Une galerie de personnages, sans liens apparents entre eux, dont les destins vont s'entrecroiser...
Une galerie de personnages, sans liens apparents entre eux, dont les destins vont s'entrecroiser...
Une histoire prenante et complexe qui se déroule dans différents milieux sociaux sur plusieurs années et sur plusieurs continents. L'écriture est fluide. Les personnages ne nous quittent pas lorsque l'on a terminé le livre.
Je ne connaissais pas cet auteur. Une belle découverte.
Il est tentant d’utiliser la notion de vies parallèles en littérature lorsque les personnages d’un roman évoluent de manière indépendante et dans des contextes différents. Comme s’ils avançaient en ligne droite, prisonniers de leur trajectoire, sans conscience des destinées voisines. Sauf que “parfois, tout converge.”
Dans ce gros livre, Édouard Jousselin nous balade de 1993 à 2018, du village de Quarré-les-Tombes à l’État de l’Oklahoma, de Mitterrand à Trump, du terrorisme à la littérature, de la vie aux morts. On suit les parcours d’une myriade de personnages entre la France et les États-Unis : un ancien résistant, un migrant mexicain, une mère épuisée, un professeur en criminologie, un écrivain, une étudiante en lettres modernes, un producteur hollywoodien… Chacun espère être du bon côté, celui des gagnants. “Vous savez, on croit toujours que nos racines sont ailleurs et puis un jour, vous vous rendez compte que vous n’êtes pas plus de là-bas que d’ici.” Et pendant que le monde avance, toutes ces lignes de vies s’attirent, se croisent ou s’éloignent. L’une traverse l’océan pour étudier le français à Paris. L’autre quitte une famille pour rejoindre un amant à Los Angeles. Sous nos yeux, une sorte de modèle mathématique semble se mettre en place - “qui a hauteur d’intelligence humaine n’est qu’éparpillement.”
Il n’y a jamais eu d’histoires parallèles. Ce qui rassemble, ce n’est pas le mariage, la famille, l’amour. Ce n’est pas l’Histoire ou les souvenirs. C’est autre chose. Quelque chose qui s’agite dans les secrets et les mensonges. Un flux qui quadrille le globe et qui parfois nous traverse. Une variable difficile à maîtriser, sauf pour Édouard Jousselin.
Le roman s’ouvre sur un accident de voiture en Californie. Puis nous suivons différents personnages avant l’accident, des années avant.
Il y a la famille d’Isabelle : son mari Dominique, sa fille aînée Marine et son fils Max. Son père Lucien, ancien résistant.
Il y a la famille de Steve et Tyler dont le père est devenu manchot suite à l’attentat d’Oklahoma City.
Il y a Jessica étudiante américaine en français et Benjamin son colocataire qui étudie les tueurs en série.
Il y a Thierry, le copain de Dominique fan absolu de l’A.J. Auxerre.
Il y a Bruno le producteur de film qui tombe amoureux d’Isabelle. Ils partent vivre aux Etats-Unis.
Il y a l’émigré mexicain dont la petite fille et morte, la femme reparti au Mexique, et lui devenu vigile d’un lotissement, puis naturalisé.
Il y a Clarisse qui couche avec Max et qui veut devenir actrice, quitte à commencer dans la télé-réalité.
Il y a le film The Last Fighters, block-buster que tous les personnages vont regarder à un moment où à un autre.
Il y a la légende de Saint-Georges présente partout dans le monde.
Il y a les cimetières omniprésents : Lucien habite à côté de celui de Quarré-les-Tombes (le nom de son village), et Benjamin travaillera au FBI dont les bureaux sont situés à côté d’un cimetière.
Il y a surtout beaucoup de détails qui ont fait que j’ai terminé ma lecture en vitesse rapide, comme parfois on le fait avec un film.
L’image que je retiendrai :
Celle des oiseaux, présents sur certaines scènes, comme apportant une touche de couleur par-ci par-là.
https://alexmotamots.fr/la-geometrie-des-possibles-edouard-jousselin/
La 4ème de couverture annonce un roman choral où on va chercher le fil invisible reliant de multiples personnages. « Des forces mystérieuses tressent leurs vies pour les plonger dans la tourmente, hantées par l’ironie de l’Histoire, son cours impitoyable. » L’ambition, le mensonge, la fatalité les attendent au tournant. Il est ensuite question de ce deuxième roman, qualifié d’audacieux et addictif, confirmant le talent d’Édouard Jousselin. Avant l’envolée lyrique qui en promet trop à mon avis : « Sous sa plume se déploie une œuvre-monde foisonnante, chronique vertigineuse de notre époque. »
A ce stade j’étais plutôt inquiet. Il faudrait éviter de lire les 4ème de couverture et celle-ci particulièrement.
Heureusement c’était le premier roman choral lu dans le cadre du Prix du livre Orange. Il y en avait plusieurs. Ce type de roman, s’il confirme le talent des auteurs pour entremêler des histoires, n’est pas le plus facile à lire, encore moins à analyser puisqu’on est très occupé à suivre les personnages. Ici on fait la connaissance avec une belle brochette d’individus originaires de France (Morvan ou bordelais), des États-Unis et du Mexique, pour qui la vie ne va pas être facile.
Casting en France : Max est hacker, il gagne de l’argent via le dark web et les sites pornographiques. Son curieux grand-père, résistant (ou se faisant passer comme tel) participe à toutes les commémorations officielles, côtoyant l’élite. Marine, la sœur de Max, est en prépa avec Stéphane (que l’on retrouvera auteur à succès sans scrupule). Clarisse, petite amie de Max au début, est une starlette de la télé-réalité prête à tout pour percer. Bruno, amant d’Isabelle, la mère de Max, fait des études de cinéma. Casting aux États-Unis : Benjamin (et ses « ambitions académiques ») devient directeur au FBI. Il est amoureux de Jessica, sa colocataire, qui partira enseigner à Paris. William, dit Bill, est le père de Steve et Tyler. Bill sera gravement handicapé suite aux attentats d’Oklaoma city en 1995. Je ne dis pas que Steve à la dérive deviendra parricide, ce serait divulgâcher... Càndido est un exilé exemplaire cherchant une intégration improbable, alors que sa femme America est restée au Mexique (notez l’ironie des prénoms...).
La première partie permet de faire connaissance avec les personnages avant que le récit ne prenne son envol. Il y a ces listes qui indiquent que les biens et la nourriture sont omniprésents pour ceux dont on raconte l’histoire, liste de marques décrivant mieux les individus que leurs traits et caractères, formant une toile de fond de l’environnement économique. Celui-ci est là, on peut le relier à l’aliénation, le vide de la plupart des personnages… La construction est complexe et ne laisse que peu de place pour creuser les caractères qui apparaissent flous.
On traverse l’histoire sur plusieurs décennies en quelques lignes lapidaires, sans nuances, sur les gilets jaunes, sur Chirac, Mitterrand, la cgt, la sncf... On s’attarde un peu plus sur les attentats d’Oklahoma et ceux du 11 septembre, mais ces éléments sont donnés comme des titres sur les chaînes d’info en continu, comme si pris dans la tourmente, plus personne ne saisit les causes et les enjeux.
Comme il le dit dans une interview, l’auteur est parti d’histoires qui l’ayant accompagné. Il s’est inspiré de son parcours, particulièrement à l’aise pour parler des grandes écoles, d’un milieu ayant accès à des positions élevées dans la société… dont la traversée de l’océan est une simple routine. Quelle place prend Édouard Jousselin dans tout ce discours ? Faut-il lire au second degré ou interpréter à notre guise alors que les biais et raccourcis cognitifs sont innombrables... Les clichés sont-ils ceux des personnages alors que certains sont indiqués en italique et d’autres pas, le lecteur ne pouvant faire la différence entre ce qui sort de la bouche des personnages et ce qui émane du narrateur, bien présent derrière tout cela.
« Par le truchement de l’acte littéraire, par le coup de plume précis et cinglant, et en prenant le prétexte d’un personnage, ce Yannick qui est mon double, j’ai désiré viser un système tout entier. J’ai voulu taper fort. »
C’est Stéphane qui dit cela interviewé par Matthieu de Bailly pour l’émission télévisée Mots du monde qui le relance ensuite :
« Et ceux qui vous regardent, mon cher Stéphane, ce sont les jurys de prix littéraires. Vous êtes de toutes les listes, et l’automne s’annonce des plus fastes. »
La construction du livre a bien des qualités mais je suis resté perplexe devant ces destins issus d’un déterminisme, d’une fatalité dont on ne pourrait pas vraiment s’extirper. J’ai souvent pensé au malaise éprouvé lorsque j’ai lu Michel Houellebecq écrivant sur des situations possibles, réelles peut-être, sans que je n’arrive à accrocher.
J’ai lu ce roman dans le cadre de ma participation au jury Orange du livre 2024. C’est un des 20 livres de la première sélection établie lors des échanges et votes du 26 mars.
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