôpital de fortune. Le son et les couleurs nous plongent dans la réalité de l’expédition.
On voit l’achat des chevaux et des mules qui sont entassés sans ménagement, sans la moindre notion de la souffrance animale, pour deux heures de route en camion jusqu’à la frontière.
On voit l’équipe empaqueter des tonnes de médicaments et matériel dans de solides emballages.
On entend le vent siffler, l’eau des rivières, les sabots sur les pierres qui s’éboulent, les prières, les cris, la musique aux bivouacs, le feu des fours à pain, la vapeur sortant des théières, les ferronniers, les voix, les bêtes aux pattes blessées et naseaux écorchés, le bruit et la fumée des combats qui résonnent et des bombes qui tombent au loin.
On voit les opérations avec les moyens du bord dérisoires en gros plan à la lueur d’une lampe à gaz de camping, des intubations de fortune et des poches de perfusion tenues à bout de bras, le sang, les voix, les pleurs,
et on se dit que des hommes et des femmes portent en eux une dose de générosité, de courage, d’altruisme, d’humanité et de dévouement à l’autre, hors du commun.
Cette trilogie mêlant BD et photos est une pépite. Le reporter suit une équipe de Médecins Sans Frontières à travers l'Afghanistan. Les dessins sont sublimes et les clichés incroyables. Les personnes que la mission médicale rencontre sur sa route sont aussi hauts en couleur que des personnages de roman. On les suit comme si on y était. Aussi émus, bouleversés, inquiets et amusés que si nous étions sur le terrain.
Les Ignorants de Davodeau, donne envie de lire des tas de BD, dont celle-ci : Le Photographe, qui comprend 3 tomes, le premier publié en 2003.
La particularité – et la suprême originalité – de cette bande dessinée : alterner photos réelles et dessins, mélanger les genres pour mieux toucher le lecteur.
Dans le premier tome, après quelques pages d’introduction, les auteurs se présentent : « Histoire vécue, photographiée et racontée par Didier Lefèvre, écrite et dessinée par Emmanuel Guibert, mise en page et en couleur par Lemercier Frédéric » et l’aventure commence. Un jeune photographe, Didier Lefèvre, part rejoindre une équipe d’humanitaires de Médecins sans frontières en Afghanistan. Il rapportera des tas de clichés de ce voyage, clichés issus de planches contact, parfois reproduites telles quelles, et qui sont minutieusement intégrés dans le récit et intercalés avec les dessins.
Cette double lecture donne beaucoup de force au récit, et il en ressort aussi beaucoup d’émotions. Nous suivons le quotidien du jeune photographe, partagé entre le choc des cultures et le choc de la guerre proche, dont on perçoit les nombreuses stigmates sur les personnages rencontrés au fil de la route. Quelques photos sont insoutenables. et rendent compte de la violence du conflit. Nous partageons son admiration pour les humanitaires, leur engagement total, leur respect des populations.
C’est une bande dessinée vraiment extraordinaire qui présente les mille et une anecdotes du voyage de Didier Lefèvre , ses préoccupations pragmatiques et philosophiques. Et puis aussi beaucoup d’humour partagé avec ses compagnons. Ses photos sont magnifiques et nous font voyager. De la très grande BD ! Du grand art !
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