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Un grand vent d’aventure souffle sur cette dystopie que je n’ai pas lâchée.
Marcel Théroux nous entraîne sur les traces d’une fin de civilisation dans les paysages époustouflants et sauvages du grand Nord Sibérien qu’il connait bien.
Le grand Nord abrite des villes nouvelles construites par ces colons qui ont fui une vie misérable ou bien ont été chassés de leurs terres depuis que le dérèglement climatique a provoqué le chaos dans le monde entier.
« Nos étés dans le Nord rallongeaient et nos hivers se faisaient plus doux. Personne ne s’inquiétait outre mesure de savoir que ce qui atténuait les effets du froid de nos hivers réchauffait, affamait et déstabilisait les régions surpeuplées du globe »
Evangeline est une de ces bourgades où une communauté de Quakers tente de vivre en autarcie et dans la concorde. Il faut pourtant se protéger des dangers extérieurs, ces gens venus d’ailleurs, et c’est la mission de Makepeace, promue sheriff.
Du monde au-delà d’Evangeline, Makepeace ne connait que ce qu’on raconte ou que ses parents ont connus dans une époque désormais révolue. Après les départs et la mort de ses habitants, la bourgade ne compte plus que la jeune femme rebelle. Un jour, elle voit un avion traverser le ciel, évènement inattendu qui va la pousser à partir découvrir le reste du monde dans l’espoir que la civilisation technologique peut renaître de ses cendres. Makepeace joue sur son allure androgyne et son instinct de survie, lesquels vont lui permettre de surmonter nombres dangers.
Son errance dans ces régions du nord de la Sibérie nous fait découvrir une civilisation violente où les hommes retournent à la sauvagerie. Ils ont tout perdu des technologies anciennes et réinventent un monde où les vestiges du passé qu’on ne sait plus fabriquer ont valeur de trésor. Certains, comme Makepeace, sauvent les livres car ils représentent un savoir et une culture perdue. Car que penser d’un monde où l’on brule les livres pour se chauffer ? Les hommes sont puissants ou bien esclaves, entre les deux l’espace est infime pour vivre. Alors, quel avenir reste-t-il à cette humanité pour garder l’espoir d’un monde nouveau ?
« Ce monde est un vieux serpent qui mue. C’est une vieille femme rusée, et je deviens moi-même peu à peu une vieille femme rusée, et le dernier être humain qui respirera sur cette planète sera une vieille femme rusée qui élève des poulets et plante des choux, ne se fait plus d’illusions et a survécu à tous ses enfants. »
L’avenir brossé par Marcel Théroux est très sombre, mais c’est grâce à sa résilience que l’homme peut y survivre.
Cette dystopie se lit d’une traite. J’ai particulièrement apprécié la personnalité de l’héroïne, sa capacité à survivre et sa résilience d’un monde perdu.
Un roman fort qui me poursuivra longtemps.
Des expériences dans l’Union Soviétique des années 50 peuvent-elles perdurer à notre époque ? « Mais, tout au long de sa vie, Fedorov ne se départit jamais du noyau de sa doctrine – le besoin pour l’humanité d’imaginer une méthode de résurrection universelle. C’est une obsession à laquelle il revient encore et encore dans ses essais, s’y référant partout avec la même formule russe : Obshchee delo – l’Œuvre commune. » (p. 200). Comment expliquer l’impensable, comment faire comprendre ça à ceux du XXIe siècle ? « Il leur fallait une preuve irréfutable : une preuve que l’Œuvre commune était une affaire florissante, une preuve que la procédure de Malevine était viable, une preuve de la conspiration criminelle qui l’entourait, une preuve que Hunter Gould et Sinan Malevine faisaient partie de son organisation et de ses bénéficiaires. » (p. 255).
Lorsqu’on commence Corps variables, on ne sait pas que c’est un roman de science-fiction : il commence comme un roman « normal » et avec le mystère de la mort/vie de Nicholas Slopen, le lecteur apprend peu à peu le fin mot de l’histoire. Le docteur est-il vraiment mort ? Fou ? Dit-il la vérité ? Le récit, très littéraire, est feutré, riche, brillant, presque poétique. Il y a de nombreuses références littéraires, scientifiques et historiques. Un roman qui donne à réfléchir à la notion de corps et d’âme et à ce qui fait un humain. J’avais adoré Au nord du monde et il faudra que je me procure Jeu de pistes car Marcel Theroux est un auteur que je vais suivre.
https://pativore.wordpress.com/2015/06/15/corps-variables-de-marcel-theroux/
Même si le fameux secret de famille ne commence à se révéler que dans les toutes dernières pages, j’ai aimé le dépaysement à Cap Code dans cette maison pleine d’un bric-à-brac improbable.
La vie de l’oncle apparait bien étrange, aux vues des souvenirs du neveu qui nous relate les étés qu’il passait avec son frère dans la maison. La relation pleine de non-dits entre son propre père et son frère.
Mais aussi les nombreuses femmes passées dans la vie de son oncle, dont une fait son apparition.
Le narrateur se lie également d’amitié avec une famille voisine, utilisant leur téléphone car la maison n’en possède pas.
La première partie du roman qui se déroule à Londres ne m’a pas entièrement passionnée, je suis pleinement entrée dans le roman à partir du moment où le narrateur prend possession de la maison.
Un jeu de pistes et une très belle réflexion autour de la filiation.
L’image que je retiendrai :
Celle de l’inventaire des biens de l’oncle qui fait 250 pages.
http://alexmotamots.wordpress.com/2015/09/23/jeu-de-pistes-marcel-theroux
Unique et surprenant. Conte apocalyptique, construit révélation après révélation, qui nous égare et nous éprouve, comme son héros. L'histoire et l'écriture nous donne la saveur d'un monde loin de la morale ou de la justice, inutile dans ce Grand Nord inhumain. Mais simplement guidé par l'instinct de survie. Haletant et déboussolant.
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