Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Thomas est parti. Ça fait déjà deux ans. On ne sait pas où. On ne sait ni pourquoi, ni avec qui. On ne sait rien. Et de ce rien il faut bien faire quelque chose. Alerter la police ou non. En parler ou se taire. Rendre cette histoire réelle ou pas. Faire avec. Inventer un récit. Convoquer le fantôme. Vivre avec lui. Ou bien le faire sortir par la porte. L'oublier jusqu'à ce qu'il revienne en rêve. Par la fenêtre. Par la forêt. Par ce détail ou cet objet qui rappelle sa mémoire, sans cesse. Et puis un jour, Claire, sa femme, Joan et Hélène, ses amies, sont convoquées au commissariat. C'est qu'il y a quelque chose de louche autour de la disparition de Thomas Cassar. On ne disparaît pas comme ça. Il y a toujours quelque chose. Il y a toujours quelqu'un.
Babelio m’a proposé de recevoir Les manquants dans le cadre d’une opération Masse Critique privilégiée (merci infiniment ainsi qu’aux éditions Seuil). Ce n’est pas le genre de roman que je lis habituellement et c’est pourquoi j’ai accepté, j’aime sortir des sentiers battus et faire des découvertes.
Claire est mariée depuis vingt ans à Thomas et mère de deux grands enfants. L’image de la famille parfaite se ternit quand Thomas part, sans rien laisser derrière lui. Pourquoi ? Est-il encore en vie ? Si oui, où est-il ? Tant de questions restées sans réponses. La vie de Claire est en suspens. Deux ans plus tard, Claire est conviée au commissariat de police pour répondre à des questions.
Les manquants est un roman choral où les chapitres alternent trois voix de femmes : Claire et ses amies d’enfance, Hélène et Joan. Chacune se livre dans un monologue, pas toujours linéaire. Elles racontent leurs études, leur amitié, le mariage de Claire et Thomas mais aussi leur vie intime, ce qui les a façonnées. On en oublierait parfois presque la disparition de Thomas, tant elles ont à raconter. J’ai apprécié le style d’écriture, très « parlé » et la narration sous forme de monologue. Il ne s’agit pas réellement d’un interrogatoire de police mais bien d’une confession à cœur ouvert.
J’ai trouvé ce roman surprenant dans son choix narratif, c’est le premier point positif à mes yeux. J’ai aussi apprécié l’atmosphère lourde, pesante, annonciatrice de la catastrophe à venir. Un ouvrage captivant et surprenant, une plume à découvrir !
Lorsque Babelio m'a proposé ce roman dans le cadre d'une masse critique privilégiée, j'ai été interpellée par le sujet du mari disparu, de savoir pourquoi et de voir comment ce thème pouvait être traité. Je ne connais pas l'autrice, je me suis dit que c'était donc un bon moyen de la découvrir.
Maintenant que j'ai refermé le livre, je me rends compte du double sens du titre. Les manquants pour cet homme disparu et tout ce qui va avec, mais on parle aussi de manquants dans la vigne pour désigner les pieds morts et qui ne sont pas toujours remplacés. Justement, on va être plongé dans le domaine vinicole avec Claire, la femme du mari disparu.
Mais, revenons au début du roman. On est à notre époque, je pense car ce n'est pas dit précisément. Thomas a donc disparu, il est parti de chez lui et n'est jamais rentré. On est deux ans plus tard, au commissariat, Claire, la femme de Thomas, est venu signaler la disparition. Claire a la quarantaine et a eu deux enfants avec Thomas. On est étonné qu'elle ne vienne qu'au bout de deux ans, on découvre peu à peu pourquoi elle ne l'a pas fait avant, les circonstances. Pour Claire, signaler cette absence serait pour elle, reconnaître qu'il est parti et ne reviendra pas. On en apprend plus petit à petit sur leur relation, leur vie, le caractère de Thomas, et on comprend le silence de Claire. Celle-ci n'est pas seule à venir au commissariat, Claire est épaulée de deux de ses amies, Hélène et Joan. Elles vont aussi se raconter et parler de Thomas, de leurs relations avec lui. Hélène est célibataire, elle connait le couple depuis la Fac, c'est un esprit libre, une âme écorchée qui a une vision du couple différent. Joan, elle, a fui son pays natal, les États-Unis, ne supportant plus le mode de vie là-bas. Elle est en France sans papiers, elle ne se sent pas à sa place et ne sait où aller. Elle trouve dans Claire et Hélène des soutiens. Les deux amies connaissent le couple et ont des avis sur celui-ci et sur Thomas.
On va découvrir tout cela petit à petit, au fur et à mesure de leurs dépositions à toutes les trois. On va rentrer dans l'intimité du couple, chacune ayant des révélations que les autres ne savent pas sur le mari ou sur leur amitié, chacune ayant des théories sur ce que Thomas ait pu penser ou faire. Elles ne sont pas au bout de leur surprise et moi, en tant que lectrice, non plus. Tout cela crée un certain climat anxiogène, je me suis posée pas mal de questions sur Thomas, j'ai eu plein d'hypothèses sur lui, sur ce couple, et je suis parfois tombée des nues.
C'est un roman de femmes, l'homme est le grand absent et c'est plutôt bien fait de la part de l'autrice. Beaucoup de sujets sont évoqués. Claire a quitté la folie de la vie parisienne, et part reprendre le vignoble de ses parents. On sent la patte de l'autrice qui écrit aussi sur la sociologie du monde vinicole. Tout est très précis, on ressent les connaissances de l'autrice. L'histoire oscille parfois avec des faits qui ne sont pas réels, les personnages parlent du jour de l'Oural où tout a basculé. J'ai aimé aussi cet aspect écologique à l'histoire en plus du côté social et intime. Maintenant que j'ai fini le livre et que j'ai une vue d'ensemble sur l'histoire, j'ai trouvé tout de même certains manquements au suspense. En fait, les causes sont simplissimes, je ne peux rien dire et ne rien dévoiler, mais tout est finalement très simple. Peut-être est-ce moi aussi qui m'attendais à quelque chose de plus compliqué, je dois avoir l'esprit tordu ..
J'ai aimé le style de l'autrice, elle décrit très bien les sentiments, les faits, mais aussi le contexte social ou écologique. Je ne me suis pas autant attachée aux personnages que je l'aurais voulu. Et pourtant la narration est à la première personne du singulier, je suis d'habitude sensible à ce "je" qui me permet de me mettre à la place du personnage, mais là, je n'y suis pas arrivée. J'ai à la fois pu me mettre dans la peau de Claire, Joan ou Hélène. J'ai été touchée par la vie de Claire, par son vécu, et aussi par Joan, mais je n'y suis pas arrivée avec Hélène. Mais cela est mon ressenti, qui ne sera pas vécu par un autre lecteur. Pareil, j'ai eu parfois un peu de mal, il y avait quelques longueurs, on revenait sur certains faits, c'est logique vu qu'elles sont trois à donner leur avis sur un même cas. Je pense que tout cela est aussi dû au fait qu'il n'y a aucun dialogue, ce n'est que du texte, il n'y a jamais aucune interaction. Les femmes s'adressent aux policiers, les interpellent, mais il n'y a jamais de réponses. C'est bien fait de la part de l'autrice, c'est très original, mais cela rend parfois la lecture plus lourde. Il y a tout de même du rythme grâce à l'alternance des chapitres entre les trois femmes, toujours dans le même ordre, Claire, Hélène, Joan.
Ce roman est une lecture parfois étrange et en même temps prenant, le malaise règne, on ne sait pas où on va arriver. C'est ce qui m'a tenu en haleine et l'envie de finir le livre, je voulais savoir.
Pourquoi Claire n’a t-elle jamais signalé la disparition de son mari ? Pourquoi se livre t-elle sans fard deux ans plus tard, en répondant sans réticence à une convocation officielle de la police ? Les raisons de cette omission feront partie de ce qu’elle livre à l’agent chargé du recueil de ses paroles. Les années jeunesse, l’amour, les enfants mais aussi cette étrange allusion à une communauté dont l’existence se précise peu à peu au cours de la narration. En filigrane de ce discours ordinaire, se profile aussi un décor post apocalyptique fait de violence, de pénurie et de guerre civile, d’autant plus angoissant que banalisé.
Mais Claire n’est pas la seule à témoigner. Viendra la version de Joan et d’Hélène, les amies fidèles depuis les années d’études.
Peu à peu l’histoire se construit, celle du couple, celle du groupe et celle du milieu dans lequel ils évoluent. Des certitudes à la décadence, des doutes à l’effondrement. Plus qu’un thriller en quête de la résolution d’une énigme, le roman dresse un constat sur le couple, et sur les aspirations d’une jeunesse dont l’idéalisme volera en éclat quand plus rien ne sera possible. Il révèle aussi l’incommunicabilité et l’illusion de de croire que l’on peut connaître parfaitement les gens avec qui l’on vit.
Chronique sociale déguisée en pseudo polar, Les Manquants met le doigt sur les fragilités de ce qui constitue les piliers de notre organisation sociale.
La fluidité de l’écriture , qui restitue avec beaucoup d’adresse un discours ordinaire, est un des atouts de ce roman original.
Merci à Babelio et aux éditions Seuil
256 pages Seuil 3 mars 2023
Masse critique Babelio
https://leslivresdejoelle.blogspot.com/2023/03/les-manquants-de-marie-eve-lacasse.html
Thomas est parti. Cela fait déjà deux ans. On ne sait pas où. On ne sait ni pourquoi, ni avec qui. On ne sait rien. Il s'est volatilisé. Que doit faire Claire, la femme avec qui il est marié depuis 20 ans, la mère de leurs deux enfants ? Alerter la police ou non. Faire avec. Inventer un récit. L'oublier jusqu'à ce qu'il revienne en rêve.
Quelques années plus tôt Claire avait abandonné l'enseignement pour reprendre les vignes de ses parents et donner un sens à sa vie, Thomas était un informaticien déprimé par son récent licenciement. C'était un être renfermé, secret, impénétrable et tourmenté qui, ces derniers mois, avait pris l'habitude de souvent s'absenter.
Et puis un jour, deux ans après la disparition de Thomas, Claire et ses deux amies, Hélène et Joan, sont convoquées au commissariat. Il y a quelque chose de louche autour de la disparition de Thomas...
Amis depuis leurs années de fac, les trois femmes et Thomas ont vécu ensemble des insurrections étudiantes, soudés par la politique avant que leur choix de vie ne les éloignent. Claire s'est mariée avec Thomas et a adopté une vie rangée en banlieue, Hélène a mené une vie de débrouille et de galère alors que Joan, américaine sans papiers, a continué à vivre dans la peur permanente de l'expulsion.
Les trois femmes sont auditionnées séparément, le récit est constitué de leurs voix successives, sans que celles des enquêteurs ne soient jamais entendues. Leurs dépositions dessinent peu à peu les contours de la personnalité de Thomas et de son infinie complexité.
Au fil des pages on comprend pourquoi Claire n'a pas signalé la disparition de son mari, pourquoi elle s'est installée à "La Commune" avec ses deux amies de fac à une époque, située dans un avenir proche, dominée par la peur permanente de la guerre, du dérèglement climatique, des pluies toxiques, des pénuries, des famines et des catastrophes, une période historiquement de grande angoisse. On découvre pourquoi la police convoque les trois femmes deux ans après la disparition de Thomas, le puzzle se reconstitue progressivement.
Un roman sur l'absence, le manque, l'abandon, l'attente. Un roman sur la torture que représente un "deuil vivant", sur l'ambivalence des sentiments de Claire à la fois libérée du regard jugeant de son mari "ce regard tout le temps posé, c'est épuisant, c'est dur ", mais malheureuse de son départ.
La plume est vive, la narration et la construction sont très efficaces, le sujet captivant, le début est enthousiasmant mais le roman ne tient pas ses promesses sur la durée, il finit par accumuler des invraisemblances et se termine de façon très étrange me laissant complètement sur ma faim. Un roman qui m'a finalement semblé inabouti.
Claire, Hélène, et Joan se succèdent dans un bureau au commissariat pour évoquer Thomas, l'époux de Claire qui a disparu depuis deux ans.
Claire et Thomas s'étaient rencontrés à l'université, puis mariés à la surprise de tous car leur caractères et leurs aspirations ne semblaient pas vraiment correspondre. Vingt ans de vie commune, des enfants aujourd'hui adolescents, un changement radical de vie avec l'installation sur les terres des parents de Claire pour reprendre l'exploitation viticole. Désormais Claire sait qu'il faut parler de cette disparition pour enfin pouvoir vivre à nouveau, divorcer d'un absent, ou d'un mort, qui sait, pour reprendre cette liberté dont elle n'a jamais voulu mais qui lui a été imposée par ce mari parti un matin et qui n'est jamais revenu.
Depuis, il y a eu l'attente, l'incompréhension, les questionnements, les doutes, les angoisses, les silences, les peurs, la révolte, les obsessions, les nuits blanches, la méfiance des autres, leurs regards, leurs doutes, et chaque jour le vide abyssal de l'absence inexpliquée.
Depuis, Claire la vigneronne tente de vivre, travailler, penser, élever les enfants, alors que tant de doutes l'assaillent. Amies de toujours, Hélène et Joan sont là pour l'épauler, la faire réagir, l'aider.
Dans un monde en déliquescence, un cataclysme climatique est venu changer à tout jamais la vie des citadins. Où, quand, comment, on ne le saura jamais. Mais Claire et ses amies ont rejoint la Communauté. Là, à l'abri de la pollution, des inondations, du manque de nourriture, elles ont décidé qu'il est temps pour Claire de changer de vie, vendre se
s biens, aider la Communauté. Et cela passe par la déclaration de disparition de Thomas.
De chapitre en chapitre, qui tous portent le prénom d'une des trois femmes, le lecteurs découvre la vie de Thomas entre ombre et lumière, mensonge et vérité, amour et amitié. Chacune dévoile la facette du Thomas qu'elle a côtoyé. Cet homme que Claire croyait si bien connaître apparaît peu à peu, semblable ou différent, cet homme brillant qui s'étiolait depuis quelques années dans son travail se révèle un être mystérieux et quasiment inconnu.
J'ai aimé la façon dont l'autrice traite l'absence, la disparition, la culpabilité, les questionnements et le doute que celle-ci entraîne chez ceux qui restent. Mais aussi la façon dont chacun trouve sa place dans une société qui ne l'accepte pas toujours pour ce qu'il est.
https://domiclire.wordpress.com/2023/03/10/les-manquants-marie-eve-lacasse/
Deux ans après la disparition de Thomas, Claire est convoquée pour être entendue au commissariat. Deux ans, c’est bien tardif ! Toutefois les disparitions volontaires – et donc relayées au second plan – sont parfois requalifiées en disparitions inquiétantes … Claire est persuadée que Thomas les a quittés, elle et leurs deux ados (Hortense et Léo) parce qu’il n’a jamais pu accepter qu’elle démissionne de son poste d’enseignante parisienne pour reprendre l’exploitation viticole familiale, à Valroye (c’est une vigneronne passionnée …)
Hélène, l’amie de jeunesse de Claire va – elle aussi – apporter son témoignage à la police. Les deux femmes se sont éloignées l’une de l’autre, il y a une vingtaine d’années, depuis le mariage de Claire et de Thomas. Hélène laisse entendre que l’adolescente dynamique et rebelle s’est transformée en une mère et une épouse sage et travailleuse. Malgré cela, elle admet qu’une certaine complicité avait fini par se tisser entre Thomas et elle-même … Hélène est demeurée fidèle à Paris (où elle espère encore devenir actrice !) Tout le monde ignore qu’elle vend ses charmes à des hommes plus ou moins fortunés pour survivre …
Joan, enfin, la seconde amie étudiante de Claire (une américaine à moitié cherokee) qui a fui son pays d’origine (en restant très discrète sur les raisons de ce rejet …) suppute également que Thomas – qu’elle considérait comme un fasciste et un réactionnaire – a vraisemblablement lâchement abandonné sa famille … Pourtant, elle reconnait qu’il l’a bien aidé (grâce à l’appui de son propre père, personnage influent, Place Beauvau …) afin que l’administration « oublie » qu’elle résidait en France de façon irrégulière …
Un roman choral plutôt original, qui interpelle le lecteur et questionne tout un chacun sur l’arrogance de nos certitudes – quant à notre réelle compréhension de l’autre (voire de nous mêmes …) Sur notre fréquente capacité à renoncer à nos rêves ou à nos convictions. Une intrigue construite telle une enquête policière, qui démontre à quel point l’absence remet tout en question … Et un épilogue inattendu, qui laisse la porte ouverte à une angoissante éventualité … C’est bien écrit, l’analyse psychologique sur le doute et le manque est fine et pertinente. Je remercie vivement la Masse Critique Privilégiée de Babelio pour cet envoi !
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
L’écrivain franco-vénézuélien Miguel Bonnefoy poursuit l’exploration fantasmagorique de sa mémoire familiale...
Des romans policiers à offrir ? Faites le plein de bonnes idées !
Nostalgique, nomade ou plutôt romantique ? Trouvez le livre de la rentrée qui vous correspond !
il fait partie du POL, et ta chronique m'incite à le lire. Après... :-)