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A mi-chemin entre l'essai et le guide de voyage, "Comprendre les Coréens. Essai et récits interculturels" est le travail d'un
journaliste ayant vécu quarante ans en Corée, qui synthétise les facettes multiples de l'imaginaire collectif coréen pour mieux comprendre et communiquer avec les habitants de ce pays aussi profondément uni par la culture qu'il a été divisé par l'histoire.
Comprendre la Corée ? C'est s'attaquer à un puzzle aux pièces vagabondes. Sud. Nord. 38° Parallèle. Russie. PyongYang. Séoul. Zone démilitarisée très militarisée. Kim Il-sung. Park Chung-hee. Bouddhisme. Marxisme. Pentecôtisme. Catholicisme rebelle. Le pays a été amputé, unifié puis redécoupé par les invasions, les jeux de la Chine, du Japon, et des USA. Il faut savoir pourquoi la dynastie post-stalinienne des Kim de Corée du Nord revendique l'héritage magique de Tangun, l'ancêtre mythique du pays, pourquoi, au Sud, le confucianisme pénalise toujours les femmes. Au fait, comment oublier la persistance de l'empreinte nipponne qui pousse à la compétition, avec stress au programme dès la maternelle ? Comprendre les Coréens, c'est détailler les composantes vengeresses de leur mélancolie créative, de leur nationalisme voyageur. C'est appréhender un appétit vorace pour les religions. C'est observer un pays au narcissisme extravagant qui préfére les chamanes aux analystes pour accompagner sa prodigieuse fuite dans la modernité. Avec un maître mot : Ppali, ppali. Vite, vite !
Du royaume ermite de Joseon à la modernité trépidante d'aujourd'hui, la Corée a subi l'influence de la Chine, les tentatives de colonisations occidentales, l'annexion japonaise, une guerre civile, une partition, la dictature militaire, puis finalement une démocratie, récemment entachée par les exactions d'une présidente sous influence, mais synonyme de retour à ce calme, évoqué dans le surnom bucolique du pays. C'est par ce passé riche en influences et en blessures que Jean-Yves Ruaux nous donne à comprendre les Coréens. Si au Nord, on se revendique comme héritiers de Tangun, le fils du ciel fondateur de la Corée, au Sud, on jongle avec différentes pièces de ce puzzle qu'est devenu le pays : rigueur japonaise, catholicisme exacerbé par les missionnaires, fuite en avant insufflée par la dictature, chamanisme préféré à la psychanalyse pour soigner les âmes malades du ''han'', la mélancolie mêlée de rage propre aux Coréens ou contraintes par les diktats d'une société très codée, régie par les principes du confucianisme (piété filiale, respect de la hiérarchie, supériorité de l'homme sur la femme, effacement de l'individu au profit du collectif).
Construite sur des apports étrangers, la Corée les a assimilée pour créer sa propre identité. Les symboles en sont, entre autres, le hangeul, l'alphabet inventé par le roi Sejong, le kimchi, plat de chou fermenté que l'on retrouve sur toutes les tables et une fierté nationale qui pousse à toujours garder la face, garder ses sentiments pour soi, aller toujours plus vite, voir plus grand, surpasser le voisin japonais.
Un essai passionnant, bourré d'anecdotes, d'exemples, de récits de vie, de mythes, d'explications. Erudit mais facile d'accès, à lire pour appréhender la société coréenne, avant un voyage ou par simple désir de connaître ce pays trop souvent oublié au profit du Japon et qui ne se résume pas au conflit Nord-Sud.
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