« Face à moi, à quelques encablures, après la jetée, la ville, la même que dans le souvenir, inchangée, fière, inerte, délavée, boudeuse. Elle me tournait le dos dans l'aube blanchâtre. Je l'avais quittée lâchement, je m'en étais libéré, et elle m'avait renié. Enzo aussi était parti. Nous étions les seuls. Tous les autres étaient restés. Tous les autres étaient morts. Même ceux qui avaient survécu. Je nous revoyais, insouciants petits cons. On parlait de partir, laissant couler nos mots à la manière d'une chanson légère, anecdotique, de celles qu'on aime, mais qu'on oublie dès le dernier accord. On battait le pavé dans les artères de la ville, nous étions sa sève et elle faisait corps avec nous. C'était tout. On regardait au loin sans trop y penser. Et le ciel d'un jour à l'autre toujours identique collait à nos vies comme un linceul. » Les Noirs Crépuscules, à la jonction du roman et du recueil de nouvelles, raconte les jours et les nuits de la plus sale des villes, au cours des saisons, des années, et se penche sur l'histoire de celles et ceux qui tentent de survivre aux soirées sans étoiles.
Tour à tour globe-trotter, photographe, clochard, Eddie Paggetto n'a jamais cessé d'écrire ni de rêver. Refusant gentiment mais fermement de montrer son travail à des éditeurs, il répétait sempiternellement le même laïus : on verra quand je serai mort. Eddie Paggetto a disparu en mer en 2011, à l'âge de vingt-neuf ans, laissant derrière lui quelques romans et des dizaines de nouvelles, tous inédits, qu'il nous avait confiés et dont vous allez en découvrir une parties cet ouvrage.
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Caraïbes, 1492. "Ce sont ceux qui ont posé le pied sur ces terres qui ont amené la barbarie, la torture, la cruauté, la destruction des lieux, la mort..."
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