"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Raconter l'histoire de Volodymyr Zelensky, c'est aussi raconter celle d'un pays, l'Ukraine, et de son peuple. C'est décrire l'ascension et la transformation fascinantes d'un clown propulsé président par son art de la communication, qui a dû se muer en chef de guerre. Charlie Chaplin devenu Churchill...Pour comprendre, il faut interroger sa directrice d'école, à Kryvyi Ryh, la ville industrielle du Sud-Est où il a grandi, ses amis et collègues de Kvartal 95, sa société de production, mais aussi des parlementaires au sein de son parti et dans l'opposition, des politologues, historiens, chercheurs, journalistes... Sans omettre les zones d'ombre : sa relation embarrassante avec l'oligarque Ygor Kolomoysky - mise en évidence par la fuite des Pandora Papers -, le flou qu'il a intentionnellement entretenu entre le candidat réel et le personnage virtuel qu'il incarnait à l'écran dans sa série Serviteur du Peuple, sa manière populiste de gouverner... Jusqu'à ce 24 février 2022, jour de l'invasion russe, où Volodymyr Zelensky est entré dans l'Histoire et joue désormais le rôle de sa vie, celui que Vladimir Poutine lui aura tragiquement donné.Homme de spectacle, homme d'affaires, homme de compromis et de compromissions, homme d'État. La distance qui sépare ce qu'il a pu être de ce qu'il est devenu permet de mesurer le chemin parcouru.
Ancien directeur de la rédaction anglophone de France 24, Gallagher Fenwick, actuellement grand reporter, a couvert de nombreux conflits, il fut notamment correspondant à Jérusalem de 2010 à 2015.
La personnalité et le parcours de Volodymyr Zelenski par Gallagher Fenwick, ancien responsable de France 24 et grand reporter. Une enquête sans complaisance où l’auteur revient sur les zones d’ombre de Zelensky : sa proximité avec l’oligarque Kolomoïsky (qui était le directeur de la chaîne de TV où il se produisait) et la citation de son nom dans les « Pandora papers », sans oublier son patrimoine immobilier…
On comprend mieux aussi les accusations de Poutine à propos du pseudo « néonazisme » de l’Ukraine. En fait, elles ne sont justifiées qu’à propos des milices néonazies de l’oligarque, devenu un gouverneur de région, entre Crimée et Donbass.
« L’aventure de Kolomoïsky sera de courte durée, mais haute en couleur et, comme souvent avec lui, pleine de controverses. En l’absence d’une armée digne de ce nom capable de protéger cette région et sa population face aux ambitions annexionnistes de la Russie, il va financer des milices à hauteur de plusieurs millions de dollars. Certaines qui subsistent encore, font l’objet d’accusations graves, notamment le régiment d’Azov. Certains de ses combattants se revendiquent ouvertement du néonazisme, dont ils utilisent l’imagerie pour orner uniformes, armes, et parfois leurs avant-bras. »
L’inimitié entre Poutine et Kolomoïski est bien connue : « Poutine traite Kolomoïsky de « voleur d’une genre unique » et l’oligarque répond en traitant Poutine de « nain schizophrène »
Une analyse et un portrait passionnants qui facilitent grandement la lecture des événements actuels en Ukraine.
Zelensky est né en 1978, dans l’est de l’Ukraine. Une famille aisée, cultivée, dont les grands parents étaient juifs. L’un combattra aux côtés de l’Armée Rouge contre le nazisme, les autres mourront à Auschwitz.
« Les trois frères du grand-père de Zelensky ont été exécutés durant la Shoah. Son grand-père a servi dans les rangs de l’Armée Rouge, celle même qui libéra Auschwitz. »
Il est lui-même juif non pratiquant et se considère comme laïc. La religion est une affaire strictement privée. Avec l’humour qui le caractérise, il déclare : « Le fait que je sois juif se classe seulement en 20e position dans ma longue liste de défauts »
Sa langue maternelle est d’ailleurs le russe mais il parle couramment l’ukrainien et l’anglais.
Il fait des études de droit pour satisfaire ses parents mais, passionné par la scène, il se dirige vers le métier d’acteur, d’humoriste, puis de scénariste et de producteur. Il fonde avec ses amis d’enfance la société de production, « Kvartal 95 ». Il va surtout faire un tabac dans la série « Serviteur du peuple » où il incarnera le rôle principal, un professeur idéaliste, candidat à la présidence de son pays ».
Zelensky incarne une candidature populiste qui va le propulser aux premières loges du gouvernement : « plutôt que de chercher à cacher son manque d’expérience, il le célèbre et l’érige en symbole de sa virginité politique. L’expérience devient de l’innocence qu’il oppose à la culpabilité de tous ses adversaires politiques. C’est la recette d’une candidature populiste dont l’un des arguments principaux, outre le rejet des élites, est la non appartenance à un système qui serait corrompu et corrupteur. (…) Zelensky se passera jusqu’au bout de tous les relais de campagne traditionnels, à commencer par la presse. Il ne lui parle pas, elle parle beaucoup de lui. Son utilisation des réseaux sociaux lui permet d’être le maître de son récit et de jouer une autre carte très importante dans une campagne populiste : la transparence.»
Pourtant, il n’y avait pas vraiment de programme dans cette candidature : « un vide dans lequel des millions d’ukrainiens ont projeté ce qu’ils voulaient y voir. Zelensky a trouvé le moyen de faire de son absence d’idées, une force, un vecteur d’espoir, la paix pour les uns, la promesse de changements politiques profonds pour les autres. »
« Zelensky et les candidats de sa liste n’ont eu qu’à reproduire la recette miracle : sincérité pour seule compétence, slogans anti-corruption, séquences dialogues diffusées sur les réseaux sociaux et concerts gratuits ! »
Cette aventure réussie représente aussi les prémices de bien d’autres candidatures politiques aux premiers postes.
La véritable métamorphose d’un homme en position de « Serviteur du peuple », de sauveur de son pays, qui continue à gouverner, à communiquer.
« Il interprète sa partition avec talent et sincérité. Et c’est efficace. Il est charismatique parce qu’il te donne l’impression d’être pleinement avec toi. (…)
Une excellente analyse très documentée du personnage (intelligent, courageux, fidèle en amitié, opportuniste mais sincère), et aussi du pays et du contexte international. Qui permet à la lumière du passé, de mieux comprendre le présent, et d’envisager l’avenir.
L’écriture est juste, précise, le ton est très pédagogue.
Félicitations à Gallagher Fenwick qui réalise une véritable enquête journalistique, un vrai travail d’historien.
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