"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une jeune femme sort de l'hôpital, dépossédée de son identité et de son passé. Elle voue une haine farouche aux psychiatres, fréquente les magasins de bricolage. Il lui arrive même de crever les pneus des voitures.Temporairement amnésique, absolument indocile, elle veut repeupler sa mémoire et pour cela, doit enquêter. Un homme va l'y aider, sans rien lui souffler : Camille, dit K, ami et gardien d'un passé interdit.Le souvenir d'un désert entouré de vitres, une fonction exercée au ministère de l'Agriculture, une bible restée ouverte au chapitre du Déluge forment un faisceau d'indices de sa vie d'avant. Quelques démangeaisons et une irrépressible envie de décortiquer le monde et les êtres qu'elle croise hantent ses jours présents.Sa rencontre avec Wajdi, envoûtant et révolté, marquera son coeur et son esprit. Ce sera avant de gagner la Bretagne et, peut-être, de parvenir à combler les énigmes de son histoire prise au piège de l'oubli.La trajectoire d'une femme cousue à celle de la planète, c'est le pari de ce premier roman en forme de fable écoféministe où la tragédie contemporaine côtoie l'espoir le plus fou.Hypnotique, drolatique, libre et profondément humain.
C’est l’histoire d’une jeune femme qui est « vide, oui vide comme un pot, aussi creuse qu’une huître de troisième catégorie échouée sur la plage un soir de tempête ». Elle a perdu la mémoire suite à une psychose schizophrénique post partnum, mais même ça elle n’en a plus le souvenir.
Elle en a oublié son prénom, d’où elle vient, bref tout ou presque ! En revanche, elle ne sait plus vraiment pourquoi mais elle crève les pneus de voiture, voue une haine féroce aux médecins et note dans des carnets les mots qu’elle ne connaît pas. Un homme, Camille, l’accompagne, lui apporte son aide pour réapprendre à vivre « normalement ». Il semble bien la connaître mais, sur les conseils des médecins, ne peut rien lui dire de son passé. Elle doit y arriver par elle même.
C’est cette quête de la mémoire à laquelle on assiste. Et cela donne un récit à l’écriture sans filtre, un peu naïve et tellement rafraîchissante (que ce soit pour parler d’une expérience sexuelle, de ketchup ou d’un magasin de bricolage).
Le tout est subtilement (enfin pas tant que ça mais c’est un sujet à part entière de cette quête) ponctué de bonnes actions écologiques pour sauver (ou tenter de) la planète (ampoules à LED ou fluocompactes, récupération plutôt qu’achat neuf ...).
Certains passages sont de la poésie à l’état pur « j’apprendrai que désir est un croissant de lune. Il apparaît, il disparaît » ou plus loin « je collerai à toi les prairies sans fleurs de ma mémoire ».
Bref, un premier roman étonnant, surprenant et percutant.
J’ai terminé le roman de Louise Browaeys ingénieure agronome et autrice de plusieurs ouvrages sur la permaculture, l’écologie et la nutrition il y a quelque temps déjà… Et puis, il faut bien que je me lance et que je transmette mes impressions à la communauté de lecteurs.
Exercice difficile, d’abord par ce que c’est le premier roman de Louise Browaeys , le premier volume d’une toute nouvelle collection « Traversée » (janvier 2020) et la première rentrée littéraire pour les éditions Harper Collins France, ensuite parce que j’ai eu la chance de lire ce roman en avant-première grâce à une masse critique privilégiée Babelio , et enfin parce que comme dirait ce vieux Boileau la critique est aisée mais l’art est difficile …
Bon alors pour éviter davantage de circonvolutions , je l’avoue : je n’ai pas aimé ce roman. Et pourtant, pour toutes les raisons citées ci-dessus, j’aurais vraiment voulu pouvoir écrire le contraire … Je croyais qu’il me plairait à cause de l’illustration de couverture de Rozenn Le Gall, tout d’abord, qui m’attirait par son aspect surréaliste : il s’agit d’un collage poétique, une femme au visage et au torse remplacés par une plante verte. Cela m’interrogeait tout de suite sur la place de la femme : une simple plante verte dans le monde d’aujourd’hui ? Une source de vie ? L’image était suffisamment ambiguë pour susciter toute ma curiosité. Celle-ci était également piquée par le bandeau vert chlorophylle sur lequel se dégageait une interrogation : « Tu es en train de vivre avant nous la fin du monde, tu comprends ? » qui sonnait comme une interpellation. La 4e de couverture accentuait ce désir de lecture avec son néologisme fable « écoféministe » et les adjectifs « hypnotique » et « drolatique ». J’aime en effet les livres qui ne sont pas trop lisses, surprennent par leur forme et leur style et font réfléchir …
J’ai cru en tenir un exemple entre les mains : Il commençait par l’énumération de douze définitions de la dislocation dans tous les domaines ( du géologique au psychologique en passant par le militaire) qui donnait des significations multiples au titre de l’ouvrage. L’héroïne, « voyageuse sans bagages », qui tentait de recoller son passé et de se reconstruire par le biais du langage en s’accrochant à son carnet de mots et en s’appuyant sur son ami, le mystérieux Camille dit K, voyait le monde d’un œil neuf, décrassant et je trouvais cela intéressant comme le style émietté et mimétique de cette mémoire pulvérisée. J’aimais aussi que la romancière se soit appuyée pour sa trame sur des affaires authentiques : la manifestation Women’s Pentagon Action des années 1980, l’expérience Biosphère II dont je n’avais jamais entendu parler auparavant et la vie de la jeune Tara Westover, jeune femme élevée dans un milieu sectaire survivaliste qui a pu miraculeusement s’en sortir comme elle en a témoigné dans « Une éducation ». J’y trouvais enfin de jolies formules que j’avais envie de noter moi aussi dans un carnet et que d’autres ont, avant moi ,consigné dans les « citations » de Babelio…
Mais cela n’a pas suffi…l’histoire est découpée en trois parties et dure environ neuf mois, le temps d’une gestation ou d’une renaissance de l’héroïne à elle -même mais ces trois parties sont trop hétéroclites. Le côté thriller à la Robert Ludlum ou à la « XIII » (la recherche de sa mémoire) est abandonné quand « K » révèle brusquement des pans entiers de son passé à l’héroïne et j’ai regretté ce côté abrupt. On passe ensuite à une partie qui ne me semble nullement indispensable : la quête de sens par la reconquête des sens et l’on a droit à de longs passages sur des amours saphiques et échangistes puis dans la dernière à un vagabondage très post 1968 à St Brieuc sur les traces de Louis Guilloux. J’ y ai cherché en vain dans ces pages le « drolatique » qui nous était promis… Tout cela était un peu anxiogène en fait… Et les relations humaines qui y sont décrites sont tout aussi pessimistes. Enfin j’ai été vraiment agacée par les métaphores filées qui dressaient un parallèle peu subtil entre la destinée de la planète et celle de la protagoniste. On a bien un récit « écoféministe » mais sans la légèreté de la fable…
Il m’a donc manqué un véritable fil directeur et plus de structure. J’ai un peu l’impression d’un rendez-vous manqué d’autant que l’épilogue et la coupure de presse finale , un faux article du Journal « la Croix » en 2030, relance in fin l’intérêt qui
Pour débuter mon billet, je voudrais d'abord m'arrêter quelques instants sur la couverture. Des couleurs assez lumineuses, de mon point de vue, une jeune femme assise avec, à la place de la tête, une plante verte. Si j'avais déambulé dans une librairie, c'est typiquement le genre de couverture qui m'aurait fait arrêter pour regarder de quoi parlait le bouquin. Et pour le coup, la couverture prend son sens à la lecture du résumé.
Une jeune femme d'une trentaine d'années a perdu la mémoire. Elle ne sait plus qui elle est, ce qu'elle fait dans la vie, elle a oublié jusqu'à son nom. Elle raconte alors sa quête pour retrouver qui elle est et pourquoi elle a perdu la mémoire. Je n'en dirai pas davantage car j'ai peur de trop en dire.
Je parlerai donc surtout de mon ressenti, ou plutôt de mes ressentis. Et je m'excuse d'avance si ça a l'air décousu car ce livre m'a quelque peu déboussolée.
En effet, ce roman m'a fait passer par pas mal d'états différents. de l'ennui à l'indifférence parfois, en passant par un grand grand intérêt à certains moments.
Au bout d'une centaine de pages, ennuyée, j'ai été tentée de venir lire quelques avis pour savoir où j'allais ou si j'étais la seule à me sentir quelque peu désarçonnée par l'histoire, que je trouvais compliquée, et par la narration, difficile à suivre. Je ne l'ai pas fait par crainte d'en lire trop et ai continué ma lecture. Et là, hop, un tournant arrive dans l'histoire et je me dis que ça y'est, ça décolle enfin, d'autant que ça partait dans un sens qui me plaisait beaucoup. Mais, malheureusement, l'auteure n'a pas poursuivi dans cette voie alors qu'elle avait selon moi matière à le faire. Et mon intérêt a rebaissé malgré quelques fulgurances qui m'ont bien plu et un épilogue que j'ai trouvé à la hauteur.
On ne peut pas dire non plus que Louise Browaeys n'a pas de style, elle en a même un bien à elle, mais son écriture m'a plus d'une fois perdue et je n'arrivais pas toujours à suivre le fil de sa narration. Dommage...
Le sentiment qui demeure quelques jours après avoir lu ce roman, et qui m'a accompagnée également une bonne partie de ma lecture, est le fait de louper quelque chose, d'avoir en tout cas loupé quelque chose. Je suis restée à quai, n'arrivant pas à éprouver beaucoup d'empathie ou de sympathie pour notre héroïne dont je ne comprenais décidément pas les décisions, me perdant dans les méandres de son cerveau. J'ai l'impression d'avoir couru après le train tout le long de ma lecture et d'être finalement arrivée à bout de souffle sans pour autant avoir pleinement saisi le message porté par ce roman. Je pense que cette oeuvre pourrait faire partie des rares livres que je pourrais relire pour peut-être enfin arriver à en comprendre l'essentiel.
En résumé, je reste sur un souvenir mitigé, je ne peux pas dire que je n'ai pas aimé mais je ne peux pas dire non plus avoir adoré. J'ai beaucoup apprécié certains passages et j'aurais tellement aimé que Louise Browaeys parte dans la direction qu'elle avait prise à un moment de son récit. Reste une plume qui a du style et une histoire de fond très intéressante même si mal exploitée selon moi sur certains aspects.
À Paris-Montreuil, à l'automne 2016 - 2017, une jeune femme sort d'un long séjour en hôpital psychiatrique en n'ayant plus aucun souvenir ni des trois derniers mois, ni des trois dernières années de sa vie. Pendant un mois, elle est chez elle sans ouvrir la bouche et reste couchée. Elle ne sort de sa torpeur que lorsque K, qui serait un ami d'enfance et dont le prénom se révèlera être Camille, 33 ans, vient lui donner à manger et s'occuper un peu d'elle. Celui-ci a un fils de 4 ans, Aurélien. Elle va peu à peu réapprendre l'usage de la parole et devoir enquêter pour essayer de repeupler sa mémoire, ceci avec l'aide de K.
C'est le long cheminement que va accomplir cette jeune personne pour tenter de retrouver la mémoire, de savoir qui elle est, que Louise Browaeys dont La dislocation est le premier roman, nous narre.
Pour cela, elle va tenter diverses voies. Elle veut tout d'abord redécouvrir le sexe et rencontrera alors Béatrice et Jean-François et se rappellera avoir aimé des femmes.
Si Béatrice a tenté à sa manière de l'aider, c'est Wadji, employé dans un magasin de bricolage le révélateur. "Si quelqu'un m'a remise en mouvement à cette époque-là et a presque réussi à m'aider à découvrir ce que j'avais à découvrir, c'est Wadji."
Elle passe par des périodes d'abattement et de peur intense, n'arrivant pas, même avec l'usage des mots à décrire ce qui se passe au fond d'elle, et des périodes de rémission plutôt dans l'excès contraire. L'auteure définit d'ailleurs en ces termes la dislocation : « On parle de dislocation lorsque coexistent des hallucinations, un langage délirant et hermétique, des conduites incohérentes, une humeur dépressive ou euphorique, une désorganisation de la pensée, une perturbation des affects. »
Pour conjurer cette peur, pour vivre, elle sort de plus en plus et se rendra même jusqu'à St Brieuc.
Tout au long du roman, je suis restée suspendue à cette quête, quasi vaine pendant de longues périodes, des pièces manquantes de sa mémoire. Une angoisse sourde accompagne la lecture de ce récit dans lequel sont mises en parallèle, très souvent la femme et la Terre, le féminisme et l'écologie.
Le dérèglement climatique avec la fonte des calottes glaciaires et la disparition de certaines espèces animales étant une source d'angoisse, n'est-il pas plus ou moins compréhensible que certains aient envie de fuir cette terrible réalité à laquelle nous sommes déjà plus ou moins confrontés et de se réfugier dans une sorte d'amnésie permettant de se soustraire à ce stress permanent ?
Plus qu'un roman de fiction, La dislocation est une réflexion philosophique poussée où se côtoient à la fois la noirceur et la lumière, un roman qui amène à s'interroger et à réfléchir sérieusement sur l'avenir de la planète et notre mode de vie.
La dislocation est un livre qui mériterait, du moins en ce qui me concerne, une deuxième lecture pour en saisir toute la teneur et en profiter pleinement. En tout cas un livre qui ne laisse pas indifférent.
Je remercie Babelio et les éditions Harper Collins / Traversée pour cette belle découverte de la rentrée littéraire !
Chronique illustrée à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Ce roman m’a été proposé dans le cadre d’une opération Masse Critique Babelio : La dislocation, premier roman d’une agronome française Louise Browaeys figure parmi les livres de cette rentrée littéraire 2020. Une « fable écoféministe », une« tragédie contemporaine » nous annonce la quatrième de couverture, hypnotique, drolatique, et profondément humain ? Un peu tout cela la fois, certes, mais ce roman me laisse perplexe.
Le récit se fait à la première personne: une jeune femme amnésique quitte un hôpital où elle a séjourné durant de longs mois, à la suite d’un traumatisme. Nous ignorons, tout comme elle, son identité, ce qui lui est arrivé et la raison pour laquelle elle tente de reprendre une vie normale, en compagnie de K. un ami d’enfance. Cette héroïne se trouve donc dans un dénuement psychologique total et ne demande qu’à renaître. Le lecteur a l’impression de remonter la vie du personnage à contre-courant: elle retrouve peu à peu des bribes de mémoire, à commencer par des souvenirs d’enfance, petites choses précieuses et imparfaites.
Armée d’un dictionnaire et d’un carnet de note, notre héroïne, telle une extra-terrestre va découvrir notre mode de vie, nos travers et reprendre goût aux activités humaines, notamment sexuelles. Parmi les personnes qu’elle va être amenée à côtoyer : une infirmière, un couple échangiste, l’employé d’un magasin de bricolage… Tous apporteront leur pierre à l’édifice pour lui faire retrouver la mémoire. Nous comprendrons alors que sa trajectoire est réellement « cousue à celle de la planète« , mais je n’en dis pas plus…
Les métaphores sont inattendues, le choix du vocabulaire est particulier, il fait mouche ou pas. Le style est tantôt cru, lourd et déroutant, tantôt doux et feutré, avec parfois une constatation limpide, toute en émotion « nous étions dans le silence qui gît au fond de toute amitié« . Deux poids, deux mesures, j’ai été séduite par le sujet intrigant et par quelques jolies compositions surgies de nul part, comme des étincelles. Mais j’ai aussi été rebutée par de trop nombreuses longueurs. Et malheureusement je ne me suis pas sentie en adéquation avec ce personnage qui parle de tout et de rien, à qui il manque tout mais qui a tout à retrouver.
La fable écologique promise est pourtant là, le pari est tenu: le sujet et l’originalité de ce roman m’ont plu, mais la forme beaucoup moins. Je ne pense malheureusement pas être la personne la plus à même de l’apprécier: j’ai besoin d’un fil conducteur dans un récit et là je n’en ai pas trouvé, il y avait trop d’errance qui m’ont pesé. J’en suis désolée, mais n’hésitez pas à vous faire votre propre opinion, car les goûts et les couleurs… Je remercie en tous cas les Editions Harper Collins et Babelio pour cette proposition de lecture.
Retrouvez mes chroniques sur https://loeilnoir.wordpress.com/
Louise Browaeys, agronome, a écrit plusieurs livres en lien avec l’écologie. Elle signe ici son premier roman.
Une jeune femme vient de passer plusieurs mois en hôpital psychiatrique. Elle a perdu toute notion de son identité et n’a plus aucun souvenir.
Aidée, soutenue, voire maternée par K, qui se présente comme étant un voisin, elle va arpenter un chemin long et douloureux pour tenter de comprendre qui elle est, notant dans le petit carnet qui partout l’accompagne les mots entendus et qu’elle doit réapprendre.
» Lorsque je lui dis que j’avais perdu la mémoire, que j’étais vide, oui, vide comme un pot, aussi creuse qu’une huître de troisième catégorie échouée sur la plage un soir de tempête, il me regarda d’un air supérieur. Il attendit que je finisse ma phrase et me demanda, tu penses que nous sommes pleins, nous ? Tu penses que cela nous mène quelque part ? (…) Tu crois que nous jouons tous les soirs avec nos souvenirs dans le plus profond ravissement ? »
J’ai trouvé les premières pages de ce roman assez perturbantes. Comment peut on se retrouver tout d’un coup vide de tout souvenir, de tout sentiment, de toute envie de vivre ?
Au fil des pages, on découvre qu’il y a une cause bien réelle à cette situation, qu’un traumatisme a fini par faire tout exploser comme une grenade dégoupillée.
L’auteure fait également des liens avec l’écologie, les abus faits à la Terre et met en exergue les travers de l’être humain tout en faisant preuve d’humanité .
Sans que ce roman soit un coup de coeur, j’ai trouvé intéressant de le lire dans la période que nous vivons.
On suit l’histoire de l’héroïne, une jeune femme dont on connaîtra le nom bien plus tard, sur une courte période, à Paris pendant l’hiver 2016-2017, puis en Bretagne sur trois mois également pour revenir à Paris. Trois saisons en gros, …
Elle vient de sortir de l’hôpital psychiatrique, où elle a testé antidépresseurs, anxiolytiques, neuroleptiques, sismothérapie (cela fait moins grave qu’électro-choc et plus proche de la Terre) en ayant perdu complètement la mémoire, avec une haine pour les psys, lesquels pensent qu’il ne faut pas l’aider, elle doit retrouver toute seule .
Camille, qu’elle appelle souvent K. car elle ne sait pas qui il est, mais parfois par son prénom, essaie de l’aider comme il peut, tout en respectant la consigne. Il n’est pas non plus très bien dans sa peau ni sa tête, il essaie d’adapter un roman de Louis Guilloux « Le sang noir » en BD, mais l’inspiration n’est pas vraiment là. Est-il pas lui-aussi en quête de quelque chose ?
On va suivre l’héroïne dans sa quête d’identité, qui la conduit souvent à tutoyer la ligne, à se mettre en danger, flirter même avec le danger , car elle se lance dans des rencontres improbables, des expériences sexuelles compliquées, pour retrouver au moins une identité corporelle, à défaut de savoir qui elle est. Une résilience est-elle possible quand il reste à peine quelques flashes, des cauchemars , des mots qui résonnent étrangement parfois, vrai ou pseudo-souvenirs ?
« Le mot poison m’avait électrifiée. Comme s’il état le sens de ma vie, que je découvrais enfin. Comme s’il me permettait de soulever un grand voile. Le mot poison longea à toute allure ma colonne vertébrale. J’entendis alors comme en songe la voix d’un homme me dire : votre destin est d’empoisonner l’eau potable publique.. »
Elle est attachante quand elle s’accroche à son carnet pour noter des mots, leur sens, leurs synonymes, comme une trame à laquelle s’accrocher, s’ancrer un peu plus dans la réalité.
Ce roman fait voyager dans un univers particulier, sur fond de dérèglement climatique, très anxiogène, avec une jeune dont on apprend tardivement le nom, et dont le psychisme part en vrille. On comprend très vite qu’il s’est passé quelque chose de grave, car pas de famille, une violence permanente, avec des passages à l’acte (crever des pneus par exemple) et une soif de vengeance…
On se laisse prendre à ce récit, on a envie de savoir, de comprendre ce qui a pu se passer autrefois, démêler un peu en tout cas ? J’ai eu parfois l’impression, que Louise Browaeys nous questionnait sur l’identité, la nature de notre planète Terre, autant en danger que l’héroïne. Ce roman n’est pas à prendre au premier ni même au second degré, cela va beaucoup plus loin dans la réflexion…
Il me reste en refermant le livre, une sorte de malaise, et une interrogation : jusqu’où peut conduire la peur de dérèglement climatique, la montée des océans, la disparition de certaines espèces, l’obsession d’une nourriture saine, la crainte du nucléaire ou encore de l’intelligence artificielle ? Doit-on s’enfouir dans un blockhaus ?
J’aime beaucoup le terme « dislocation » qui pourrait très bien être rajouté au vocabulaire de la psychiatrie, car il est très évocateur et moins rébarbatif que d’autres nom de pathologies et l’auteure la définit ainsi…
On parle de dislocation lorsque coexistent des hallucinations, un langage délirant et hermétique, des conduites incohérentes, une humeur dépressive ou euphorique, une désorganisation de la pensée, une perturbation des affects…
… dans le cas de ces femmes, la dislocation psychique semble intervenir lorsqu’elles identifient entièrement leur vie et leur destin à ceux de la Terre.
Si l’avenir de la planète tourne à l’obsession, et à l’anxiété permanente, il vaut peut-être mieux s’abstenir, mais ce serait dommage, car l’écriture est belle… Je l’ai terminé depuis une semaine, déjà, mais je continue à réfléchir sur les messages de l’auteure.
Un grand merci à NetGalley et aux éditions Harper-Collins Traversée qui m’ont permis de découvrir en avant-première ce roman (le premier ) et son auteure qui a publié surtout des essais, écologie, permaculture…
#LaDislocation #NetGalleyFrance
https://leslivresdeve.wordpress.com/2020/08/21/la-dislocation-de-louise-browaeys/
«Dans le fond, ce que j’aimerais, c’est simplement repeupler une mémoire vierge. Ma mémoire est un muscle engourdi. Aussi indocile que les autres. Je voudrais la repeupler avec suffisamment de pragmatisme et de sens de l’harmonie comme s’il s’agissait d’un bâtiment vide».
La narratrice, après des mois d'hôpital, émerge à nouveau. Si sa mémoire et ses sensations sont encore défaillantes, elle peut s'appuyer sur les visites régulières de Camille, qu'elle appelle K, et qui serait un ami d'enfance. Ce graphiste, qui délaisse un peu son projet de BD pour s'occuper de la jeune femme, l'emmène avec son fils Aurélien faire des promenades dans le Parc Montsouris où la nature vit au ralenti en cet hiver 2016-2017. Peu à peu, elle réapprend à vivre, à parler, à avoir des sensations, même si elle pense qu'il est encore trop tôt pour des relations sexuelles. Elle aimerait aussi se rapprocher de cette nature qu'elle sent menacée. À l'aide de carnets qu’elle remplit consciencieusement, elle se réapproprie les mots, le langage. Avec les livres, elle essaie de se reconstruire une histoire.
Vient alors le moment de s'ouvrir aux autres. Elle choisit pour cela de passer par un site de rencontres qui lui permet de faire la connaissance de Béatrice et Jean-François, un couple échangiste avec lequel elle va se persuader que la mécanique fonctionne toujours. Évoquant son expérience avec Léonora, son infirmière devenue une amie, elle constatera qu'elle préfère Béatrice à Jean-François. Mais c'est alors qu'elle rencontre Wajdi dans un magasin de bricolage. Avec ce bel algérien, elle aura une brève liaison, avant que son amant ne décide de rentrer au pays.
Elle retrouve alors K qui comprend que le moment est venu de lui révéler le secret de ses origines et de leur histoire commune.
D'abord incrédule, elle va peu à peu comprendre que son travail d’exploration personnelle ne fait que commencer. Est-ce parce que K essaie d'adapter en BD son roman «Le soleil noir» qu'elle éprouve l'envie de partir sur les traces de Louis Guilloux? À Saint-Brieuc, elle veut surtout prendre du recul avant de constater que le voyage «amène à adopter un point de vue nouveau sur les sujets que l'on croyait avoir classés. La distance, ajoutée à l'isolement, fait travailler l'imagination.»
Louise Browaeys a construit son roman comme une quête intérieure, semant des indices au fil des chapitres. Tout comme sa narratrice, le lecteur va petit à petit prendre conscience que les «dérèglements» dont elle est victime sont ceux de notre planète et que son salut passera par une réappropriation de son environnement. Oui, c’est bien Gaïa, la terre-mère, qu’il faut sauver.
https://urlz.fr/dMWs
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