"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
En 1950, Arnold Wesker fait son service militaire dans la Royal Air Force, et observe avec une attention fascinée la manipulation du matériel humain pendant les semaines d'entraînement. C'est cette expérience personnelle qui fournit le cadre de Des frites, des frites, des frites... Mais pas plus que La Cuisine n'était un documentaire sur les restaurants, Des frites n'est une-tranche-de-la-vie militaire. Comme la cuisine d'un grand restaurant, une base militaire de la R. A. F. est pour Wesker un microcosme qui entretient avec le monde extérieur un rapport métaphorique. Si le théâtre est métaphore, il doit donner à voir. La force de Wesker dans Des frites... est d'avoir pensé sa démonstration en termes scéniques, d'avoir joué sur la géométrie des lieux, la précision stylisée des exercices de groupe, le jeu d'automates des chefs figés dans leurs fonctions... Par les juxtapositions, les répétitions, les substitutions, les raccourcis, le théâtre accentue l'aspect ballet mécanique qu'a l'entraînement militaire. La métaphore, on le voit, fonctionne dans les deux sens. Car l'armée, avec son souci de rendre vi ible, en un lieu utopique, le pouvoir, est déjà un théâtre.
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