"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
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Quelle découverte ! M. Andreï Biély est avec Alexandre Blok un des chefs de file du symbolisme russe, pourtant je l’ai découvert avec cette œuvre. De ce livre, « Pétersbourg », Nabokov disait qu’il était une superbe fantaisie, en le rapprochant de l’Ulysse de Joyce. A sa lecture, je peux comprendre ce bel hommage.
On entre de suite dans une formidable hallucination, avec au centre du récit, un père et son fils. Apollon Apollonovitch Abléoukhov, l’homme d'état important et Nicolaï Apollonovitch, l’étudiant qui s’intéresse aux soubresauts révolutionnaires qui naissent en Russie (l’action se passe en 1905, dans la ville de Saint-Pétersbourg évidemment). Vivant mal une rupture amoureuse (inspirée directement par la vie de l’écrivain Biély comme on l’apprend dans la postface), le fils va se retrouver entraîné dans un acte terrible, où une bombe dans une boîte de sardine aura son importance. Comme auront leur importance, en vrac, les dominos rouge ou blanc, les rues visqueuses de la ville, une statue d’airain, des terroristes et des espions déguisés en terroristes, l’Egypte, un cabinet, un billet mystérieux, ou encore un ancêtre mongol.
Outre la multitude de visions fantastiques qui nous sont offertes, il est important de souligner le style, au service de cette ambiance étrange. Le travail de traduction est très bon, et l’on comprend là aussi toute sa difficulté en lisant la postface, car M. Biély est un poète, et il utilise son style pour rendre plus distinctes ses visions. C’est un livre véritablement habité par son auteur, par ses presque démences, par ses tourments, par sa vie emplie de paradoxe, que l’on retrouve magnifiquement rendue dans ce « jeu cérébral », dans ce théâtre d’ombres et de fantômes qui peuplent son récit.
Une lecture plaine d’angoisse, de troubles et de cauchemars, qui n’est pas évidente mais qui est une expérience incroyable. Influencé par Dostoïevski et Gogol, habité par la présence de Pouchkine, ce roman est bien digne d’entrée dans le panthéon des œuvres littéraires russes majeures.
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