"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L’année dernière, j’ai été agréablement bousculée par Fuck up le roman détonnant d’Arthur Nersesian, auteur qui a mis un bout de temps à trouver ses galons en France mais que l’on a finalement eu la chance de lire grâce aux Editions La Croisée et à son traducteur, Charles Bonnot. Cette année, j’ai vibré de la même façon lors de ma lecture de Dogrun ce roman au titre qui ne trouvera pas de traduction en français, faute de perte de sens. Fuck up, c’était la vie new-yorkaise d’un prétendant écrivain, qui tentait de garder la tête hors de l’eau au milieu du brouhaha de la métropole américaine, Dogrun, c’est cette apprentie autrice, Mary Bellanova, à laquelle il arrive le plus improbable qui soit, il faut bien le dire, et de la manière la plus invraisemblable possible, à l’image de cette scène liminaire. Arthur Nersesian avait à l’évidence encore envie de poursuivre son exploration de ces jeunes américains un peu paumés, ni des cadres sup dynamiques, ni des filles et fils de, qui se débrouillent bien comme ils peuvent au beau milieu de la jungle newyorkaise.
Mary est intérimaire, elle vit avec son petit ami qui lui tient lieu de boulet au pied, attendant toute la sainte journée entière qu’un boulot lui tombe sur le nez tout en squattant le canapé de l’appartement en compagnie de son chien. Après une soirée passée dehors, seule, sans petit ami ni animal, Mary rentre pour retrouver Primo, Primitivo Schultz, qu’elle croit endormi : après quelques longues minutes, elle finit par s’apercevoir que ledit homme est décédé. C’est la grosse tuile pour Mary, qui comptait bien se débarrasser de l’individu qui encombrait son canapé depuis des mois, ailleurs qu’au funérarium du coin. C’est le début d’un périple ubuesque pour Mary, qui doit contacter la mère archi-paumée du défunt, et se retrouve finalement l’heureuse propriétaire d’un chien, qu’elle est contrainte de sortir et de promener jusqu’au parc à chien le plus proche, qui devient pour elle un vrai lieu de rencontre et de sociabilisation.
J’ai très vite perçu Mary comme le pendant féminin de notre personnage masculin de Fuck-up, en recherche constante d’argents et de repères, avalée, digérée et rejetée par New-York dans laquelle elle essaie de maintenir la tête hors de l’eau à grands coups de petits boulots mal payés lors de longues journées « xeroxées ». Avec toujours les mêmes sarcasmes et le même cynisme d’Arthur Nersesian, que l’on goûte à pleines dents, pour donner quelques coups de griffes bien senties sur le monde en perte de sens qui entoure Mary et sur le non-sens des vies (et pour le coup, des morts, ici) et des personnages qui évoluent autour de Mary. On rigole, jaune peut-être, mais on rit, pensée à Albert Camus américanisé en Al Camus ici, R.I.P. le respect. Les mêmes ressorts narratifs que j’ai aimé dans Fuck up se retrouvent ici avec Mary, jeune femme désabusée qui nourrit son écriture des maux de l’Amérique entre un libertarisme dévastateur et une fast life, de la nourriture, des amours, des plaisirs, du travail, des amitiés, d’un enterrement et de la vie tout simplement, qui consume les gens le temps de quelques bouffées de cigarette.
Mary c’est une vie un peu boiteuse, une mère avec qui elle s’entend à peine, une amie Zoé qui cherche le prince charmant qui n’existe pas, un ancien voisin qui a ressurgi de nulle part, dont le côté un peu protecteur et ambivalent laisse penseur, tous ne marchent que sur une jambe. Primo Schultz est ce corps froid, ce macchabée encombrant, le fil rouge des péripéties de Mary, en quelque sorte le révélateur du mal-être de la jeune femme, mais qui ne sombre jamais dans la noirceur la plus totale, même dans ses côtés les plus sordides, où l’auteur tourne la tristesse de vies et de situations en scènes cocasses et légères : malgré le désenchanement de certaines situations, Arthur Nersesian finit toujours pas trouver une certaine légèreté, une certaine dérision, un trait d’humour qui ne laisse de place ni au drame ni à la tragédie. Tout est toujours rattrapable. Rien n’a de sens, sauf celui qu’on veut bien lui donner. En est la preuve la figure de Primo, qui passe sans arrêt d’un statut à l’autre, de l’artiste de génie au simplet de service en passant par le profiteur qui vit aux dépens des femmes avec lesquelles il entretient une relation.
Les romans d’Arthur Nersesian sont les seuls où l’on peut lire cette facétieuse comparaison, dans le calme le plus complet, de l’enterrement d’un ex petit ami à « une soirée pinata » sans sourciller : Arthur brouille tous les codes, le microcosme new-yorkais prend tellement de place que le reste n’a plus vraiment d’importance, même Primo Levi en prend pour son grade dans le double peu glorieux, et surtout plein de dérision, de Primo Schultz et son roman pornographique, Le Mouilleur des mondes. Je me suis encore régalée à la lecture de ce second titre traduit et publié en France d’Arthur Nersesian.
J'ai tout d'abord été attiré par la couverture, puis par le thème d'un anti-héros, sans le sou, dans New York.
J'ai adoré ce roman, où on suit l'histoire d'un jeune homme (dont on ne connait pas le nom) et des ses aventures (pro, perso, amoureuses...) dans la grande pomme dans les années 80.
On débute par une rupture du héros : sa copine le quitte, alors que lui même envisageait de la tromper... c'est mise en abime rend cette situation assez coquasse et le met devant ses contradictions.
Une suite d'anecdotes permettent de découvrir l'esprit de la ville à cette période. J'ai particulièrement aimé la partie sur le cinéma gay!
La narration avec le JE donne vraiment une proximité avec le personnage. On est aux premières loges, on sent et ressent ses sentiments, ses craintes et ses joies et surtout ses loupés, car oui, il loupe presque tout ce qu'il entreprend. L'histoire est sombre, mais les touches d'humour permettent de prendre un peu de hauteur, de ce dire que tout ira mieux... (ou pas!).
New York est l'autre personnage essentiel de ce roman : la description y est bluffante. Parfois diversifiée, parfois glauque, où la misère et la violence flirtent avec les courants de contre culture.
J'ai cherché la traduction de FUCH UP : cela veut dire "foirer". Voilà le parfait résumé de la vie de l'auteur.
L'humour noir de ce 1er roman m'a touché, je l'ai trouvé très addictif. Je recommande cette plongée en apnée dans la big apple des années 80, ville plus authentique que l'actuelle NY, avec les déboires de ce garçon au final très attachant!!
Une écriture qui allie l'humour, l'auto dérision et la violence, dans un roman initiatique. Un beau mélange pour un roman que je relierai surement un jour.
J'avais découvert, grâce à la maison d'édition La Croisée, le premier roman Fuck up d'Arthur Nersesian. Et j'avais aimé cette lecture, j'avais aimé déambuler dans les bas fond de New York, même si je n'avais pas trouvé le narrateur très sympathique.
Pour ce second roman traduit, nous allons suivre cette fois Mary, jeune femme de trente ans, qui découvre un soir son nouveau petit ami, mort. Ella va récupérer son chien (d'où le titre du texte, car elle doit sortir l'animal dans les dogrun) mais aussi les cendres de son compagnon. Elle va alors essayer de retrouver des proches. Cela va faire de sacrés portraits. Elle va aussi nous raconter sa vie, ses souhaits d'intégrer un groupe de musique, elle va aussi être embauchée pour faire des fiches de lectures de manuscrits (de belles piques de l'auteur ! ).
L'auteur, une nouvelle fois, nous décrit très New York et j'ai apprécié suivre son héroïne, que ce soit quand elle passe des castings, quand elle lit et remplit ses fiches, essaie elle aussi d'écrire ses propres textes.
J'ai plus apprécié ce texte car la narratrice est plus sympathique, les situations sont peut être un peu moins glauques que dans "Fuck up", et j'ai aimé promené avec elle Primo, le chien ou aller prendre un coffe avant ses petits boulots. Il y a de la musique, des références littéraires.
#Dogrun #NetGalleyFrance
Dogrun raconte avec beaucoup d'humour les errances d'une newyorkaise qui, à la suite du décès de son petit copain, se sent investie de la mission de retrouver ses proches. Cette recherche sert de prétexte à Arthur Nersesian pour nous livrer une version déjantée de la vie dans l'East Village, à la fin des années 1990.
La narratrice, Mary, vient de perdre son dernier petit copain, Primo. Cette mort subite la laisse décontenancée, encombrée de plus du chien du défunt. Elle part donc à la recherche de tous ceux qui ont côtoyé Primo avant elle. Au fil de ces rencontres elle s'aperçoit qu'elle ne connaissait rien de lui et, allant de surprise en surprise, elle en apprend beaucoup sur elle-même.
Mary est une anti-héroïne typique. Trentenaire, vivant de petits boulots, en recherche de l'âme sœur, elle ne tombe que sur des coups foireux. Avec ses copines, elle accumule les mauvais plans tant du côté du travail que du côté sentimental. Incapable de résister à la moindre tentation et pourtant lucide, elle ne peut s'empêcher de traîner avec n'importe qui, de boire et de prendre les mauvaises décisions.
Les anciennes connaissances ou amours de Primo lui donnent chaque fois des noms de nouveaux proches et des traits de caractères qu'elle ignorait. Pour en savoir plus elle se trouve entraînée dans des situations invraisemblables, comme sa participation à groupe de musique punk.
Le style d'Arthur Nersesian est vif, son ton incisif. Son imagination débridée nous amuse.
Dogun a été publié aux États-Unis en 2000, après The Fuck Up qui date de 1997. Arthur Nersesian y donne sa vision du New-York de l'époque. Aujourd'hui, j'ai lu beaucoup de romans sur des thèmes similaires et celui-ci, malgré son humour, a perdu de son originalité. J'ai l'impression de relire l'éternel même roman sur ces filles trentenaires en recherche de l'âme sœur, toujours entre deux bitures, que ce soit à New-York ou en France. Dommage que nous n'ayons pas connu Arthur Nersesian plus tôt.
Lu avant sa sortie en tant que membre du Jury du Prix du Roman Fnac 2024
https://ffloladilettante.wordpress.com/2024/08/21/dogrun-de-arthur-nersesian/
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