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Wall Street est le symbole même de la finance des années 1980, du capitalisme triomphant, des empires bâtis sur des opérations de bourse de grande ampleur, par des personnages à la réputation sulfureuse (George Soros, Ted Turner, Michael Milken) qui se sont assurés, en un temps record, des fortunes personnelles immenses. Vingt ans plus tard, les mêmes se lancent dans de grands projets de fondations privées qui auraient pour seul objet de faire le bonheur de l'humanité. Ces financiers devenus philanthropes évoquent l'épopée des " barons voleurs", les Carnegie et Rockefeller qui, partis de peu, avaient fondé les plus grandes entreprises du capitalisme du début de XXe siècle aux États-Unis, en recourant eux aussi aux marchés financiers. Et qui, sur le tard, avaient également cru bon de léguer à la postérité de grandes fondations, des universités ou des hôpitaux. A partir de cette analogie historique, Nicolas Guilhot montre que ce mouvement du capitalisme vers la bienfaisance universelle exprime une dimension essentielle de la reproduction du capital qui, pour se perpétuer, doit trouver les formes de sa propre légitimation.
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