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"Me voici", le nouveau Safran Foer, le roman qui va vous faire divorcer

"Me voici", le nouveau Safran Foer, le roman qui va vous faire divorcer

Le nouveau roman de Jonathan Foer est sorti : Me voici (ed de l’Olivier, trad. Stéphane Roques), proclame-t-il et il est vrai qu’en soi c’est un événement. Le petit génie des lettres new yorkais publie peu mais fait sensation, en particulier depuis son Extrêmement fort & incroyablement près , publié en France en 2005, dont l’histoire se déroule sur les ruines de l’attentat du 11 septembre. Safran Foer n’avait rien publié en France depuis la sortie de son essai, Faut-il manger les animaux ? en 2009. Me voici, un gros roman qui plonge ses racines dans les questions de l’identité, à la fois personnelle, culturelle et nationale, signe son retour. Un maillage littéraire extrêmement fort et incroyablement réussi. Explications.

 

 

L’histoire

C’est l’histoire d’une famille américaine qui vit à Washington. Jacob et Julia Bloch ont 42 et43 ans, ils sont scénariste pour lui et décoratrice d’intérieur pour elle, vivent ensemble depuis 16 ans, et ont trois garçons. L’aîné, Sam, a 13 ans, et tandis qu’il doit passer sa Barmitsva, il est accusé d’injures racistes par le rabbin. Il s’interroge sur le sentiment et l’appartenance à la judéité dans une famille si laïque, et passe son temps sur Other Life, un jeu en réseau, où il fait exploser des synagogues sous un avatar féminin. Tout se passe finalement comme dans toutes les familles qui fonctionnent sans véritable heurt, jusqu’au jour où Julia tombe sur des sms pornographiques envoyés par son mari à une autre femme. Dans le même temps, Israël est ravagée par un séisme cataclysmique qui implique que les Etats-Unis apportent leur secours à un pays affaibli et menacé par ses voisins.

 

Un livre qui fait réfléchir

Un divorce est-il une réussite qui trouve une fin, ou un échec ? Julia se demande qui elle est, ce que signifie être à soi. La famille lui a fait perdre ce qu’elle appelle son monologue intérieur ; elle discerne de mieux en mieux le relief qui oppose le bonheur au contentement. Où se trouve le couple dans la famille et quelle place reste-t-il pour soi ? Pour Julia et Jacob, la langue qu’on crée à deux et qu’on essaie de mettre en place pour s’entendre, ne leur permet pas de se comprendre. Forcément, le questionnement de Julia trouble, tant il rejoint celui de tout individu qui vit en communauté, familiale ou culturelle. L’histoire de Julia et Jacob est rejointe par l’histoire géopolitique, quand Safran Foer interroge l’identité juive américaine.

 

Un oui inconditionnel à ce livre

D’abord parce que Safran Foer a une langue imparable et qu’il sait aborder les sujets par des angles inédits. La question du couple et de son échec est une antienne usée dans les romans, mais il en fait un matériau renouvelé. Sans doute parce qu’il procède depuis l’intériorité de ses personnages, et du profond de leur sensibilité. Sans doute aussi parce que ce roman est une longue réflexion sur la façon dont on se considère vivant dans le monde.

Mais surtout parce que ce roman est drôle de bout en bout. Les dialogues fusent, les répliques sont décochées comme par des snipers. Le roman qui parle de la famille et laisse tous ses membres s’exprimer, conquiert par sa légèreté apparente et la facilité étonnante avec laquelle on se coule dans l’intériorité de chacun de ses personnages. Philip Roth est l’autre auteur juif américain capable d’une telle densité humaine. On ne les comparera pas, mais on se réjouira que la crise de la quarantaine, chez Jonathan Safran Foer, offre l’occasion d’un chef d’œuvre.

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