Selon les mots de l'auteur lui-même, "Au nom du père, du fils et du rock n' roll" raconte l'histoire d'un rendez-vous manqué entre un fils et un père. Une histoire de filiation, l'autre version de (son) précédent roman. "Dieu surfe au Pays basque" interrogeait en effet sur la paternité du point...
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Selon les mots de l'auteur lui-même, "Au nom du père, du fils et du rock n' roll" raconte l'histoire d'un rendez-vous manqué entre un fils et un père. Une histoire de filiation, l'autre version de (son) précédent roman. "Dieu surfe au Pays basque" interrogeait en effet sur la paternité du point de vue du futur père, alors qu'ici le texte interroge en filigrane ce que c'est que d'être un fils".
Des pères, des fils, du surf, des amis, de l'amour et du rock n' roll, en voici les principaux ingrédients. Comme toujours avec Harold Cobert, l'histoire et l'écriture happent le lecteur d'emblée pour ne le laisser, comme sonné par une vague impétueuse, qu'à la toute dernière ligne.
Le roman commence presque par la fin, sur une scène d'affrontement entre un père et son fils, un jour d'anniversaire. Victor, 17 ans, surfeur insubmersible et rebelle, insulte Christian, son père qui, impuissant face à l'agressivité de son ado, préfère attendre que la déferlante de reproches nourris de longues années de ressentiments passe, en espérant en silence des temps plus calmes.
Petit retour en arrière dans les sixties, plongée dans le milieu du rock underground. Où l'on retrouve Christian, le père, qui a grandi en banlieue parisienne, avec une mère aimante et soumise et un père violent qui très vite abandonne le foyer familial pour une nouvelle femme - une nouvelle vie. Le petit Christian comprend très vite qu'il lui faut se débrouiller seul et aider sa mère pour subvenir aux besoins de la famille. Dès l'âge de huit ans, il trouve des "combines" puis de petits boulots pour gagner quelques sous. Elève brillant, il obtient une bourse, et rentre en prépa au Lycée Henri IV, où les "petits parisiens de bonne famille " le regardent de haut. Il s'en moque, prenant cela comme un défi et se classe parmi les premiers, ceux qui ont comme avenir d'intégrer une Grande Ecole. Mais Christian rencontre Gérard, Alain, François et Dudu, quatre joyeux bordelais, qui partagent sa passion pour le rock n' roll. Une passion qui prend vite le pas sur la "voie royale" promise par des études studieuses... Le brillant élève devient un brillant DJ, "Monsieur Best", une personnalité reconnue, et vite incontournable, de la vie nocturne parisienne.
Et puis Christian rencontre Lorraine. C'est le temps de l'amour... Et très vite de la naissance de Victor. Qui est un bébé véhément. Puis un petit garçon turbulent. Et qui, marqué par la séparation de ses parents, devient un ado provocateur, orgueilleux, égoïste, capricieux, un surfeur d'exception et un séducteur impitoyable.
Après le sensible et émouvant "Dieu surfe au Pays basque" qui exprimait les sentiments et sensations intimes d'un père confronté à la perte d'un enfant en devenir, ce nouvel opus poursuit l'exploration des relations père-fils d'une plume encrée de tendresse et d'impertinence.
Le thème des rapports filiaux n'est pas particulièrement original tant les exemples sont nombreux en littérature, mais la perspective choisie par l'auteur est suffisamment singulière pour insuffler fraîcheur et nouveauté à ce sujet souvent abordé. Une fois évacuée le stéréotype littéraire du père violent, égoïste, déserteur, salaud avec Marcel, le géniteur de Christian, c'est une toute autre image paternelle qui s'impose.
Les jeux de miroir du roman donne rapidement à comprendre au lecteur que Christian, DJ renommé à la jeunesse tumultueuse et passionné de rock, a sacrifié ses rêves de noctambule pour assurer à Victor une vie stable, des repères solides, de l'amour. Mais le fils, turbulent à l'origine, devient ingrat, odieux et révolté après la séparation de ses parents et met perpétuellement, violemment parfois, à mal la difficile relation que Christian veut préserver avec lui. Leur séjour commun au Québec laisse pourtant entrevoir la possibilité de voir cette relation douloureuse, tourmentée, s'apaiser et devenir plus sereine...
C'est sur une bande originale rock n' roll qu'Harold Cobert décrypte et analyse les relations difficiles entre père et fils, et signe un roman plein de justesse et de nostalgie. Le style se fait sensible, pour saisir toutes les nuances et subtilités des liens entre père et fils, et implacable dans sa structure, comme la déferlante qui défie les surfers les plus aguerris, alliant densité et intensité.
On aime dans ce nouvel opus tout ce qui fait le talent et le charme d'Harold Cobert. La structure, chronologique sans l'être vraiment. L'originalité de traitement d'un thème à la fois universel et souvent abordé. Les portraits sans concession mais sans caricature des personnages, "simplement" présentés dans leur vérité. La coexistence des registres de langage, toujours introduits à bon escient, pour donner au récit son rythme et son caractère. Les dialogues ciselés, impeccables, si ajustés aux personnages, aux situations, aux époques. Le style enlevé, subtil, à la fois littéraire et so rock.
Mention spéciale pour la BOL (Bande Originale du Livre), super concept et excellente playlist comprenant, Face A, les musiques qui ont accompagnées l'écriture du roman, et Face B, les 22 meilleurs morceaux de l'histoire du rock n' roll selon Monsieur Cobert père, expert en la matière selon son écrivain de fils...