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Montmajour domine - en douceur - Arles et les plaines alentour depuis le xe siècle.
Plaines à l'époque recouvertes de marais poissonneux d'où émergeait l'abbaye sur son île, «l'île de Montmajour», où le roi René s'invitait volontiers pour justement déguster la pêche des moines. À la fois proche et distante, Montmajour appartient donc depuis plus de mille ans au paysage d'Arles. Quant aux espaces intérieurs, la chapelle, le cloître, etc., ils nous sont parvenus dans toute leur pureté, leur sérénité et une élégance particulière, tout à fait propice à accueillir les collections de vingt ans de recherches internationales sur le verre et les arts plastiques du CIRVA de Marseille, dans le cadre de Marseille-Provence 2013, Capitale européenne de la culture.
Sacré et Profane, Corps et Esprit, Vide et Plein, Ascèse et Baroque, Forme et Disparition, Présence et Absence, Force et Fragilité, Transparence et Opacité, autant de vocables en forme de presque oxymores qui s'appliquent parfaitement à la fois au site de Montmajour, au verre - travaillé rue de la Joliette à Marseille depuis 1983 par Sottsass et Bob Wilson, Charpin et Othoniel, Jana Sterbak et Javier Perez, pour ne citer que quelques noms parmi ceux qui ont collaboré là avec Françoise Guichon puis Isabelle Reiher - et aux oeuvres dont j'ai fait un choix subjectif : ces pièces vont trouver leur place dans les divers espaces du monument comme autant de conversations, de scansions et d'histoires, en relief ou en creux, en accord ou en contraste, en silence ou en couleur.
Pour accompagner les pièces du CIRVA, on soulignera le parcours d'autres oeuvres qui compléteront la promenade et m'aideront à raconter et partager ma vision de l'abbaye, tour à tour terrain de jeux et d'escapades, de rendez-vous d'amour et de travail, lieux de culture et de méditation. Ce sera entre autre Beautiful Step, un escalier de Lang et Bauman dans la chapelle, un peu comme une échelle de Jacob, des photos (Stocker, Ellena, Roller), de la peinture (Quesniaux), des installations (Estefania Penafiel Loaiza), mais aussi des vêtements et des objets liturgiques (venus du musée de la Visitation de Moulins et de Saint-Trophime à Arles) dans la sacristie et la salle du trésor, ainsi rendus à leur vocation première, certains costumes d'anges ou d'ecclésiastiques que j'ai dessinés en 2011 pour l'Opéra de Cologne, etc.
Et une invitation spéciale à Gérard Traquandi, à qui je laisserai carte blanche pour investir le parloir, jusque-là inaccessible au public, avec dessins, peintures, sculptures et ses «résinotypes», technique photographique du xixe siècle retrouvée par lui pour tirer ses images «noir sur noir», puisque Montmajour chaque été s'inscrit dans le parcours des Rencontres internationales de la photographie d'Arles.
J'espère ainsi montrer Montmajour sous un jour inattendu et authentique à la fois, faire découvrir les collections du CIRVA en leur faisant rencontrer et raconter en filigrane l'un des monuments les plus particuliers du pays d'Arles.
Christian Lacroix
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