Chaque mois, nous partons à la rencontre d'un lecteur qui découvre et chronique un roman. Joëlle a un coup de coeur pour "Le jour d'avant" de Sorj Chalandon #RL2017
Dans ce "Paroles de libraire" spécial rentrée littéraire, Laurence Noret, de la librairie La Belle Lurette, à Paris, nous présente ses trois coups de coeur de la rentrée littéraire 2015 : Ecoutez Laurence vous parler avec enthousiasme de ces...
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Chaque mois, nous partons à la rencontre d'un lecteur qui découvre et chronique un roman. Joëlle a un coup de coeur pour "Le jour d'avant" de Sorj Chalandon #RL2017
Depuis "Profession du père" il séduit ses lecteurs, mais quelles sont les lectures de Sorj Chalandon ?
Quels sont les livres qui ont marqué Sorj Chalandon ? Voici ses conseils de lecture...
Quand nos lecteurs participent aux salons littéraires Retrouvez leur reportage : Lire en Poche à Gradignan, la fête du livre au Château du Clos de Vougeot, La Fête du livre de Merlieux, Lisle Noir, les vendanges du Polar,
Sorj Chalandon est écrivain et journaliste (Libé, Le Canard Enchaîné).
Avec l'enragé il s'empare d'une histoire vraie : la révolte de 1934 des enfants incarcérés dans une "maison de correction" (bel euphémisme) de Belle-Île-en-Mer (ah, le charme des îles ...), un ancien bagne de communards. Tout un programme.
Ces événements auront d'ailleurs inspiré à Jacques Prévert (qui résidait cet été sur l'île) son poème : Chasse à l'enfant, une poésie de Prévert qu'on n'apprend pas à l'école !
[...] Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan !
C'est la meute des honnêtes gens
Qui fait la chasse à l'enfant.
On aime très beaucoup :
❤️ On aime la rage qui anime le héros du livre et qui jaillit de la prose magistrale de l'auteur : on sent bien que tous deux partagent une enfance maltraitée, le mot est faible. de toute évidence, il fallait un Sorj Chalandon pour raconter l'histoire de l'enragé, [celle d'un enfant battu qui me ressemble] dira l'auteur, et rarement un livre aura aussi bien mérité son titre. Un livre dur et sans pathos.
L'exergue est une dédicace de Jules Vallès (pour son roman L'Enfant) :
[... ] À tous ceux qui crevèrent d'ennui au collège ou qu'on fit pleurer dans la famille, qui, pendant leur enfance, furent tyrannisés par leurs maîtres ou rossés par leurs parents.
❤️ On aime ce formidable sujet historique que le journaliste réussit à rendre vivant et captivant dans cette France provinciale où s'affrontent communistes au grand coeur et petits fascistes qui déjà attisent la haine.
❤️ On aime les deux temps du roman : la peinture réaliste des conditions effrayantes de détention dans le bagne de Belle-Île, véritable usine à fabriquer des enragés, et celle de la vie des marins pêcheurs qui recueilleront l'évadé en quête d'une difficile rédemption, deux moments différents durant lesquels Sorj Chalandon trouve et garde le ton juste.
le contexte :
Le mieux est sans aucun doute de laisser la parole à l'auteur lui-même :
[...] En 1977, alors que je travaillais à Libération, j'ai lu que le Centre d'éducation surveillée de Belle-Île-en-Mer allait être fermé. Ce mot désignait en fait une colonie pénitentiaire pour mineurs. Entre ses hauts murs, où avaient d'abord été détenus des Communards, ont été « rééduqués » à partir de 1880 les petits voyous des villes, les brigands des campagnes mais aussi des cancres turbulents, des gamins abandonnés et des orphelins. Les plus jeunes avaient 12 ans. le soir du 27 août 1934, cinquante-six gamins se sont révoltés et ont fait le mur. Tandis que les fuyards étaient cernés par la mer, les gendarmes offraient une pièce de vingt francs pour chaque enfant capturé. Alors, les braves gens se sont mis en chasse et ont traqué les fugitifs dans les villages, sur les plages, dans les grottes. Tous ont été capturés. Tous ? Non : aux premières lueurs de l'aube, un évadé manquait à l'appel. Je me suis glissé dans sa peau et c'est son histoire que je raconte. Celle d'un enfant battu qui me ressemble. La métamorphose d'un fauve né sans amour, d'un enragé, obligé de desserrer les poings pour saisir les mains tendues.
L'intrigue :
Pour mettre en scène cette histoire et la mutinerie de 1934, Sorj Chalandon imagine le destin d'un jeune orphelin qui se serait évadé avec la cinquantaine de fuyards mais qui, lui, aurait pu échapper à la "chasse".
Le personnage s'appelle Jules Bonneau (comme le célèbre Bonnot de la même époque mais [ça ne s'écrit pas pareil]) également dit "La Teigne".
La première partie du bouquin nous fait partager les vies de ces gamins, le plus souvent orphelins ou rejetés par leurs familles, livrés à eux-mêmes et fatalement incarcérés un jour ou l'autre. On découvre également les conditions effrayantes de leur détention à Belle-Île.
Maltraitance, sévices, punitions, coups, faim et soif, c'est une véritable fabrique à créer et former des enragés.
Viendra alors le temps de la mutinerie lorsqu'éclatera cette rage longtemps entretenue, longtemps contenue.
Une poignée d'entre eux tentera l'évasion, sur cette île dont on ne s'échappe pas (ils seront tous rattrapés évidemment, sauf "La Teigne", le personnage du roman).
Après avoir été recueilli par des marins pêcheurs de l'île, Jules Bonneau cherche à "oublier" La Teigne, et Sorj Chalandon nous offre alors une seconde histoire dans une France provinciale qui va basculer bientôt dans l'horreur d'une nouvelle guerre, une France où s'affrontent déjà les petits fascistes qui attisent la haine et les communistes au grand coeur.
Années 1960, guerre d'Algérie, du Vietnam. On parle souvent des combattants mais pas des dégâts collatéraux. C'est un bel hommage rendu à toutes ces familles qui ont subi le retour de leur héros complètement détruit psychologiquement.
Très bel hommage à un peuple, à une région, à une profession qui se s'est sacrifiée pour creuser, sortir le charbon tant nécessaire à la France.. À travers cette famille Flavent, on vit leur quotidien avec leur souffrance. Se produit la catastrophe du 27 décembre 1974 où périssent 42 mineurs à Lievin. Tout un peuple, toute une région, toute une profession en deuil.
Depuis ma lecture d’«Enfant de salaud» , « Le quatrième mur » me faisait de l’œil , me demandant de le sortir de ma PAL.
En regardant la liste de mes récentes lectures ( oui je fais des listes …) j’ai constaté que mes lectures sont souvent sombres , parfois nostalgiques , rarement très violentes , encore plus rarement feelgood. Mais presque toujours belles , voire très belles.
Je fais partie de ceux qui lisent les 4° de couverture et parfois au milieu de roman , je les relis.Pour « Le quatrième mur » je n’ai pas bien lu la 4° de couverture , ou plutôt , j’ai zappé les deux dernières phrases .suivantes « Je suis allé à Beyrouth le 10 février 1982 , main tendue à la paix . Avant que la guerre ne m’offre brutalement la sienne ».
Le « je » , c’est Georges, le narrateur , jeune metteur en scène qui accepte de remplacer, pour une mission folle, son ami Samuel
Au départ, il y a un message d’espoir, celui d’essayer de monter « Antigone » de jean Anouilh à Beyrouth en 1982 en pleine guerre civile et de faire jouer la pièce par des acteurs appartenant à chaque camp : Une palestinienne sunnite ., un Druze du Chouf , un maronite , des chiites , un phalangiste . Les faire travailler sur un projet commun , se parler.
« Le théâtre en paix, la guerre partout ailleurs »
A l’arrivée, la guerre civile et la haine. La volonté de détruire l’autre. Alors monter une telle pièce avec pour défi de prendre des acteurs des différentes parties au conflit ressemble à de l’inconscience.
Le conflit libanais, le massacre de Sabra et Chatila et les autres massacres, je l’écoutais de loin , à la radio, sans y faire vraiment attention. Sorj Chalandon , réussit , avec en toile de fond « Antigone » en parallèle de l’histoire , à nous faire ouvrir les yeux sur l’horreur de ce conflit. Il ne nous fait pas un cours magistral de géo politique, ne nous dit surtout pas qui a raison et qui a tort.
Des passages sont violents, brutaux mais nécessaires.
Georges et son projet se feront ils rattraper par la réalité de la guerre ?
Triste constat , plus de 40 ans après ces évènements , le Liban est toujours placé sous le signe de la violence guerrière.
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