"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L’homme miroir, Simon Lamouret, Sarbacane
Élise, en pleine séparation, s’installe dans une dépendance de maison de maître. Elle achète très peu cher mais dans l’état et doit donc débarrasser la maison emplie de bric-à-brac, de souvenirs de l’ancien habitant, parti il y a presque 40 ans.
Des couleurs vives dans cet album qui reproduit clairement un intérieur des années 80 ou 90 voire même d’avant. Les tapisseries, les meubles… Mais là où l’on pourrait croire à une histoire légère, on en est assez loin, avec Élise au bord du burn-out qui doit vider cette maison et s’occuper d’Antoine son fils. Ses parents viennent l’aider et chacun à sa manière se trouvera un lien avec cette maison.
Simon Lamouret écrit une histoire aux fils emmêlés, aux multiples rebondissements, où chacun se mure dans le silence au fur et à mesure de ses découvertes et des souvenirs qui reviennent.
Un album qui saute aux yeux par ses couleurs et qui reste en tête par son histoire bien construite, aux personnages attachants.
Simon a un talent indéniable pour les planches qui fourmillent, je l'avais découvert avec "l'Alcazar" et je me faisais une grande joie de le retrouver dans un nouvel objet livre, comme Sarbacane sait si bien nous proposer.
Élise se sépare et n'a plus de boulot, c'est le moment de changer de vie. Elle achète une maison de village, sans l'avoir vu, pour 25000 euros. Quand elle ouvre, pour la première fois, elle est pleine des souvenirs de l'ancien propriétaire.
Son jeune fils la rejoint et ses parents viennent y passer la fin de l'été pour l'aider à faire table rase du passé.
Pendant que chacun s'occupe de la tâche qui lui incombe (ou non), on oscille habilement dans les fantasmes d'une autre époque. Chacun se projetant dans les détails laissés ici et là.
Revivant des souvenirs qui leurs sont propres ou s'imaginant une vie tout en s'interrogeant sur les choix qui ont conditionné leurs chemins.
Toute la lecture est agrémentée de tableaux, colorés, grandioses, sombres, chacun d'eux transportent plus loin l'imaginaire et le fantasme et nous plonge dans la vie d'un peintre bohème qui accumulait autant qu'il s'effaçait.
Dans "L'homme miroir", Simon Lamouret déploie encore plus loin son talent de conteur et d'illustrateur.
On alterne entre pleines pages et découpes hétérogènes, lecture contemplative et dynamique, passé et présent, rêves et réalité. Tout cela dans une grande fluidité, les décors sont des mines de petites choses, bric-à-brac, papiers-peints, souvenirs, etc. et chaque personnage est associé à une typographie.
Une lecture, au titre évocateur, qui nous invite à se refléter dans l'âme d'autrui, la vie d'un inconnu et tout son imaginaire et qui nous interroge : Vivons-nous la vie que nous avions toujours souhaité avoir ? Suivons-nous le rêve qui nous est propre ? Suis-je celle ou celui que je voulais devenir ?
"L'homme miroir" se regarde de loin et se scrute de près, au gré des émotions, je sais, d'ores et déjà, que je le relirais pour (re)voir autrement.
Des miettes sur la table, un lit défait, un cendrier plein de mégots, une carafe même pas vide… Elle est encore toute encombrée, la maison que vient d’acheter Élise, pourtant inhabitée depuis trente ans. “Le débarras sera à la charge de l’acquéreur”, lui a-t-on dit.
Récemment séparée de son compagnon, elle cherche une place, pour elle et son petit garçon, au milieu des vieilleries d’un inconnu, entre des murs aux tapisseries d’un autre temps. Dans ce cabinet de curiosités, chaque objet intrigue. À partir d’une photo, d’un tableau, d’une dédicace dans un livre, Élise tisse des morceaux de vie du précédent occupant. Ses parents aussi, venus en renfort pour l’emménagement - ou plutôt le désencombrement -, imaginent des scènes vécues par un autre. Même le petit garçon, perdu dans cette grande maison, ne peut s’empêcher de fabriquer un personnage. Chacun projette un peu de lui-même sur cet intime inconnu. Et il y a de quoi imaginer bien des destins grâce à la générosité cacophonique de Simon Lamouret : un décor chargé à l’extrême, des couleurs vives et variées, des dessins à la fois naïfs et précis, des typographies différentes pour chaque personnage, de la musique à chaque chapitre, et même un trou dans la couverture.
À mesure qu’ils farfouillent, vident et jettent, les personnages dépoussièrent leurs propres souvenirs. Et tout finit par se mélanger un peu : les vies qu’on fantasme, le passé qu’on embellit, ou celui qu’on oublie. On croit connaître, on croit comprendre, alors qu’on ne fait qu’inventer.
(Lu dans le cadre du Prix Orange de la BD 2024)
Quiconque a déjà eu à vider une maison connait sans doute cette sensation : en passant en revue les différents objets-souvenirs qu'on y trouve, on s'amuse à imaginer comment ils sont arrivés là. Simon Lamouret pousse l'exercice à l’extrême avec la maison d'un inconnu prompt à l'accumulation. On ne saura jamais vraiment qui était cet homme, mais les projections de chacun des membres de la famille nous permettent en revanche de mieux les cerner, en creux. Ce travail remarquable sur les personnages est servi par un graphisme volontairement très chargé, à l'image de la maison, et par une édition très soignée : la couverture découpée est superbe, et l'album est même accompagnée d'une bande son, aux textes écrits par l'auteur lui-même ! Un album très riche, beau et profond.
https://www.instagram.com/p/C5lj292t4Y1/
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