Présenté dans une édition au format classique à moins de 30, ce roman graphique exceptionnel bénéficie d'une édition limitée, au tirage unique, en grand format (tout comme Ar-Men) pour les amateurs du travail graphique en couleur directe!Cette édition est complétée par un cahier graphique inédit de 8 pages.
Graphiquement, rien à redire ! Je retrouve avec plaisir la touche d'Emmanuel Lepage que j'appréciais déjà dans un autre de ses ouvrages Ar-Men : L'Enfer des Enfers (dans un genre tout à fait différent, il est vrai… un coup de cœur !).
Seulement voilà, ça ne marche pas à tous les coups, ce roman graphique extrêmement dense (plus de 300 pages tout de même) m'a semblé aussi pesant qu'il était lourd. Je me suis ennuyée si bien que j'ai eu du mal à aller jusqu'au bout de ma lecture.
Peut-être que la manière de traiter son sujet était trop personnelle pour moi ? On file ainsi d'un témoignage à l'autre auprès de ses proches.
Le thème de la communauté me plaisait (d'autant que c'est précisément ce qui a pu construire la personnalité et nourrir l'imaginaire de l'auteur) mais le côté religieux m'a semblé encore appesantir tout ça… je comprends que ça fasse partie du témoignage, mais moi ça m'a perdue.
J'ai eu du mal à reprendre le fil entre deux lectures, à vrai dire c'était même confus.
Bon, ce n'est que partie remise, j'irai certainement piocher un autre livre d'Emmanuel Lepage pour une prochaine lecture !
Emmanuel Lepage (EL) est un dessinateur de grand talent, aux traits subtils avec une finesse dans les choix de colorisations. C'est un vrai plaisir d'effeuiller ces pages qui comportent autant de représentations si réussies.
Au delà de la qualité des dessins , "Cache-Cache bâton" est un jeu d'enfant que le jeune Emmanuel pratiquait avec ses copain(e)s d'alors. Et le choix du titre n'est pas innocent car, c'est bien ce qui a contribué à sa construction d'homme avec une vie collective qui est marquante. Mais c'est aussi ce qui est finalement resté (cette vie libre et collective des enfants) après le relatif échec de cette tentative de ses parents et de plusieurs autres couples de construire et faire vivre une communauté dans la durée.
C'est d'abord cette dimension du vivre ensemble que fait ressortir l'enquête d'EL qui montre, comme pourrait le faire un sociologue ou un historien, les racines idéologiques (et pratiques) de ces couples (alors sans enfants): importance de la foi chrétienne, avec un ancrage plutôt à gauche (les "Catho de gauche"), où on retrouve le scoutisme (et ses univers avec les livres de la collection "signe de piste" et des dessins de Joubert), l'univers catho de Vatican II avec "La vie Nouvelle", la communauté et la renaissance de l'abbaye de Boquen avec Bernard Besset qui, à 28 ans, est devenu un prieur dans son temps (au point d'être destitué par l'Eglise pour avoir eu des positions trop modernistes - notamment sur le mariage des prêtres), etc. Cette première partie (150 pages sur 300) est une restitution particulièrement aigüe de cette période et de certains courants qui ont pu traverser la société française d'alors ; avec cette recherche d'une communauté de partage en rupture avec le consumérisme de l'époque.
Mais c'est aussi l'illustration des tâtonnements, des réalisations et pour finir de l'échec d'un projet qui a finalement eu du mal à être défini, et totalement partagé, se traduisant par le passage d'un projet "d'habitat collectif" ... en lotissement avec un règlement de co-propriétaires ; mais avec néanmoins des pratiques d'échanges et de partages.
EL nous donne aussi à comprendre comment il est devenu dessinateur (malgré de lourds handicaps visuels) avec la découverte de Tintin, puis les ouvertures vers les univers de la revue Spirou, et puis les autres (notamment Moebius, ...). Il montre aussi comment (et il en fut un acteur) la vie collective des enfants qui n'étaient pas présent à l'origine du projet des parents, est finalement une réussite de liberté (au risque d'un certain isolement).
On peut lire cette somme (300 pages avec un fort contenu au delà de la qualité graphique) parce qu'elle nous replonge dans le bain de notre propre histoire (familiale), et / ou parce qu'elle donne à mieux comprendre une période tout en montrant des permanences d'aspirations qui prennent aujourd'hui d'autres formes (cf. les ZAD, etc...).
C'est un livre fort, exigeant, mais combinant densité, légèreté et permanence.
C'est un autre voyage que nous propose Emmanuel album avec ce nouvel album. Un voyage dans le passé, dans son enfance, dans la vie de ses parents, de ses grands-parents. Un voyage pour comprendre, pour se comprendre.
Une enfance pas tout à fait comme les autres. Ses parents ont expérimenté la vie en communauté, en partage. Le petit Lepage a grandi là-bas, au Gille-Pesset, avec d'autres familles, d'autres enfants comme autant de camarades de jeux.
Emmanuel Lepage veut reconstituer le puzzle. Il interview les différentes familles, ses parents bien sûr, un peu effrayés par ce projet, il fait appel à ses souvenirs aussi pour saisir les traces que cette vie différente a laissées en lui.
"J'ai enfoui dans le corps des odeurs, des lumières... Et c'est en dessin que j'essaie de les faire émerger." Le dessin alterne le noir et blanc pour l'enquête et les couleurs intenses pour l'enfance d'Emmanuel Lepage. L'émotion est souvent palpable, le lecteur partage l'intimité d'un artiste tout en lisant un récit documentaire sur la France des années 70.
Un livre en forme d'enquête dans l'intime, un livre qui relève le pari de tendre vers l'universel pour toucher le lecteur, quel qu'il soit. Un livre qui m'a renvoyé à ma propre enfance, à ce qui a fait de moi ce que je suis, à ce qui m'a construit.
1966, plusieurs familles ont envie de bousculer les lignes, envie d'essayer de vivre autrement, envie de vivre en communauté... Emmanuel Lepage, alors enfant, a vécu pendant quatre ans cette expérience. Mais comment raconter cette histoire ? Méthodiquement, il reprend contact avec chaque famille, écoute, échange, essaie de comprendre comment ils ont franchi le pas... Qu'est-ce qui les rassemble ? Comment ont-ils vécu ? Pourquoi ses parents sont partis ? Cette histoire est son histoire, ses racines... il est de là...
Emmanuel Lepage est un immense artiste. Ceux qui me connaissent savent qu'il est pour moi un auteur incontournable de la bande dessinée et bien plus encore. Mais pourquoi ? Tout d'abord, ses dessins sont merveilleux, de vrais tableaux. On en prend plein les yeux à chaque fois, ils sont quasi-organiques. Ensuite, ses histoires, ses voyages, il nous montre la beauté, la force et la fragilité du monde et de la nature... Les Hommes, la communauté (tiens une coïncidence ?) sont au centre de ses récits... Il y a également une grande humanité dans chacun de ses livres. Il n'hésite pas casser les codes, comme par exemple dans "Muchacho" (un de mes préférés de l'auteur). Mais qu'en est-il de "Cache-cache bâton" ? Dans ce livre, il se livre. Oui il parle de lui en abordant son enfance, ses racines, ses parents, d'où il vient... C'est son histoire. Et d'un seul coup, tout devient plus clair pour ceux qui le suivent. On a le sentiment de comprendre d'où lui viennent tous ses récits...
Intime, personnel, comme l'arbre dont il parsème son récit, il puise dans ses racines sa force, ses convictions, ce qu'il est, d'où il vient. Est-ce que l'on peut "résumer" le travail de l'homme à ses années de vie en "communauté" et à ce livre ? Non bien entendu, il a pris son envol depuis pour être ce qu'il est. Mais sans aucun doute, il n'a jamais perdu ses racines.
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