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Un réparateur de chaudières dans une petite ville du New Hampshire abandonne son quotidien misérable et part pour la Floride avec sa famille, attiré par un nouvel avatar du rêve américain. À plusieurs milliers de kilomètres de là, une jeune Haïtienne fuit la violence et la pauvreté de son pays natal pour rejoindre l'Amérique... de ses rêves. Les deux destins finiront par se croiser dans cet ample roman sur l'errance et l'injustice.
Un soir d'hiver, Robert Dubois, trentenaire, réparateur de chaudières dans le New Hampshire, perd le contrôle d'une vie bien orchestrée.
Auprès de sa femme, il en dresse un bilan amer : un boulot harassant pour un salaire minimum, une petite maison, des meubles d'occasion, une voiture en fin de vie, deux fillettes qu'il ne peut gâter, le tout dans un climat froid et brumeux. A côté de son frère ainé, Eddy, entrepreneur en Floride, il se sent minable et trop frileux. Sa femme Elaine, lui propose, par amour, de tout vendre et de rejoindre ce dernier pour y construire une nouvelle vie au soleil.
Parallèlement, sur l'île d'Haïti, Vanise et sa famille sont confrontés à un énième ouragan. Regroupés dans une cabane qui menace de s'envoler à tout moment, les uns et les autres, affamés depuis plusieurs jours,
dégustent un jambon, volé puis ramené par Claude, neveu de Vanise après la tempête. Face au courroux des Dieux, aussi menaçants que la police corrompue de l'île, Vanise, Charles et Claude décident de fuir en Floride.
Le destin de ces protagonistes, qui perçoivent dans la Floride, et L'Amérique plus largement, un Eldorado et placent en elle tous leurs espoirs respectifs, se croise dans des conditions terribles pour se lier au final dans le drame.
Après "Lointain souvenir de la peau" et "un membre permanent de la famille", j'ai continué la découverte de l'oeuvre de Russell Banks par ce roman dense et noir que je pensais être le dernier publié. En fait, "Continents à la dérive" a été publié en 1985, en 1987 en France, sous le titre "Terminus Floride" et a été réédité par Actes Sud en 2016. Il s'inscrit, par cette deuxième édition, dans une actualité brûlante. En effet, ce roman, c'est une histoire de migrations. Comment ne pas penser à l'immigration mexicaine qui soulève bien des débats aux Etats-Unis, et, à ce que la presse a nommé, au plus près de nous, en Europe, "la crise des migrants"?
Tout comme les plaques terrestres, les populations et les cultures se frottent et s'entrechoquent, pour le meilleur et pour le pire et cela semble inévitable. A travers deux personnalités et deux vies diamétralement opposées, Banks laisse entrevoir une motivation commune à la migration, celle du vivre mieux, celle d'espérer un meilleur pour soi et sa famille. Une quête des plus humaines, quel que soit l'endroit où on vit, quelle que soit l'origine sociale.
La motivation de Bob Dubois, qui est de fuir un endroit froid pour un endroit ensoleillé où la vie semble plus facile et plus reconnaissante, est-elle plus acceptable, plus compréhensible de celle de Vanise qui quitte son île au climat tourmenté pour un état au climat plus stable où tout semble être possible ? Les deux personnages sont malheureux de leur sort et appréhendent leur migration respective comme une délivrance. Si leur motivation est parfaitement légitime et rationnelle, leurs choix, pour parvenir à ce qu'ils aspirent, semblent être brimés par leur éducation
et leurs croyances. Même s'ils se fixent des objectifs et des buts précis, ils sont entravés par ces dernières. Voilà surtout l'objet de leur chute.
Sans nous ménager, Banks nous raconte l'immigration haïtienne, un mouvement qui s'est amplifié dans les années 60 avec le régime de François Duvalier et qui a connu une croissance exponentielle avec les politiques de son fils jusque dans le milieu des années 80. Avec ces choix politiques et économiques, la paysannerie haïtienne, représentant la part la plus importante de la population, est laissée à l'abandon, le plus souvent expropriée, se voit privée d'éducation, et est surtaxée sur les biens de consommation courants. L'immense pauvreté qui en résulte, dans laquelle nous plonge Banks, justifie les grandes migrations vers La Floride et les Bahamas.
Du glauque des traversées vécu par les "boat people" à celui du quotidien de milliers d'américains, privés d'emplois, de couverture sociale, de lieux d'habitations décents, ce roman de Russell Banks nous entraîne
dans des aventures humaines effroyables, universelles et terriblement contemporaines.
J'ai beaucoup aimé.
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