" J'ai grandi dans le monde agricole, où la femme n'a pas la parole. Ma mère était soumise à mon père. Mon frère a reproduit ce modèle sur moi dès mon plus jeune âge. Coups violents, paroles acerbes, humiliations devant mes parents qui lui ont toujours donné raison. A douze ans, je passe de la première de la classe à la dernière sans que cela n'inquiète mon entourage. Je me réfugie dans la pratique du vélo et effectue jusqu'à trois-cents kilomètres par semaine. A l'âge de vingt ans, l'anorexie s'invite dans ma vie sans que je ne sache ce que c'est.
J'avais tellement peur de ne pas m'habituer à mon deuxième contrat de travail... En peu de temps, je suis passée de soixante à trente-quatre kilos pour un mètre soixante-sept. Personne pour m'emmener chez le médecin, j'ai fait les douze kilomètres en vélo. Le lendemain j'étais à l'hôpital. J'ai repris du poids et on m'a laissée sortir en me disant que je n'étais pas guérie. Pendant vingt ans j'ai enchainé les CDD et les missions d'intérim, ce qui n'a pas contribué à un bon équilibre.
Aujourd'hui, je fais quarante-deux kilos, le moral est bon mais ai désormais le statut d'invalidité. J'écris depuis que je ne fais plus de vélo. Dans l'ombre de l'anorexie est mon deuxième recueil sur ce thème.
L'anorexie n'est pas un régime mais une maladie psychologique dont 3% des souffrants décèdent. Elle n'est toujours pas reconnue et parfois prise comme un acte volontaire de la part des anorexiques. On a, cependant, rarement envie d'être malade... Ces poèmes en sont les témoins. " - Agnès Lorant
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