"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Avant toutes choses, je me dois d’être sincère : cette lecture a été très mitigée pour moi. Malgré un résumé qui me plaisait, c’est la façon de conter l’histoire qui ne m’a pas séduite.
Une romancière décide de tout quitter et de s’installer dans un chalet au milieu des bois afin de fuir les réseaux sociaux où elle est la cible de harcèlement. C’est alors qu’elle se rend compte que le chalet, voisin du sien, est occupé par son ancien beau-frère avec qui elle ne s’est jamais entendue.
J’ai apprécié ce décor du chalet perdu dans la forêt. Ce qui a coincé avec moi est cette écriture très abstraite et déroutante à laquelle j’ai eu beaucoup de mal à accrocher. Je pense qu’il s’agit simplement d’un style que certains lecteurs pourront apprécier. Mais pour ma part, pour mon esprit assez cartésien, cela ne fonctionne pas.
Par l’intermédiaire de flash-backs, on apprend à mieux comprendre cette relation conflictuelle entre la romancière et son beau-frère. Mais hélas, j’ai trouvé que certains éléments pouvaient être plus construits et hélas, cela n’était pas le cas, ils étaient trop survolés à mon goût.
Des thèmes comme le sexisme, la société dominée par le patriarcat sont des sujets qui peuvent être discutés durant de nombreuses pages. En écrire un livre ne comptant qu’un peu plus de 150 pages fait que c’est comme si tout était trop « survolé ». Je pense que c’est ce goût de trop peu également qui fait que je ne retiendrai qu’une lecture bigarrée.
Ceci n’étant que mon humble avis personnel, je ne peux que vous conseiller et vous inviter à vous en faire le vôtre.
Je remercie Babelio et les éditions Le Mot et le Reste pour l’envoi de ce livre dans le cadre de la Masse Critique Littérature.
Empreintes de pas dans la neige. Se risquer dans cette tempête en pleine forêt. Diapason littéraire de renom. Les volets claquent sous l’effroi du vent, sourd, imprévisible, sauvage. L’écriture est une rencontre, une confidence sous l’épais tapis de blancheur. L’heure est à l’affût. Les turbulences s’agrippent aux branches. L’histoire est nécessaire, la vérité salvatrice. « Si j’écris sur cette affaire, ce sera contre moi parce que j’aurai choisi de tout quitter. » « C’est trop tard : ce récit-là reste encalciné. » La narratrice est une jeune femme, féministe, engagée, blogueuse, menacée, éreintée, fragile et pressent ce danger qui se heurte contre elle, implacablement. Meurtrissures, elle dérange. « J’ai senti un mouvement près du chalet abandonné. Je m’approche de la porte, l’ouvre, hume ma propre peur. Rien, ce sont sans doute les étoiles qui ont bougé. » Elle se réfugie dans ce glacé, ce spartiate, un antre fissuré, abandonné. Les bruits extérieurs heurtent ses rivages. Elle frissonne, apeurée par Rock Dumont, « Le Patriarche radical » membre du groupe « La Souche ». De son beau-frère, pervers narcissique, violent et jaloux. De son mari, bête aux abois, cruel et avilissant. Elle est sommée de se terrer, de refouler son quotidien, les violences, harcèlements familiaux, parents repoussant du pied leur fille poussières glissées sous le tapis. Ignorer et laisser le conventionnel, le faux-semblant être leur pain du jour. Le chalet vacille. « L’ennemi se décline en trois archétypes : le narcissique de la famille (théâtre privé) le prédateur (théâtre social ou politique) leur défenseur. Tout se monde déblatère à la télé et sur les réseaux sociaux ». L’écriture est serrée, nuancée, belle, âpre, sans compromission. Habile, elle scelle le sociétal, les aigreurs, les émois. « Chez Aron, j’ai l’impression que c’est lui qui m’a apporté la tempête tant désirée. De ce fait, mon cœur s’est illuminé. Merci neige, merci Aron. » (Le propriétaire du chalet). Recroquevillée, les sens en éveil, elle écarte les angoisses, cherche la voie de la lumière, les rais d’étoiles. Regards de l’enfant. Ce petit être arraché du tiède, de l’amour. Son père ivre de folie, de dangerosité. Passage à l’acte parabolique, il brise sa femme, efface son visage du vivant. (Sœur de la narratrice). Dans ce chalet, perce au travers de la fenêtre les mouvements de la nature. Ce récit s’habille de gestuelle animalière. Un retournement aux fondamentaux, au criant des existences. Métaphore et survivance. « Les faons n’ont pas d’odeur quand ils naissent, ainsi les prédateurs ne les reconnaissent pas. Les petits humains n’ont pas cette chance." L’enfant dans la cabane. Je ne veux plus concevoir son effroi la dernière fois qu’il s’y est retrouvé. » L’enfant torpeur, piège et vulnérabilité, prisonnier du père dans cette cabane castratrice. « L’Apparition du chevreuil » est un récit des meurtrissures, des échappées pour ne plus craindre de l’autre. Il est une métaphore, un regard plongeant, neige nouvelle, rédempteur. Elise Turcotte est une virtuose. Les verbes enchantent l’aube à venir. Dans cette orée où la nature est osmose avec les existences écartelées par la profondeur des neiges qui engloutissent les paroles muettes, avalanches. « Je contourne les actes autoritaires. Je ne raconte pas une histoire. » Ce récit puissant, est à lire dans le creux de l’hiver en regard des flammes dévoreuses d’aspérités. En regard de ces hommes pervers narcissiques. En regard des blogs qui dérangent parce qu’ils pointent du doigt là où ça fait mal. En regard du courage et de la loyauté de cette sublime narratrice. Le chevreuil est équerre, certitude et récompense. Lisez ce grand récit, la nuit dans la force de tous les courages. « L’Apparition du chevreuil » est méritant, un devoir de lecture bénéfique. Magnifique. En lice pour le Prix Hors Concours 2020 et c'est une grande chance.
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