Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
"Ce roman est constitué de faits et d'imaginaire comme un corps de chair et d'os." - Régis Jauffret
De juillet 1888 à avril 1889, Klara Hitler porte dans son ventre celui qui est destiné à devenir l'incarnation du mal absolu. Pour la première fois, la mère du monstre prend la parole sous la plume magistrale de Régis Jauffret, et nous confie le récit de sa grossesse funeste.
Neuf mois de violence et de religiosité étouffante, desquels naîtra celui qui incarnera le nazisme et la Shoah. Neuf mois durant lesquels Klara est traversée, habitée, possédée déjà par l'innommable, partagée entre l'amour pour son enfant à venir et les visions qu'elle reçoit malgré elle des crimes que ce foetus, une fois devenu homme, commettra contre l'humanité tout entière.
Peu d'auteurs ont su explorer l'indicible avec le génie narratif dont fait preuve Régis Jauffret. Lui seul pouvait faire ce voyage dans les abysses, avec la conscienceque seule la littérature peut explorer profondément l'âme humaine.
Un roman sombre, violent et magnifique.
« C'est toujours la faute des mères ». Cette affirmation péremptoire qui ne supporte aucune contestation, on peut encore l'entendre ici ou là pour justifier le handicap (on peut penser à l'autisme, trouble dont on a longtemps imputé la responsabilité aux femmes) ou le comportement de leur progéniture.
En s'attachant à la figure de la génitrice de celui qui fut le plus grand génocidaire de tous les temps, à savoir Adolf Hitler, Régis Jauffret a composé un huis clos asphyxiant et extrêmement bien documenté sur la famille du chancelier du Troisième Reich.
Même si son nom n'est jamais prononcé...
« En juillet 1888, aux alentours de la Saint-Jacques, Oncle me fit grosse ». C'est par cette phrase laconique que commence le récit. Klara, qui subit sans cesse les assauts d'Alois, est bien la nièce de celui-ci. Adolf serait donc né d'un inceste et d'un viol, même si les mots ne sont jamais cités.
Vingt-trois ans séparent les deux parents qui se sont mariés en 1885 alors que Klara était enceinte de son premier enfant qui mourut en bas âge ainsi que le deuxième. Au total, le couple eut six enfants dont quatre succombèrent de la diphtérie. Seuls Adolf et Paula survécurent. Si le seul rescapé était décédé, la face du monde aurait été changée...
Confite dans la religion catholique, Klara se rend constamment à l'église pour recevoir la confession d'un prêtre qu'elle craint, de même qu'elle redoute les réactions de son mari.
Elle trouve une forme de réconfort dans l'écriture, un dérivatif qu'elle cache à son entourage parce que, selon elle, formatée par la morale punitive qui prévaut, c'est un péché. Dans le système patriarcal triomphant, la femme n'est qu'un ventre et la gardienne du foyer.
En utilisant le subterfuge de suivre la grossesse de la mère, l'auteur échappe à la quasi-impossibilité d'affronter directement la description de la Shoah.
En racontant le quotidien de Klara à la première personne et en faisant parler Alois Hitler dont les propos préfigurent les délires de son fils, Régis Jauffret a truffé son récit de flashes fulgurants sur l'extermination des Juifs.
Un exemple : « La joie des SS à peine sortis de l'adolescence de courser ces enfants nus échappés du bunker pour leur fracasser le crâne et ils éprouvent un plaisir redoublé à enfourner leurs corps sans vie et leurs parents les rejoindront quand ils auront fini de mourir asphyxiés et elle rhabilla le bébé qu'elle berça ensuite et qui se rendormit ».
C'est vertigineux et dérangeant et l'écriture, qui m'a fait penser à Elfriede Jellinek, est virtuose.
EXTRAITS
Pour nous châtier, Dieu nous inflige de nous reproduire à la manière des animaux.
Une femme grosse porte en son ventre le péché charnel.
http://papivore.net/litterature-francophone/critique-dans-le-ventre-de-klara-regis-jauffret-editions-recamier/
« Les femmes sont grosses de l’avenir du monde. » Un avenir parfois funeste, comme dans le cas de Klara Hitler, lorsque de juillet 1888 à avril 1889 elle porte dans son ventre celui qui s’avèrera la « bête immonde ». Comblant par la fiction les pointillés dessinés par une riche documentation historique, Régis Jauffret raconte cette gestation que, certes ignorante du mal qu’elle porte en germe, il nous présente traversée de sombres fulgurances extralucides, en une implacable superposition d’un présent mortifère, asphyxié par l’obscurantisme religieux et par l’autorité violente du mari, et de visions subreptices d’un futur innommable que lui et nous connaissons.
L’auteur que, depuis son livre Papa consacré à son père emmené par la Gestapo, l’on sait douloureusement marqué par cette époque, a rassemblé tout ce que l’on sait des parents d’Hitler avant de choisir de donner la parole à la mère. Il imagine qu’elle avait pour habitude de se confier à un tableau noir, sitôt couvert de ses mots fiévreux, sitôt effacé dans un réflexe craintif de silence et de soumission. Cette femme dont le récit ne donne jamais le nom, d’abord servante puis épouse, après dispense ecclésiastique, de son oncle, vit terrifiée sous la double emprise de cet homme mesquin, rigide et autoritaire, et d’un curé obscurantiste qui la renvoie à un coupable et inférieur statut féminin justifiant toutes les tyrannies.
Son récit plante le décor cauchemardesque d’une histoire familiale trouble, entre naissances illégitimes et origines incertaines, inceste et consanguinité, le tout confit dans les mentalités arriérées d’une petite ville d’Autriche-Hongrie tolérant toutes les turpitudes pourvu qu’elles portent le masque d’une bienséance bigote et fondamentaliste. Viennent s’y imprimer les terrifiantes confessions intimes d’une femme asservie par la peur et la maltraitance, convaincue jusqu’à la folie de sa coupable infériorité féminine et donc entièrement soumise à l’entreprise de châtiment et d’expiation qui la poursuit dans tous ses gestes et dans le moindre recoin de ses pensées. Tandis qu’elle s’efforce de se conformer au rôle que ses tortionnaires lui assignent – celui d’un ventre répugnant mais muettement soumis aux pulsions de son mari et aux besoins de la reproduction –, se glissent dans son esprit déjà halluciné les flashes de visions qu’elle a toutes les raisons de croire nées de sa diabolique mauvaiseté, mais qui parlent tout autrement au lecteur post-Shoah.
Certes un tantinet répétitif à la longue et imputant sans doute un peu trop le nazisme à la naissance d’un seul homme, ce texte, mûri par des années de préparation – l’auteur l’a remanié après une première édition italienne début 2023, sous le titre 1889 – et porté par la virtuosité d’une plume merveilleusement travaillée, a la puissance d’un grand livre, terriblement noir et douloureux, construit à partir d’obsessions personnelles profondes sur cette aberration : qu’un fœtus incarnant tous les espoirs d’avenir d’une mère se transforme en plus grand génocidaire de l’histoire.
Dément, démentiel, démoniaque... Quel adjectif sied le mieux à ce roman ? Je ne saurais le dire !!
Nous suivons la vie d'Hitler avant sa naissance: ses ancêtres, sa conception, la grossesse jusqu'à sa naissance. Il est question des doutes de Klara, la future maman, du rôle de l'entourage, de la culpabilité....
Habituellement on parle d'un heureux événement, ici la monstruosité et la souffrance transpirent dans toutes les lignes.
Klara me semble d'une sensibilité et d'une intelligence supérieure aux autres personnages mais elle est soumise aux hommes, à son entourage, à son époque, à sa religion. Accompagnée (si on peut dire) par le futur père nommé Oncle , un homme plus qu'abject. Viol à répétition, violence psychologique. Comment construire une famille et mettre un enfant équilibré dans un tel environnement?
Peu convaincue par la généalogie du début, je me suis laissée emporter par la plume de Régis Jauffret. Néanmoins certains débats théologiques m'ont paru un peu longuets.
Les allusions aux futurs actes de ce bébé sur l'humanité sont insérées de manière"originale ". Pas de double temporalité comme le veut l'expression à la mode mais des incursions, des prémonitions. Et c'est dans ces moments-là que j'ai trouvé l'auteur très fort.
Le construction est additive même s'il n'y a pas une once de clarté dans cette histoire. Tout est sombre, étouffant, violent à vous provoquer la nausée.
"On devrait envoyer une mère de ma sorte traverser l'avenir et à son retour elle se précipiterait par la fenêtre pour que le fruit éclate sur le macadam." (p.171)
Un roman à lire assurément !
Un enfant peut-il naître mauvais? Peut-il avoir été envoyé sur terre par le Diable pour commettre les pires abominations?
La mère d’Adolf Hitler, Klara, était très croyante, on dirait même bigote allant se confesser quotidiennement auprès de l’abbé Pabst un ecclésiastique dur et ancré dans cette dichotomie entre le Paradis et l’Enfer.
Nous sommes en 1888 dans un village autrichien. Klara vit avec sa sœur Johanna, toutes deux femmes de ménage au service de son oncle et de sa femme Franziska et de leurs deux enfants.
Après avoir vu perdu sa femme, Oncle épouse Klara. Klara appellera toujours son mari Oncle renforçant donc la notion d’inceste et de possible dégénérescence. Oncle est un homme dur, violent, pratiquement sans sentiments et dont les relations intimes avec Klara peuvent être qualifiées de viol car le plus souvent non consenties par elle. Il est aussi radin, la maison est peu chauffée ce qui entraîne la maladie et la mort des deux premiers enfants de Klara. Finalement elle tombera à nouveau enceinte et donnera donc naissance au plus grand criminel du vingtième siècle.
Régis Jauffret nous fait très bien ressentir l’atmosphère anxiogène, étouffante et malsaine de cette famille peu conventionnelle. La peur aussi régit la vie de Klara et elle se réfugie dans la croyance chrétienne même si elle craint sans cesse le châtiment pour ses supposés péchés. Le livre est traversé par moments de passages relatifs à la Shoah. Si cela évidemment sert à faire le lien avec ce qu’il adviendra, après plusieurs reprises, ce procédé semble quelque peu artificiel même si on apprécie le fait que l’auteur ait lu de nombreux ouvrages à ce sujet. Ceci dit ce récit est extrêmement bien construit car peu d’informations existent quant à l’existence de Klara, elle même ayant détruit son journal. Une existence rude et glaçante où l’on découvre à de brefs instants des soupçons d’amour et d’humanité dans une vie de survie.
https://nathavh49.blogspot.com/2024/04/dans-le-ventre-de-klara-regis-jauffret.html
le roman débute par: « En juillet 1888, aux alentours de la Saint Jacques, Oncle me fit grosse. »
Peu d´archives existent sur l’enfance d’ Adolf Hitler. Régis Jauffret utilise la fiction pour raconter les 9 mois de grossesse de Klara, sa mère.
Comme de nombreuses personnes, j’ai toujours été intriguée par la nature des parents de personnes qui se révèlent être des monstres. Régis Jauffret répond à cette question dans ce texte très fort, violent, difficile à lire, mais édifiant.
J’ai lu l’an dernier « L’ange de Munich » de Fabio Massimi et j’y ai trouvé des correspondances , des éclairages.
Deux livres passionnants sur notre Histoire.
Klara est la domestique de son oncle. Agent des douanes, il l’épousera après la mort de sa première femme, avec une dispense de l’église catholique, puisqu’elle est sa nièce.
Le texte est à la première personne, écrit par Klara. Issue d’un milieu très modeste, sans instruction, elle raconte un mariage où la femme est soumise aux besoins du mari dans des relations qui relèvent du viol. Cantonnée aux tâches domestiques, elle n’a aucune liberté.
L’auteur ajoute le poids de la religion par le biais d’un curé pervers, obscurantiste qui fait de Klara une dévote insupportable, obsédée par le péché, à la limite de la folie. Elle se confesse quasiment tous les jours et parfois deux fois dans la même journée.
La sœur de Klara, un peu simplette qui vit avec eux, épie sa sœur sur ordre du curé et lui rapporte quotidiennement les péchés de Klara réels ou inventés.
Quant au mari, le personnage est odieux. Il méprise les femmes, rêve d’un empire autrichien puissant et d’une société où seuls subsistent les plus forts.
Régis Jauffret sème les éléments qui fabriqueront le monstre, même s’il ne sera pas le seul.
Le texte m’a surtout frappé par l’entremêlement de scènes de la Shoah aux pensées de Klara, rendant la lecture malaisée. Le nom de Hitler n’étant jamais écrit dans le texte, ces visions ressemblent à des prémonitions alors que ce bébé n’est pas encore né, innocent de tout péché.
Klara a déjà perdu deux enfants du Croup. Ce bébé, elle l’aime, craint pour sa vie, rêve d’en faire un saint ou un soldat et espère qu’il lui sera reconnaissant de lui avoir donné la vie.
Le roman se termine à sa naissance. L’ Histoire reste à venir.
« Les mères demeureront toujours comptables des péchés commis plus tard par l'enfant qu'elles ont porté. On nous accusera d'avoir concocté neuf mois durant un assassin, un monstre »
Ce livre est original et percutant! Aborder la grossesse de la mère d'Hitler à partir de rares documents historiques et une grande part de fiction est osé et réussi!
Dans ce roman Régis Jauffret remonte à l’origine du mal, sa genèse, sa gestation : la grossesse de Klara, qui aboutit à ce jour funeste de 1889, le jour de la naissance d’Adolf Hitler.
Klara arrive dans la maison de son oncle comme domestique, à Braunau am Inn en Haute-Autriche. Elle devient ensuite sa femme et perd ses deux premiers enfants de maladies infantiles. Voilà pour la réalité historique. Hitler est né d’un inceste, d’un père violent et dominateur.
Nous vivons avec Klara les neuf mois de sa grossesse, faite de privations et d’asservissement, avec une religion fanatique exacerbée. Elle imagine son futur enfant, l’idéalise, mais chacune de ses pensées devient pour elle un péché et elle y laisse sa santé mentale.
Je découvre Régis Jauffret avec ce roman, sa plume poignante qui sait décrire l’intime avec une tension saisissante. L’histoire est entrecoupée par des élans visionnaires terrifiants, décrivant les horreurs qu’engendrera cet enfant à naître, comme une prémonition funeste.
Klara a mis au monde ce que l’histoire a fait de plus sombre. Mais les mères sont-elles responsables des abominations de leurs enfants ?
« les humains accouchent de demain et ils jettent un regard vitreux à la catastrophe dont ils viennent de mettre un fragment au monde et ils espèrent n'être plus quand elle surviendra et le présent ne peut plus rien et le passé ne savait pas »
Régis Jauffret est un écrivain hors norme. Chacun de ses nouveaux textes, nous entraine dans des contrées littéraires incongrues. Femme séquestrée, assassinat sadomaso, projet de cannibalisme, cet auteur est obnubilé par la folie et la cruauté de l’Homme. Il nous en fait profiter. Cette fois encore, il frappe fort en nous conviant dans la tête de Klara, qui n’est autre que la future mère d’Adolf Hitler.
Cette histoire qui se présente comme les origines d’un tyran, n’est en fait qu’un œil porté sur la condition des femmes dans ces milieux et à cette époque. Klara possède un entourage désastreux. Elle est abusée par un oncle qui la maltraite. Elle se fait sermonner par un curé qui la diabolise. Elle est surveillée par une sœur simplette et incontrôlable. Dans ce contexte familial, elle n’a d’autres choix que d’abdiquer. Les règles en place dans tous les foyers sont tellement ancrées dans l’inconscient collectif, qu’à aucun moment, la jeune femme pense à les contourner. Elle accepte son sort, en se flagellant d’en être responsable.
Enfermé dans cet esprit limité et crédule, le lecteur subit les souffrances à ses côtés. Son quotidien oscille entre violence physique et violence psychologique. La plume pourtant exigeante de l’auteur retranscrit parfaitement la naïveté de cette femme, réduite à son rôle de reproductrice. Parsemée de phrases d’une longueur insolente, elle accompagne ses réflexions tourmentées.
Ce roman est douloureux à lire avec nos yeux d’aujourd’hui. Cette plongée dans une société patriarcale et religieuse sans restriction, nous prend souvent aux tripes. Toutes les scènes du roman, imprégnées d’une certaine tradition, confirment l’injustice de la situation de Klara. Pour ma part, j’ai plusieurs fois serré les poings devant mon impuissance à intervenir.
Même si elle s’avère moins sulfureuse qu’annoncée, c’est encore une nouvelle expérience de lecture inédite et déstabilisante que nous propose Régis Jauffret !
https://leslivresdek79.wordpress.com/2024/03/13/920-regis-jauffret-dans-le-ventre-de-klara/
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