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On ne s'ennuyait pas au Politburo dans les années vingt et trente. Caricatures, dessins obscènes ou assassins, les chefs du Parti bolchevique gribouillaient sans cesse sur de petits papiers qu'ils se font passer, échappant aux discussions sur la formation des cadres dans l'Oural ou l'électrification de l'Ouzbékistan. Nous voyons dans ces hommes des médiocres, écrasés par le Chef, un Staline froid, réservé, effrayant. Or Staline n'a longtemps été que le premier parmi ses pairs, patron et ami intime d'un groupe d'hommes brillants et rudes, marxistes-léninistes fanatiques, endurcis par les conspirations et les prisons, les mains ensanglantées par la guerre civile et la collectivisation. Et ces grands seigneurs, régnant sur un royaume de misère et de meurtre, ne manquaient pas d'humour. Seules les purges de 1937-1938 ont fait émerger de ternes apparatchiks soumis à la tyrannie stalinienne. Les dessins inédits présentés ici ont été découverts dans les anciennes archives du Parti communiste, à Moscou. Ils sont dus à la plume de pontes comme Nicolas Boukharine, Valeri Mezhlauk (chef du Plan), Moris Belotski (patron du Kirghizistan), tous victimes des grandes purges de la fin des années trente. On y verra la paresse proverbiale de Roudzhoutak, souvent absent des réunions (une affichette à son image comporte la légende « Personne disparue. Récompense offerte »), la ferveur policière de Djerzinski, « Saint Jean-Baptiste du GPU », le tempérament explosif du Géorgien Ordjonikidzé (montré le couteau à la main, avec la légende « Saint Sergoshvili avant l'immolation de ses victimes »). Les blagues russes ne manquent pas : « Et si on exportait des oeufs ? Impossible, les Moscovites les auront tous gobés le dimanche de Pâques. ». Mais ce rire à l'écho des cachots de la Loubianka : en 1934, Kamenev, s'autodissèque en image ; en 1938, Boukharine, jadis no 2 du régime, devient Judas « Iscariotski ». Staline aimait ces dessins. L'un d'eux, de 1930, montre le commissaire du peuple aux Finances, alors sur la sellette, pendu par les parties. Le Chef y ajoute un petit mot : Pour tous ses péchés, passés et présents, pendez Brioukhanov par les couilles. Si les couilles tiennent, considérez-le comme acquitté. Si elles ne tiennent pas, noyez-le dans le fleuve. » Ces documents d'une valeur historique inestimable feront l'objet d'un lancement international en septembre en France, à la mi-octobre aux Etats-Unis et en novembre en Grande-Bretagne.
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