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Dans un texte intitulé Le roman, Giorgio Manganelli fait l'éloge des « nouveaux et acerbes Wisigoths », écrivains pour qui la littérature continue d'être, vaille que vaille, un joyeux mensonge, un jeu, une partie d'échecs « éternelle, fatale et inutile ». L'épître s'adresse à eux, mais à la vérité cet essai recueille les lettres que nous ont envoyées tant de Wisigoths de la littérature, depuis les auteurs d'élégies érotiques romaines jusqu'à l'ogre de Budapest Miklós Szentkuthy.
On se souvient du baron de Münchhausen chevauchant un boulet de canon. Son aventure évoque l'une des plus célèbres expériences de pensée d'Albert Einstein, quand il s'imaginait chevaucher un photon.
Sous l'égide des Wisigoths de Manganelli, nous voulons faire l'éloge de la littérature comme expérience de pensée : des hypothèses prises au sérieux, des démonstrations par l'absurde, des postulats suivis de leurs corollaires. Comme au cours des aventures d'Alice, comme dans les nouvelles de Sigismund Krzyzanowski, l'expérience de pensée engendre le récit, le récit à son tour vient nourrir une pensée.
Et comme le fait le comte de Monte Cristo dans la version d'Italo Calvino, nous énumérons les hypothèses pour multiplier les possibles, et donc multiplier nos chances.
Pierre Senges
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