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Le projet de ce volume est de montrer que la question du langage tient une place décisive dans l'oeuvre de Jean-François Lyotard. Elle y soumet en effet la réflexion sociopolitique à des difficultés plus radicales que celle de l'idéologie immanente au discours de pouvoir. Elle demande en outre de situer l'enjeu non rationnel de l'art. Elle ouvre enfin sur une ontologie éclatée. Le problème qui occupe Lyotard est de savoir si la pensée peut faire droit à ce qui se dérobe par principe à la limpidité du langage.
Comment faire entendre en mots intelligibles ce qui échappe à l'ordre rationnel - discours et savoir ?
Lyotard veut résolument tenir les deux bouts de la chaîne : l'articulation et l'inarticulable, sans lâcher le « différend » - concept central - qui les divise. Sans lâcher non plus les différences qui scindent, à une extrémité, le discours articulé en genres irréductibles (spéculatif, scientifique, narratif, normatif, éthique...) ou, à l'autre bout, le sentiment du différend lui-même et la donation sensible qui inquiète l'art (littéraire inclus).
Tenir un tel pari demande de comprendre quels types de langage l'ordre rationnel met en oeuvre, quels autres il exclut et au nom de quelles règles. Le langage y perd son unité pour se diviser en une multiplicité de « jeux », devenue plus tard une pluralité de « genres de discours » irréductibles entre eux. Le tournant langagier de Lyotard s'est en fait amorcé dès 1976, en amont de la Condition postmoderne (1979), dans le travail de Lyotard sur les sophistes. Le Différend donne, en 1983, à la problématique langagière son amplitude maximale en proposant une « philosophie des phrases » inédite, qui articule le différend, le tort, le silence et l'injustice.
Les deux livres de 1979 et 1983 ont suscité les objections de Habermas et plus largement des tenants de l'éthique de la discussion. S'est ensuivi un débat entre les deux auteurs sur la manière d'entendre et d'opposer le « consensus » et le « différend ».
Débat régulièrement rappelé et relancé dans les réflexions sur le « commun », sur les conditions de la communauté sociopolitique.
Reste que le différend ne disjoint pas seulement les genres de discours entre eux, mais - répétons-le - le discours et ses autres que sont la sensation, le sentiment, l'enfance.
Peut-on alors faire de cet inarticulable, de ce silence lui-même une « phrase » et pourquoi, d'ailleurs, le devrait-on ? C'est le devoir et la possibilité de témoigner d'un silence intraitable qui est ici en cause pour Lyotard. Sa réflexion finale s'est alors portée sur ce bord entre langage et silence qu'est la phrase impossible, et non pas seulement interdite.
Les articles ici rassemblés interrogent les questions précédentes, posées par Jean- François Lyotard, ainsi que les réponses qu'il leur a données, et ce, depuis la thèse de 1971, Discours, figure, jusqu'aux derniers développements sur la « phrase-affect ».
Lyotard y apparaît comme un des rares philosophes de la « pensée française » (ou « French Theory ») à avoir jeté un pont entre la philosophie continentale et la philosophie analytique.
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