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La première partie de Solo, « Life », nous raconte la vie d'Ulrich, homme ordinaire, voire médiocre, qui semble condamné à échouer dans tout ce qu'il entreprend.
Né d'un couple bourgeois du Sofia des années 1910, son goût pour le violon est vite étouffé par un père tyrannique. Ulrich se prend alors de passion pour la chimie, qu'il part étudier à Berlin. Persuadé qu'un destin grandiose lui est réservé, il déchante lorsqu'il est contraint de rentrer en Bulgarie pour s'occuper de ses parents ruinés. Ulrich renoue alors avec son grand ami Boris, un violoniste virtuose issu d'une grande famille, et qui fraye avec les milieux communistes.
Mais c'est le fascisme qui menace alors le pays, et Boris est rapidement arrêté et exécuté pour sédition. Quelques années plus tard, Ulrich retrouve à nouveau la famille de Boris à travers Magdalena, sa soeur, qu'il épouse et avec qui il a un fils. Mais le métier d'Ulrich ne permet pas de subvenir aux besoins luxueux de la jeune femme, qui, au bout de quelques années, le quitte pour un riche pasteur protestant.
Ulrich n'aura plus jamais de nouvelles de sa femme et de son fils : une fois de plus, tout ce qu'il a aimé lui est arraché. La fin de cette partie décrit la vie de plus en plus effilochée d'Ulrich, devenu un employé modèle dans une entreprise de chimie, traversant le siècle en spectateur d'un pays en proie à des bouleversements constants. La deuxième partie, « Daydreams », est un saisissant contrepoint à ce récit morne et plombant d'une vie ratée : elle évoque, sous forme d'un entrelacs de récits, les « rêves éveillés » de ce triste personnage qui compense dans l'imaginaire la monotonie de son quotidien.
On découvre alors, en Géorgie, Irakli et sa soeur Khatuna, une jeune beauté à l'ambition sans limites, qui parvient à se faire épouser par un célébrissime milliardaire. Lors de l'assassinat de celui-ci, Khatuna et son frère s'envolent pour New York, où ils sont recueillis par Plastic Munari, un producteur de musique. Leur destin va croiser celui de Boris, un autre virtuose du violon élevé dans la misère en Bulgarie, mais qui, découvert par Plastic, va devenir une superstar.
Le récit décrit l'attachement maladif et tragique du fragile Irakli pour ce fascinant Boris, et la relation houleuse de Khatuna et Plastic. La fin du roman, qui voit revenir le personnage d'Ulrich, emprunte au genre du réalisme magique pour entremêler différents niveaux de réalité et offrir au lecteur une forme de fin alternative. Rana Dasgupta tisse des liens subtils entre les récits que s'invente son personnage et sa vie « réelle », au point de semer le doute : à quoi, finalement, doit-on croire ? L'auteur, avec virtuosité mais sans ostentation, nous rappelle que toute fiction est de l'ordre du croire, et célèbre avec nous cette jouissance gratuite qu'il y a à raconter, et à lire, une histoire.
Traduit de l'anglais (Inde) par Francesca Gee.
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