Dien Bien Phu. 13 mars 1954. 8 mai 1954. Un printemps en enfer. Pas un jour qui n'ait eu son lot de blessés, de disparus, de morts.
Les douleurs, les humiliations, 3 000 survivants, condamnés au silence puis à d'autres « aventures » sur d'autres continents, les ont vite refoulées, par devoir autant que par nécessité. Occultées, elles n'en demeuraient pas moins prêtes à rejaillir à tout instant.
L'histoire, même si elle l'englobe et la dépasse, se passe difficilement de la mémoire. Un demi-siècle après cette retentissante défaite, il était nécessaire d'offrir une vision nouvelle de cet épisode, fondée sur le rôle et la perception des plus humbles, des « sans-grades », si l'expression peut avoir un sens à propos d'histoire militaire.
Aussi est-ce plusieurs dizaines d'anciens combattants français et vietnamiens de Dien Bien Phu qui ont été interviewés. Ces soldats oubliés étaient partis en Indochine avec la fougue, l'idéalisme et la naïveté de leurs vingt ans. Ils croyaient servir, tout simplement, leur pays, comme ils l'avaient servi, modestement mais sincèrement pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils livrent ici leurs motivations, leur vécu, leur mémoire, leurs contradictions, et les leçons qu'ils ont tirées de leur singulière expérience. Même les plus endurcis des combattants rencontrés, qui furent de toutes les guerres et de tous les fronts (comme le général Bigeard) n'ont pas cherché à masquer leur émotion. Ces textes ont bien souvent redonné vie et corps aux vieux démons qui habitent l'esprit de ceux qui ont côtoyé la mort d'aussi près et conservé, malgré eux, le souvenir d'images particulièrement cauchemardesques.
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