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La découverte de la plume d’Isabelle Augereau à travers son roman "J’écrirai le printemps" me conforte dans l’idée de continuer à lire les écrits d’auteur(e)s peu connu(e)s édité(e)s par des maisons pour le moins confidentielles. Cette curiosité parfois à l’origine de déceptions, est, cette fois, l’objet d’une magnifique surprise.
Comment parler de ce livre qui m’a emportée ? Comment dire qu’en le parcourant, j’ai entendu de la musique, imaginé une lecture musicale, une corne de brume, le murmure du vent, le ressac de la mer sur les galets de la plage, la voix de la femme et celle de l’homme, et puis un violon, peut-être deux, un violoncelle, une contrebasse…
"La suite numéro trois en ré majeur de Bach.
Sa préférée, à lui, qu’ils écoutaient ensemble.
Souvent."
Comment expliquer cette histoire d’une beauté indicible, d’une élégance magique, d’une pudeur sublime, faite de silences et de regards ? L’histoire d’un homme et d’une femme qui se rencontrent sur une plage…Banal ? Ah ! Non, certainement pas ! Dans ce texte, rien ne l’est. Il est pur, poétique, musical. Les mots sont comptés, précis, sublimés. Trois chapitres : la rencontre, l’amour, et puis les souvenirs, la mort aussi qui sépare… un temps, puis répare. Remarquable est la manière de raconter le bonheur, la douleur. Remarquables les descriptions de la nature, partout présente, Etretat, Honfleur, un homme et une femme. Remarquables les souvenirs des jours heureux avant le drame, l’accident de la petite.
"S’enlacer, s’embrasser encore.
Se promettre une vie grandiose.
Les yeux dans les yeux.
Les cheveux goûtant.
Goûtant l’un à l’autre."
Remarquable, tout l’est dans ce récit qui se chuchote, enchaîne, enveloppe. Le commencer, c’est le terminer à la fois avec avidité et retenue.
Et puis, il y a le reste, le livre, l’objet, tout aussi magnifique fait de jolies pages écrues et d’une couverture, couleur rouille, "en papier d’art. Façonné à la main". Car Christophe Chomant est éditeur, imprimeur et façonnier. Les quelques précisions de fin d’ouvrage ajoutent à l’intérêt : "Fabrication artisanale en flux tendu et vente uniquement sur commande. Ni surproduction ni perte pour le respect des ressources de la planète et une frugalité durable."
Une auteure de grand talent, un éditeur respectueux, un roman sublime : Un plaisir sans nom.
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Splendide, crépusculaire, rimbaldien, « J’écrirai le printemps » est la cathédrale de l’amour.
L’écriture est un palais d’honneur. On est viscéralement dans l’intégrité vertueuse du renom. Lire ce livre, c’est étreindre le mot. La beauté même, cardinale et obsédante d’une littérature perfectionniste. « J’écrirai le printemps » c’est la garantie d’être dans l’intimité de la langue, dont chacune des phrases est révélatrice d’une poésie conquise.
Ce serait une litanie musicale, dans un silence où l’on est au plus près de ce qui va advenir. Les sons et les signes comme une échappée au travers des pages.
Le rythme est la marée-basse, la trame d’embruns et de ressacs, de souffle de vent et de vertige à flanc de falaise. La chance supérieure de lire un texte durassien. Sans même qu’Isabelle Augereau le désire. Le don inné, la connivence d’être en mesure d’écouter ce chant désespérément magnifique. L’art majeur d’un récit qui se murmure à voix haute.
L’incipit est une marelle entre ciel et terre. « Elle marche sur la plage qui s’étend à l’infini. L’horizon a cette ligne parfaite. La mer est lisse, sans vent. Pas trace d’un bateau. »
La rencontre est fervente, délicate, dans cette pureté innée. À l’instar d’un frôlement, d’une plume en plein vent. La mer habite ce roman, les sens comme les attentes. C’est la forme la plus belle et soyeuse de l’exaucement de la connaissance. Elle et il se voient. Les prénoms ignorés, nous sommes dans le macrocosme qui dépasse la normalité. Ils sont déjà dans cette posture sentimentale.
La côte normande, les falaises, dans cette austérité d’appartenance au secret. Le vent et les vagues, la mer complice et les regards figés vers l’horizon.
Elle et lui s’appellent le soir, comme un rite pavlovien. Se retrouvent souvent fortuitement. Il est solitaire, énigmatique et romantique. Peureux et sa fragilité est la prononciation de la crainte de perdre déjà cet amour.
Les attitudes s’échappent. Ils sont dans le frôlement virginal de cette attirance magnétique.
Elle est souveraine, altière, amoureuse, divinement femme. Ils ne se parlent que peu. Attendent le signal de ce qui échappe à la normalité. Les sentiments sont déjà dans l’autre versant. Dans cette épiphanie qui laisse les vagues accomplir le devoir. Se laisser aller dans cette relation liane et gémellaire.
Lui, le gardien des récifs, des landes et galets, du vent et des bruyères, du sable et de la respiration de la vie. Le berger de la mer. La pâle lumière est celle de son cœur qui bat, alliance avec le rythme des marées.
Ils regardent la mer ensemble. Ce que les pentes rocheuses, l’herbe sauvage, et la solitude peuvent offrir dans ce partage du temps et de l’instant. « J’écrirai le printemps » est aube nouvelle.
« Lui, après un silence
- Y-a-t-il un jour, un jour seulement, où la mer ne vous a pas semblé belle ? »
« Aujourd’hui sur la plage, avec elle, le paysage était lunaire. »
« J’avais l’impression d’une terre totalement dépeuplée. D’un monde qui nous était réservé. D’un monde que pour nous.
- Parce que nous sommes comme au début du monde, vous et moi.
- C’est à dire ?
«- Totalement innommés. »
Ici, c’est la contemporanéité qui excelle. Taire ce qui va se dérouler entre les myriades d’un texte de renom, quasi filmique. Tant les gestuelles, les regards, sont une chorégraphie quasi charnelle. Tout est beau, ici, dans ce cerceau marin, deux êtres qui semblent de merveille d’apaisement, de complétude. On retient les épreuves, il y en aura, taire l’enfant, taire les tempêtes et les draps froissés de larmes et de soie spéculative.
« J’écrirai le printemps » est beau à pleurer.
Isabelle Augereau est un génie littéraire. Lisez ce printemps qui advient. Dont chacune des vagues est un requiem.
Ce livre nous prend dans ses bras et donne des forces.
L’écriture panthéon jusqu’au point final est l’horizon en front de mer.
Inoubliable, ce premier roman dépasse largement ses grands frères.
Publié par les majeures Éditions Christophe Chomant Éditeur.
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