Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Cela faisait quelques mois que j’avais envie de lire ce roman (je m’étais inscrite pour assister à une présentation/rencontre avec l’auteure en février dernier, mais les grèves de transport m’en avaient empêchée). Je connaissais déjà l’histoire des pensionnats canadiens d’une part par l’actualité, et d’autre part par la série 1923, dont une de protagonistes fait partie des enfants autochtones victimes de ces écoles résidentielles.
J’ai beaucoup apprécié ce roman « choral », particulièrement bien construit (alternance de points de vue, temporalité) dont la lecture m’a parue très fluide (malgré ces 350 pages, je l’ai terminé en quelques jours seulement) points de vue L’alternance des points de vue des différents personnages fonctionne bien, et j’ai trouvé judicieux d’alterner également entre première et troisième personne du singulier selon les personnages et même les chapitres. Au fil des chapitres, le lecteur fait la connaissance de 5 jeunes adultes, 3 filles et 2 garçons, qui se retrouvent tous à Vancouver, les filles devenant femmes de ménage dans un motel miteux, les garçons ramasseur de fruits dans les vergers l’été et bûcherons l’hiver. L’auteur excelle à retranscrire certaines ambiances et les descriptions des différents lieux sont dotées d’une puissance évocatrice assez remarquable. Il est vrai que, comme le soulignent certains lecteurs, certains dialogues peuvent sonner creux, notamment les échanges entre Mariah et Clara.
L’auteure met en lumière non seulement les viols, violences physiques et verbales commis par les religieux dans les pensionnats mais aussi l’éloignement des familles, dont les visites et les tentatives de communication sont sans cesse rejetées et contrées. Une des grandes forces du roman est de parvenir à montrer toutes les conséquences des pensionnats : à travers le personnage de Kenny, le lecteur se rend compte des séquelles dramatiques chez les proches des enfants enlevés de force à leur famille. Kenny rentre chez lui mais ne reconnait pas sa mère, devenue alcoolique, brisée elle aussi par l’absence de son enfant pendant dix ans. Incapable de retrouver le lien qui les unissait, Kenny s’aperçoit qu’il n’a d’autre choix que de partir. A travers le personnage de Maisie, il nous est donné à voir les traumatismes des viols systématiques et l’impossibilité de trouver une échappatoire : hantée par son expérience dans le pensionnat et incapable de maintenir une relation amoureuse avec son petit ami car ce dernier a eu la chance d’échapper aux pensionnats, Maisie sombre rapidement dans la drogue et la prostitution. La violence crue des chapitres de son point de vue est choquante. Lucy, qui semble plus frêle et fragile, parvient à survivre et entreprend des études pour devenir infirmière, mais doit élever seule sa fille Kendra malgré les promesses de son mari de cesser de fuir et de rester à s’occuper de leur enfant. Si le lecteur peut dans un premier temps en vouloir à Kenny pour ses absences répétées, on prend conscience rapidement que sa fuite éternelle est due à son enfance vécue en pensionnat. Clara est sans doute le personnage le plus attachant car c’est celle qui décide de se battre, de devenir militante et auxiliaire de justice pour aider son peuple.
J’ai aimé les ellipses temporelles, qui permettent de découvrir l’évolution des personnages, depuis leur sortie de l’adolescence jusqu’à leurs 40 ans environ. J’ai regretté cependant qu’il n’y ait pas plus de passages traitant la perte de la langue. Au fur et à mesure des années qui passent, on voit que certaines structures se mettent en place, que les Native s’organisent et parviennent à tirer quelque chose du gouvernement américain, en tout cas au niveau carcéral et du droit à la défense. En parallèle de ces timides avancées juridiques, le gouvernement continue à enlever à travers l’aide sociale les bébés autochtones à leurs familles, jugées inaptes à les élever (heureusement dans le roman Lucy parvient à éviter que l’histoire se répète et à sauver sa fille de ce triste sort grâce à l’aide de Clara).
Il y a une sorte de douceur et de délicatesse chez l’auteure, qui aurait pu livrer au lecteur des scènes terriblement graphiques des horreurs perpétrées par frère John et sœur Mary, mais qui choisit plutôt d’évoquer ces violences à différents passages, sans entrer dans trop de détails.
Le livre contient certes des passages difficiles, mais l’auteur n’est pas pessimiste quant à l’avenir : à travers le personnage de Kendra, la fille de Lucy, qui est en médecine, l’auteure semble nous dire que malgré le trauma inscrit dans la mémoire collective, les générations futures peuvent s’en sortir, réussir et créer un monde meilleur.
J’ai hâte de poursuivre ma découverte de cette nouvelle collection Seuil, « voix autochtones » avec "Celle qui parle aux corbeaux" de Melissa Lucashenko.
Ils s’appellent Lucy, Kenny, Clara m, Howie et Maisie, et ils ont pour point commun d’avoir été enfermés pendant de longues années. Emprisonnés? D’une certaine façon, et même pire. Arrachés à leur famille, affamés, brimés et abusés dans un pensionnat catholique dès leur plus jeune âge, pour la seule faute d’être nés indiens au Canada. Adolescents, ils sont mis à la porte, livrés à eux mêmes dans un pays où ils sont discriminés. Mais cette liberté nouvelle ne suffit pas à les libérer de ces années de malheur. Pour tous commence la rude épreuve de réapprendre à vivre.
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1996. Cela paraît fou mais ce n’est qu’à cette date que le Canada cessera d’appliquer la politique d’assimilation sur les populations autochtones, pour faire de ces enfants « des petits blancs à la peau brune ». Ce sont des générations entières qui ont été sacrifiées, dont « l’enfance a été marquée par le malheur, la destruction et la mort », des générations qui « n’arrivent pas à supporter leurs propres souvenirs »
Car c’est bien là le pire. Comment vivre une vie d’adulte sereinement quand on a vécu l’enfer au moment où l’on est le plus fragile, désespérément seul quand on est encore qu’un tout jeune enfant. A l’image de ces cinq petits indiens, certains dériveront, se détruiront, d’autres toute leur vie fuiront, incapable d’accepter le bonheur. D’autres encore chercheront à se venger ou aideront leurs congénères, mais rares seront ceux qui trouveront l’apaisement.
Dans ce très beau roman, l’auteur livre un vibrant hommage à tout un peuple bafoué. Dans ces cinq destinées elle met du désespoir, de la colère et du renoncement, mais ce qui touche en plein cœur c’est la grande tristesse qu’ils ont tous en point commun. Car chez ces adultes on sent que souffre toujours l’enfant inconsolable, l’enfant dont la blessure causée par la séparation originelle ne s’est jamais refermée.
Un roman fort et bouleversant mais qui jamais ne tombe dans l’apitoiement, un plume digne et émouvante. A lire!
A découvrir l enfer de ses jeunes, leurs calvaires , très touchant ,pourront ils s es sortir un très bon livre bravo à l auteur
Dans les années 1960, au canada, de jeunes enfants indiens (entre 6 et 16 ans) sont soustraits autoritairement à leur familles pour être enfermés et rééduqués pour tenter d’effacer leur culture d’origine dans des conditions épouvantables. L’autrice suit le destin de cinq d’entre eux, chacun ayant vécu des traumatismes violents qui vont bouleverser leur vie. Une fiction bien menée avec des personnages crédibles qui ont pour point commun un marquage indélébile de cette expérience douloureuse.
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