"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Je ne connaissais pas du tout ce roman ou cette autrice avant la lecture commune organisée autour de lui. C’est donc une totale découverte pour moi. C’est la couverture et surtout le résumé, me promettant une histoire de femmes fortes, qui m'a convaincue et m'a tout de suite tentée. Et maintenant que ma lecture est terminée, je peux vous dire déjà que j'en ressors conquise et contente de cette découverte, j'ai passé un excellent moment.
Je ne vais pas trop revenir sur l’histoire en elle-même, je trouve que le résumé le fait déjà bien assez, même peut-être un peu trop pour moi. Il dévoile certains faits qui auraient pu être tus. Ce qu’il faut savoir, c’est que ce roman est l’histoire d’une grande amitié entre deux femmes de races et de conditions différentes. Et on ne parle pas de petite amitié, c’est le genre que seule la mort peut séparer. Ada naît chez les Harrington, sa mère est noire et la domestique de Mrs Harrington. Ada est une fille illégitime, elle vit avec sa mère, apprend tout ce qu'il y a à savoir pour tenir une maison. Elle se lie d’amitié avec le fils de ses maîtres. Mrs Harrington se rendra compte que Ada a des qualités autres que faire le ménage, elle aime écouter sa maîtresse jouer du piano. Petit à petit, Mrs Harrington va la prendre sous son aile, lui apprendre à lire, la musique et à jouer du piano. Ada ira aussi à l’école, grâce à sa maîtresse. Elle prendra la place de sa mère, lorsque celle-ci mourra. Dans la famille Harrington, il n'y a que Madame et son fils qui considèrent Ada comme l'une des leurs. Mr Harrington et sa fille se comportent comme les autres Blancs face aux Noirs.
Un premier drame va frapper les Harrington, qui atteindra aussi Ada. Et à partir de ce moment là, les drames vont se succéder. L'un d’eux va obliger Ada à quitter les Harrington, elle va devoir s'installer dans le quartier des Noirs, où la pauvreté est immense, où survivre est difficile. La tante chez qui elle est ne la ménagera pas. Grâce à son instruction, elle arrivera à décrocher un travail comme enseignante de musique dans l’école du quartier. Et dans un même temps, Mrd Harrington la recherche et veut savoir pourquoi Ada est partie….
Je ne vais pas vous en révéler plus. Ne vous inquiétez pas, je n'ai pas tout dit, il en reste encore beaucoup à découvrir.
Je me suis très vite attachée à ces deux femmes, Ada et Mrs Harrington. Peut-être un peu plus pour Ada, car on la suit dès son enfance, elle est donc encore plus attachante. On la voit grandir, on la voit changer, les épreuves qu'elle va vivre vont lui forger son caractère. Elle apprendra ainsi qu'il ne faut pas se laisser faire et en même temps ne pas trop se montrer au risque de sa vie ou de celle des gens qu'elle aime et apprécie. C’est une jeune femme courageuse, loyale, douce, toujours très respectueuse des personnes qu'elle côtoie, qu'importe leur couleur de peau. Elle sait préserver les siens, se mettre en avant pour les protéger. Elle vivra sa vie à se dévouer aux autres, que ce soit chez les Harrington ou avec ses amies noires.
À côté de Ada, il y a Mrs Harrington, une femme incroyable. Elle aussi est pleine de courage. Déjà face aux épreuves qu'elle va vivre personnellement dans sa vie d’épouse et de mère. Elle sera toujours respectueuse avec ses employés noirs, et voudra toujours les considérer au même niveau qu'elle. Elle se heurtera bien souvent à son mari ou à sa fille qui ne pensent pas pareils. Elle aura toujours confiance en Ada, et pourtant elle aurait eu de quoi douter, elle l'a toujours soutenue et a toujours voulu l'aider. J’espère de tout cœur que ce genre de femmes a réellement existé pendant ces heures sombres de l’Afrique du Sud.
Car l'histoire de ces deux femmes baigne dans une Afrique du Sud d’après-guerre, avec l'Apartheid, la séparation des Noirs et des Blancs, la révolte des Noirs, l’emprisonnement de Mandela, et sa libération par la suite et tout ce qu'elle amènera pour le peuple sud-africain. Je connaissais un peu l’histoire pour l'avoir étudiée pendant mes années lycée, mais ce roman m'a permise d’approfondir mes connaissances. Je savais les heurts entre Noirs et Blancs, la façon dont les Blancs voulaient prédominer les Africains, les premiers habitants de cette terre. L'homme blanc a été un grand colonisateur et prenait la place des autres sans respect pour les natifs. La preuve en est, il s’est toujours gardé les meilleurs terres, construit les plus belles maisons, ne laissant aux autres que les endroits les plus pauvres. Par contre, je ne me souvenais plus de certains problèmes, comme par exemple, la difficulté d’intégration des métisses. Rejetés par les Blancs car ils ne sont pas complètement blancs, ils le sont aussi par les Noirs. Difficile pour eux de trouver alors une place. Et la faute est alors rejetée sur la mère, noire, qui a fauté avec un Blanc. Bien évidemment, c’était de sa faute à elle. La femme est déjà coupable de tout, alors si en plus elle met au monde un enfant qui n'est pas de sa couleur….
L'autrice, Barbara Mutch, raconte tout cela avec franchise et beaucoup de délicatesse. Elle est née en Afrique du Sud, elle y a grandi, elle sait donc de quoi elle parle. Et ça se sent à la lecture. La façon dont elle décrit les lieux, les habitations différentes selon le peuple, les modes de vie eux aussi différents, est vraiment très pointilleuse et juste. Et ce, bien sûr, sans alourdir pour autant le texte avec des descriptions trop longues. Elle sait mêler descriptions et actions et à aucun moment je ne me suis ennuyée.
L'attachement à Ada est aussi renforcé par le choix narratif de l’auteure. Elle a en effet choisi d'écrire à la première personne du singulier. C’est une narration à laquelle je suis très sensible, car ce « je » me permet de me mettre entièrement à la place du personnage, de rentrer dans sa tête, de connaitre ses pensées les plus intimes et de ressentir la moindre de ses sensations. J'ai donc été pendant plus de quatre cents pages dans la tête d'Ada, et cela a été une expérience forte et bouleversante. Je ne sais pas si j'aurais été aussi forte à sa place, forte dans sa tête j'entends. Elle a fait face à tellement d’épreuves, elle s’est toujours relevée, elle n'est jamais restée à terre. Elle n'en a jamais voulu à ceux qui lui ont fait du mal ou rabaissée, et pourtant elle aurait pu. C’est un personnage de roman, mais je suis sure que des femmes comme elle existent, et je les admire.
J'ai beaucoup aimé ce roman. Je l'ai dégusté grâce à la lecture commune, il était divisé en neuf parties, on en discutait sur un groupe, et j'aime beaucoup, c’est très enrichissant de connaitre les expériences de lecture des autres, de voir comment ils ont perçu l'histoire. En tout cas, tout le monde est unanime et à aimé Ada.
Je découvre une nouvelle autrice, que je note dans ma liste d'auteurs à suivre, car elle a un très bon style d’écriture et sait raconter une histoire. J’ai voyagé grâce à ce livre, j'ai ressenti la chaleur du soleil, vu les couleurs chatoyantes, senti les différentes odeurs. Je me suis vraiment régalée et j’ai pu m’évader e penser à autre chose. Ce roman est le premier pour Barbara Mutch et c’est une réussite. Je pense que je me le procurerais en poche, là, c’est un emprunt à ma médiathèque, j’aimerais beaucoup l’avoir dans ma bibliothèque pour le relire quand j'en aurais envie.
En tout cas, je ne peux que vous recommander cette lecture, qui vous permettra de voyager et de rencontrer un peuple qui a souffert. Lire des livres parlant de sujets de notre société, en France et dans le monde, est très important pour ne pas oublier et surtout ne pas réitérer autant que possible l'Histoire
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