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En quelques lignes de son Itinéraire de Paris à Jérusalem, Chateaubriand décrit un curieux épisode où lui et ses compagnons « essuient le feu de la ligne » alors qu'ils sont en train de descendre le Nil en felouque. A-t-on cherché à tuer Chateaubriand, et pourquoi ? A partir de cette mention fugace, Dominique Baudis échafaude un extraordinaire roman d'aventures autour des soldats perdus de l'Expédition d'Egypte.
L'histoire, retracée de manière linéaire - même si ce n'est pas le mode d'exposition, extrêmement subtile, du livre - est simple. Elle épouse le destin de Déodat Dureau, né en 1779, fils d'un petit cordonnier de Toulouse, qui se découvre enfant trouvé et souffre-douleur de son « faux-frère » jusqu'à ce que le citoyen-colonel Dupuy, jeune héros de la Révolution française, le prenne sous sa protection. Devenu officier d'ordonnance de Dominique Dupuy, il le suit au port de Toulon sans connaître la destination de Bonaparte. Ce sera d'abord la prise de Malte en deux jours, où Déodat perdra son pucelage en faisant perdre le sien à une nonne, puis Alexandrie où ils arrivent le 1er juillet 1798 avec 3.500 hommes - Triomphe de Bonaparte aux Pyramides, prise du Caire - puis fuite à la sauvette en 1799. Déodat deviendra esclave revendu d'une ville à l'autre : Damas, Alep, Trebizonde, Bakou. Entre Mer Noire et Mer Caspienne, on le traîne à travers l'Arménie, la Géorgie, l'Ossétie, l'Ingouchie - jusqu'à ce que Mehemet Ali, qui vient de monter sur le trône d'Egypte, ne l'achète. Il le rebaptise « Abdallah de Toulouse » et le charge de trouver d'autres Français perdus pour les réunir sous son commandement. Ibrahim de Tarascon, Selim d'Avignon, Youssouf de Picardie, Gamal de Rodez, Anouar de Carcassonne, deviennent ainsi les « Français du Khédive ».
Cinq ans plus tard, lorsque Talleyrand recommande François-René de Chateaubriand, venu solliciter un entretien avec le Khédive à Monsieur Drovetti, Consul de France à Alexandrie, ce dernier confie à Abdallah le soin d'accueillir l'auguste visiteur. Les propos tenus publiquement par ce dernier sur la « tyrannie » du souverain Mehemet Ali et ce qu'il s'apprête surtout à écrire à son retour en France sur une indiscrétion commise par Abdallah (« je parlerai de vous et du tyran dans mon livre »), convainquent ce dernier de faire appel à son ennemi juré, « Roch le Borgne », pour éliminer Chateaubriand !
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