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Philippe Vourch m'avait déjà charmé avec Les genoux écorchés. Il récidive avec ce récit de la pré-adolescence et de la confrontation avec le monde des adultes jusqu'ici un peu éloigné des préoccupations de Quentin. C'est Quentin devenu adulte qui raconte cette année de sa vie, dans les images qu'il évoque, on sent une enfance dans les années d'avant les technologies actuelles qui briment les inventions et créations d'activités entre copains. Courses et balades à vélo, après-midis à la plage, concours de plongée, de vitesse, surtout pas de fille, sauf Framboise, une des gens du voyage installés dans un terrain abandonné et avec qui les gars passent du temps allongés sur une carcasse de voiture à rêver et raconter des histoires (les quatre garçons qui aimeraient bien voir les seins de Framboise, étonnamment développés à douze ans). Aussi lorsque Lilly débarque et que Quentin veut passer du temps avec elle, Alban,Yan et surtout Anton ne sont pas ravis. Ils s'éloignent. La vie de Quentin bascule alors dans le monde des adultes entre la maladie de Lilly, la perte de l'amitié de ses copains, ses parents qui s'engueulent -il est question de chômage, d'alcool.
Philippe Vourch a le talent de ne pas infantiliser son texte puisque Quentin se raconte des années après, l'écueil de la facilité et des grosses ficelles du roman du point de vue de l'enfant est donc évité. C'est avec beaucoup d'humour, de tendresse, d'amour, d'émotion et de drôlerie que le romancier parle d'enfance. Beaucoup de pudeur également même s'il va au plus court, sans artifice, sa langue est directe et n'use pas d'images abstruses ou de tournures de style absconses pour parler des sentiments et de la difficulté à les exprimer -sans doute plus pour nous les garçons. Il y a le père trop absent mais à la présence rassurante et fortifiante, la mère sur qui Quentin est sûr de pouvoir compter, le vieux et la vieille (Jean et Janine) qu'il apprend à connaître : le bougon au grand cœur et la bonté incarnée, et Lilly avec qui il ne sait pas toujours comment se comporter : doit-il l'embrasser ? doit-il lui dire qui'il l'aime ? ... "Le lien qui s'est créé entre Lilly et moi est délicat, aussi délicat qu'un piaf encore aveugle, à peine sorti de sa coquille, qui tente de redresser une tête trop lourde. Je le considère fragile et précieux, et j'aimerais le cacher au fond de mes poches." (p.97/98) Des enfants touchants, des adultes qui essaient d'être au niveau de leurs fonctions parentales, mais ce n'est pas toujours aisé. L'amitié entre les quatre garçons est forte, mais résistera-t-elle à un amour naissant prometteur ?
Un très beau texte qui saura toucher les plus durs d'entre nous et faire naître une ou plusieurs larmes aux plus émotifs et sensibles. Mais pour autant, il n'est pas triste et/ou plombant, au contraire c'est une très belle chronique de l'enfance délicieusement racontée avec tout ce que j'ai dit plus haut du talent de l'auteur, toujours juste.
Un lien très fort unit Michel et son père. Des gestes tendres, des baisers, des moments partagés, complices. Ces souvenirs sont ceux d'un homme d'une quarantaine d'années bien entamée lorsqu'il les évoque. C'est sa jeunesse dans les années 60 ou 70, la Simca Aronde familiale est là en repère. On mesure alors que la relation entre le père et le fils était très forte, parce qu'à l'époque, les papas étaient peu présents, pour beaucoup travaillant à l'extérieur et laissant la gestion de la maisonnée à la maman, s'extériorisaient peu et laissaient peu de place aux effusions et embrassades.
Pour beaucoup de lecteurs de ma génération -voire celle d'avant- ces souvenirs en appelleront de plus personnels quoique finalement très partagés, comme celui-ci : "Mon père aimait fumer. Sur le trajet, invariablement, il allumait une Gauloise à l'aide de cette chose ronde dissimulée sous le tableau de bord et sur laquelle il fallait appuyer. La fumée qui emplissait le petit espace me rendait très vite malade, entraînant chez moi de sévères nausées." (p.29). Les variantes pour moi, ce sont les marques : la voiture était une citroën -avec les suspensions qui faisaient déjà mal au cœur même sans cigarette- et les cigarettes de mon père étaient des JOB -putain, ça grattait, rien qu'à l'odeur...
D'autres images en commun, comme la dernière du père -heureusement pour moi beaucoup plus tard dans ma vie, à 27 ans- : "Je ne verrai pas mon père sur son lit mortuaire, j'ai tant de belles images de lui en tête. Je ne veux pas de celle-là." (p.99)
Très jolie chronique de Philippe Vourch. Tendre, sensible. Une écriture simple qui colle à la vie de Michel et de sa famille. L'exercice de parler du père absent peut être casse-gueule, on peut tomber très vite dans du larmoyant, écueil qu'évite Philippe Vourch. Il y a bien sûr des regrets comme celui de n'avoir pas pu accompagner le mourant plus longtemps : "Mon père est parti seul, dans une chambre d'hôpital aseptisée, au son d'un bip de machine." (p.101), mais l'ensemble est beau, poétique parfois. Court roman qui va à l'essentiel par des images fortes, qui évite le superflu et tant mieux. Pourquoi se cogner un gros bouquin de souvenirs qui se répètent alors que quelques scènes fortes bien racontées marquent plus ? Un peu comme quand on regarde une vidéo longue et qu'on s'ennuie au bout d'une heure -voire avant- alors qu'un résumé de quelques minutes avec les grands moments aurait marqué plus.
L'éditeur Christophe Lucquin fait souvent dans le décalé, le déjanté, il sait aussi repérer des textes délicats, fins, ancrés dans la réalité. Et toujours ces belles mise en page et présentation.
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