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Dans un court article publié en 1909, Heinrich Wölffl in (1864-1945), qui n'est pas encore devenu l'immense historien de l'art qui marquera toutes les générations à venir, s'insurge contre un enseignement de l'histoire de l'art tourné exclusivement vers l'histoire. Il égratigne au passage les musées, condamne le tourisme « cultivé » et ses guides qui ne font qu'alimenter chez le profane une boulimie de voir et une illusion historienne de pseudo connaisseur. Son texte n'a pas pris une ride... Que reste-t-il de l'expérience esthétique aujourd'hui ? Comment voir encore les oeuvres ? Où peut-on encore les contempler ? Comment les comprendre ? quand le savoir fait écran au regard...
« On se sent obligé de tout voir, écrit Wölffl in, et c'est fort dommage, car ce faisant on voit trop, ce qui revient à ne rien voir du tout. [...] Voyager devient un supplice, [...] Les guides de voyage prescrivent la quantité de ce qui doit être « fait » chaque jour, et pas question de rester à la traîne ! », lit-on plus loin. « Si le public a donc les yeux plus grands que le ventre, il me semble par ailleurs qu'un tel vernis de culture en matière d'histoire de l'art a engendré une sorte de fausse posture de connaisseur, qui fait obstacle, plus qu'elle n'y prépare, à la connaissance véritable des choses. [...] Pour comprendre l'art, peu importe de savoir ce qui fait la particularité des mains d'un Botticelli, et en quoi elles se distinguent de celles d'un Filippino Lippi ; ce qui importe, c'est de savoir ce qu'est une main bien dessinée, et nous devrions employer toute notre énergie à éduquer le jugement en ce sens. » C'est une erreur, nous dit Wölffl in, d'accorder plus d'importance à l'attribution d'une oeuvre et à la description savante de son style qu'à sa valeur ! C'est l'éducation de l'oeil et l'exercice de la compréhension qu'il nous faut développer. En nous expliquant comment le regard devant l'oeuvre est saisi par une apparition claire et immédiate (qui a elle-même sa dimension historique), Wölffl in nous donne ici les clés de l'explication de l'oeuvre d'art. Rien de moins.
Le ton, très virulent, est celui du Nietzsche de la 2e des Considérations inactuelles. Quant au texte suivant, qui donne son titre au volume, c'est un classique, inédit en français . Il ne fait ici que développer et approfondir l'ensemble des questions évoquées par le premier, les ouvrir. Ces deux textes nous livrent « les buts essentiels de l'éducation du sens artistique » et annoncent les Principes fondamentaux de l'histoire de l'art (à paraître en 2019, dans une traduction inédite).
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