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On pense souvent la mondialisation comme un nouvel ordre du monde qui verrait les Etats céder le pouvoir aux forces du marché.
De la première mondialisation reconnue (fin du XIXe siècle) à la réalité contemporaine des firmes transnationales, de la globalisation financière et des régulation supranationales, c'est la libéralisation des échanges qui s'imposerait. On ne peut pourtant identifier la mondialisation à la victoire planètaire, soudaine et programmées du libéralisme. Elle est d'abord l'aboutissement provisoire d'un synergie historique de longue durée entre expansion géographique des échanges et progrès de la régulation marchande.
Aujourd'hui réunis, ces deux processus sont ici étudiés dans leur interaction heurtée depuis 1492, mais aussi dans leur balbutiement durant l'Antiquité ou le Moyen Age, européen et asiatique. Il apparaît alors que l'Invention du marché, plus précisément l'émergence des systèmes de marchés, est longuement bloquée en Europe et ne progresse sensiblement que si le pouvoir politique s'en mêle : Venise au XIIIe siècle ou Amsterdam au XVIIe en témoignent.
Dans cette dynamique, l'instrumentalisation du commerce lointain par les pouvoirs politiques est centrale. Les forces de marché préexistant à l'Etat moderne semblent, par elles-mêmes, ne pouvoir construire qu'un commerce lointain de nature opportuniste. C'est l'Etat qui canalise ces forces au service d'un dessein ambitieux : la création de systèmes de marchés nationaux permettant l'essor du capitalisme à la fin du XVIIIe siècle.
Ensuite, les puissances hégémoniques successives poussent au libre-échange dans la mesure où ils entrent immédiatement leurs intérêts. Il n'est pas sûr pour autant que cette libéralisation soit aujourd'hui irréversible : l'entre-deux-guerres a bien montré comment le libéralisme hérité du XIXe siècle a fait long feu et, dans la douleur, cédé la place au " fordisme " des Trente glorieuses. L'histoire révèle combien l'économie de marché demeure une utopie toujours réinventée et permet de préciser les conditions dans lesquelles sa contestation peut se déployer.
Etant aussi une invention politique, le marché restera sous influence politique.
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