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Le manuscrit restauré du compositeur reproduit en fac-similé, une documentation historique et la genèse de la création de la pièce inspirée de La divine comédie de Dante, présentée par Bernard Parmegiani en 1973 au Théâtre Récamier, Groupe de Recherches Musicales, Paris.
« Passer l'Achéron, c'est ressentir au fond de soi la progression d'une angoisse "qui se rapproche et s'éloigne chaque fois plus grosse, chaque fois plus lourde et plus gorgée" (Artaud) par le lent mouvement de recul de l'existence. Être en enfer, c'est être contraint de vivre la tête en bas - selon une vision naïve des antipodes - et penser que l'Enfer égale l'Envers. Le monde s'y trouve inversé, on s'y enfonce tel une toupie dont la pointe est attirée vers un centre profondément enfoui, là où vit "un ver infâme qui perfore le monde".
Dans notre chair il existe de ces points, pareils à des cratères brûlants où viennent éclater de "cuisantes pensées", de ces cauchemars que les fissures de l'inconscient laissent échapper. C'est à ce niveau d'émergence de la boucle infinie de nos maux, de nos plaies inguérissables, que j'ai choisi de situer l'Enfer. Itinéraire inéluctable où nous sommes acculés dans des voies à sens unique par des forces contradictoires : le châtiment étant la conséquence logique de nos erreurs, notre corps devient alors la plus étroite des prisons. C'est par une récession finale, presque matricielle, que s'achève le voyage, dans le geste instinctif du plongeur qui touchant le fond, le frappe pour faire surface. L'Enfer est aussi un monde sonore que le verbe demeure impuissant à exprimer complètement. Le son perce la peau comme un trait et nous aspire par cet orifice vers un dedans où l'on retrouve le vide laiteux qui appartient au rêve.
Comme il aurait été dérisoire de vouloir contracter l'oeuvre, j'ai dû abandonner l'énoncé numérique des cercles, et j'ai choisi sept moments intitulés contraintes afin d'en souligner ainsi le caractère de fatalité.
Enfin, craignant le pléonasme, j'ai extrait de Dante des bribes de texte que j'ai placées en rupture avec la musique afin qu'elles l'éclaboussent de leur éclat solitaire. J'ai pris le parti de ne pas traiter musicalement la voix du comédien Michel Hermon, la laissant à vif, dénudée d'un dramatisme que revêtent en échange, certaines séquences sonores. » Bernard Parmegiani
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