"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Elle, Zoé, vit au bord de la rivière des Outaouais. Dans ce Canada encore préservé de la guerre qui a ravagé les États-Unis voisins, et fait migrer tant d'hommes, de femmes, d'enfants, que le pays ne peut plus les accueillir et que le danger rôde.
Lui, Thomas, est revenu en ville pour les obsèques de son père. Lui qui avait fuit la région six ans plus tôt, sans plus jamais donner de ses nouvelles.
Lui enfin, Nathan, est le fils perdu. Celui qui n'avait pas encore quatre ans lorsqu'il a disparu alors qu'il jouait dans la cour de la maison sous la surveillance de la famille de Zoé, au bord de cette rivière. L'enfant pour qui les recherches incessantes de sa mère, Zoé, de son père, Thomas, n'ont rien donné.
Aujourd'hui, Zoé chasse, mais une chasse étrange qu'elle fait dans deux buts précis, survivre grâce à la prime octroyée par le gouvernement pour chaque proie rapportée, et traquer ce fils disparu qu'elle croit toujours vivant.
Au bord de la rivière, et dans les forêts, les enfants se sont rassemblés pour affronter la police, les riverains, pour tenter de vivre encore sans être envoyés au delà de la frontière de l'Alaska. Il faut dire que dans ces années 2030, le monde a été bousculé par des changements climatiques importants et la vie est devenue très difficile pour les migrants.
Au milieu de ces changements, de cette vie de plus en plus compliquée, le couple Thomas-Zoé tente de survivre, de se retrouver. Mais l'histoire d'amour est compliquée entre la fille d'une autochtone amérindienne qui a subit l'exclusion et le traitement infligé aux jeunes indiens, placés dans des pensionnats catholiques pour suivre une bonne éducation et tuer l'indien en eux, et le jeune Thomas.
Beaucoup de sujets soulevés dans ce roman, le traitement subit par les indiens du canada, la violence intrafamiliale, ici entre le père et sa fille, l'alcoolisme de la mère et le pourquoi de cette addiction, le réchauffement climatique et l'avenir de la planète, la façon de traiter l'arrivée massive de migrants sur un territoire... Au final, il y en a pour tous les goûts et toutes les sensibilités. C'est écrit sous forme de dystopie, mais dans un avenir tellement proche que j'ai eu du mal à m'y projeter. Pourtant, j'avoue que j'ai lu ce roman quasiment d'une traite. Comme quoi, les personnages ont su m'accrocher et me donner envie de les connaître.
L'autrice a écrit ce roman noir lors d'une résidence d'écriture à Gatineau qui se trouve à la frontière entre le Québec et l'Ontorio. C'est cette ville qui sera le théâtre du drame vécu par ses personnages.
Zoé et Thomas se sont aimés. Leur relation était difficile et intense mais de leur amour va naître Nathan. Ce dernier va disparaître alors qu'il n'avait que 3 ans, Zoé ne l'a quitté des yeux que quelques minutes. Alors que Thomas est persuadé qu'il est mort noyé ou enlevé par un étranger, Zoé, elle, est convaincue qu'il est vivant. De cette différence de croyance, leur couple ne va pas survivre. Thomas part vivre en France. 6 ans plus tard, il revient pour enterrer son père mais tout le ramène à Zoé et au lieu où a disparu son fils.
Le prologue m'a immédiatement happé. On s'interroge tout de suite. Pourquoi Zoé chasse des enfants dans une zone dite dangereuse ? Elle leur tire une flèche anesthésiante et les livre à Ottawa contre un chèque. Que deviennent-ils ?Quel est le rapport entre ces enfants qui semblent sauvages et le drame familial qu'elle a vécu ?
L'autrice a su créer une ambiance réaliste et très particulière dans un futur proche. Le monde est en prise à la catastrophe écologique. Les réfugiés climatiques, politique et économiques affluent, plusieurs villes dans le monde sont évacuées car elles se retrouvent désormais sous les eaux. Le Canada ne fait pas exception. Le thème de la politique d'assimilation des indiens au Canada est également abordé. Je n'en dirais pas plus pour ne pas tout révéler de l'histoire.
L'écriture est fluide, la lecture rapide et prenante. J'ai trouvé ce roman très sombre et singulier. Je ne saurais dire si je l'ai aimé ou non. C'est bien écrit mais je l'ai trouvé dénué d'émotion. J'ai eu beaucoup de mal avec les choix de Zoé. Même si on comprend les origines de ses traumatismes, je l'ai trouvé trop égoïste et brutale. J'ai eu du mal à être touché par son histoire personnelle.
« L’enfant rivière » est une dystopie (nous sommes en 2030) emplie d’exotisme boréal (nous sommes au Canada) et de problème migratoire (les populations fuient les territoires abîmés par le dérèglement climatique). C’est aussi un thriller prenant dont a lecture est rendue agréable par une écriture fluide et qui sait tenir en haleine jusqu’au bout.
La disparition d’un enfant, sa mère très instinctive qui le recherche éperdument, son père plus cérébral mais non moins meurtri et qui a accepté la volatilisation, viennent compléter un tableau à la fois terriblement intime et très ancré dans la société tant c’est tout l’environnement qui agit pour faire avancer l’intrigue à rebondissements.
L’évocation du sort des populations autochtones soumises à l’assimilation apporte un accent de vérité qui ne jure jamais avec l’ensemble du livre, ce sont les réactions des humains qui priment, entre révolte et action.
Ce livre voyage dans le cadre des 68 Premières Fois, merci à l’équipe pour cette belle aventure et ses découvertes enthousiasmantes, comme celle-ci.
Plonger dans ce roman d’Isabelle Amonou—qui n’est, en réalité, pas tout à fait le premier--, c’est s’offrir un voyage sur le fil de plusieurs frontières mêlées, comme le sont les racines des hommes et des femmes de là-bas. Là-bas, c’est au bord de territoires immenses, un morceau d’Amérique où l’on parle Français, des terres sauvages, civilisées autrefois par des êtres sans âme dont la foi faisait loi, colonisées quelque part entre le temps d’aujourd’hui et celui qui s’annonce par une jeunesse laissée en friche, livrée à ses instincts les plus cruels, à ses impératifs de survie quelle qu’en soit la manière, poussée hors de son écrasant pays par une guerre civile devenue inévitable. Sur cette parcelle de terre à l’âme oubliée, vivait il y a peu une famille presque normale, avec le père, Tom, la mère, Zoé, et leur petit garçon, Nathan. Et, au milieu, coulait une rivière. Lorsque Nathan disparaît, c’est tout un édifice qui semble se dissoudre dans ses eaux tumultueuses, à la puissance impassible et aveugle, pour laisser remonter à la surface des vérités trop longtemps enfouies.
Forte de sa riche expérience d’autrice de romans noirs, Isabelle Amonou nous offre, avec L’enfant rivière, un texte à l’équilibre mûri et subtile, suivant son cours entre force et délicatesse, construit tout en habilité et nuances pour guider notre réflexion autant que notre sensibilité dans les méandres de cette histoire passionnante qui ne cesse de soulever de nouvelles interrogations. C’est le cœur serré mais l’intérêt toujours en éveil que l’on suit cette plume assurée et très belle sur les traces de ces nouveaux Enfants Perdus, en espérant tout bas « Never this Land !»
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