"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dans un décor qui ne suscite pas le rêve, une aire de repos au bord de l’autoroute, Dominique Paravel met en scène un personnage qui va vivre un épisode très perturbant. Après une brève dispute avec sa compagne, et un bref instant de malaise, il perd tout repère et toute trace de sa voiture. Quant à Ania, sa compagne, elle ne répond plus au téléphone. On apprend alors l’objet de leur divergence de point de vue, et la fameuse existence de la collection dont il doit devenir le conservateur dans une petite ville de province éloignée des grands centres où les cotes d’artistes se font et se défont au gré des modes et du pouvoir des finances.
Il a fini par accepter cet enterrement de première classe, elle n’a pas apprécié la démarche. Mais pourquoi tout à coup l’abandonner sur cette aire glauque ? Sa quête lui permettra de rencontrer de nombreux personnages hauts en couleur !
Un récit original et bien pensé, qui laisse le lecteur dans même doute que Gabriel, le narrateur. On apprend beaucoup sur les oeuvres fictives, dont la description plus vraie que nature fait illusion, de peintres mineurs qui, eux ont réellement existé.
Lecture dont le ton léger contraste avec la grisaille du décor, qui permet de passer un bon moment.
Gabriel sexagénaire, se trouve abandonné par sa femme sur une aire d’autoroute.
Il est sans voiture, et face à des scènes qui lui rappellent étrangement chacun des tableaux du musée dont il vient de prendre la charge dans une commune reculée.
L’auteur nous parle de notre société à travers les personnages croisés : serveuse, chauffeur routier, prostituée, épouse fuyant son mari, famille avec son chat. Gabriel va ouvrir les yeux sur les gens qui l’entourent sur cette aire d’autoroute et se rendre compte que le monde est effrayant.
Le décor fait tellement partie de l’histoire que vous ne pourrez plus vous arrêter sur une aire d’autoroute sans guetter une personne abandonnée, sans penser à ce personnage et ce roman.
Un roman limite initiatique pour cet homme qui a la tête dans ses tableaux, qui impose son lieu de villégiature à son épouse, qui se satisfait de sa vie provinciale de façon égoïste.
Un texte très court, bien écrit, pour lequel j’aurais aimé quelques développements.
Un scénario original avec un personnage original et quelque peu attachant.
Un livre de littérature contemporaine, très vite lu qui parlera aux nombreux usagers de l’aire d’autoroute proche de Montélimar, à tous ces automobilistes qui prennent la direction du sud, les beaux jours venus.
Manifestement ce livre n'est pas moi, trop second degré mais certainement très drôle pour d'autres lecteurs
Une aire d’autoroute, celle de Montélimar, et tout change au vent de la vie.
Une myriade méticuleuse. Un livre ardent, vertigineux d’intelligence .
Terriblement humain, l’aptitude à la métamorphose. Entre un désespoir révélateur, hypnotique et fondamental.
C’est l’histoire peu banale d’un homme, celle de Gabriel Bernier. Un anti-héros, terne et déçu, dont l’existence semble le musée qu’il dirige en tant que conservateur.
Dans cet endroit emblématique où il s’est arrêté avec sa femme Ania. Il est soudainement pris d’un malaise. Il semble alors son propre anéantissement. La chute d’Icare. L’oubli. Amnésique endormi quelques minutes. Lorsqu’il reprend connaissance, sa femme a disparu. Métaphore, double sens, nous sommes dans une littérature voluptueuse, efficace et subtile. Ania, « vingt ans de moins que lui, un visage encore indemne. Directrice d’une agence d’évènementiel... », lui, docteur en histoire de l’art, mais l’aura en berne.
Un désaccord sur un projet commun, la dualité, le noir et le blanc. Gabriel est l’emblème des vents contraires. Plus de voiture, plus de femme. Il est seul au centre de cette aire d’autoroute, dans cette croisée des chemins, où les déambulations sont le côté pile de l’idiosyncrasie sociétale. Le récit est décisif et s’étire dans une orée finement politique et sociologique. Gabriel va enquêter. Des rencontres fortuites, devenues des leviers. Les caricatures qui découlent des personnages sont des masques tombés. Le reflet contemporain de nos habitus et petites manies et les a priori des catégories sociales. Le tableau résurgence de tous les paradoxes et des injustices, le monde d’en haut et d’en bas. « Dans ce Disneyland de l’autoroute, pas de SDF réduits en bouillie par la canicule, pas de migrants cherchant pitance et abri, pas de travailleurs acculés au suicide, rien qu’une hideuse farandole de vacanciers. Rares sont les beaux visages, une bouche tient du miracle.Ce n’est qu’endormis que cette multitude d’essais ratés, accède quelquefois à la beauté, comme s’il leur fallait abandonner la verticalité, la percée du regard. Une femme âgée sur un transat, dont l’ombre d’un cyprès racrait les paupières. Un jeune homme étendu sur l’herbe au visage mêlé d’Orient et d’Occident. »
Il puise en lui les solutions inestimables. La remontée du temps, le corpus familial, son fils, la mise à distance. L’incompréhension commune. Tour remonte à la surface, immanquablement. Gabriel est admirable dans sa quête lumineuse. « Aujourd’hui encore il éprouvait la même impuissance face à sa fils, n’avait jamais trouvé le chemin vers lui, l’un et l’autre toujours à la mauvaise distance. Je l’aime pourtant, se dit-il, le cœur douloureux, le cœur empêché. »
Le récit est bleu nuit, beau à couper le souffle. Tendre comme le bon pain. Sous ses faux airs d’humour, soit joyeux ou cynique, se cache un Gabriel Bernier qui fait saillir le pictural d’une aire d’autoroute dans sa définition la plus triomphante. Des serveuses, aux vacanciers, des routiers aux balayeurs, jusqu’aux petits moineaux qui quêtent des miettes de pain sous les tables en bois délavées.
Les tableaux de son musée sont fructueusement réalisées avec les monde vivant, des pauvres aux nantis, du chat disparu, échappé lui aussi…
Une vue d’ensemble qui lui fait l’effet d’une flèche en plein cœur. On aime cet homme rimbaldien, mystique des vérités. Plus il avance et plus sa vue se brouille. Ania devient subrepticement la brume et son nouveau point de départ. « - Alcool, tu aimes ? Dit- l’un. Gabriel attaqua la côtelette à pleines dents. Qu’est-ce que je fous là, se dit-il, avec ces trois types qui me prennent pour un des leurs ? Quel pays ? demanda-t-il en finissant de ronger son os. -Albanie. Il connaissait pas grand-chose de la peinture albanaise, à part le tableau qu’on désignait comme la Joconde albanaise, peint en 1883 par Kolë Idromeno, une femme en costume traditionnel dans des tons de rose. »
« La Collection » est initiatique, engagé. On s’attache à cet homme qui va faire un premier pas vers son advenir. Ne rien dire de plus. Judicieux, singulier, ce roman contemporain est la splendeur d’un voyageur qui vaincra (peut-être) de ses épreuves. Un livre frénétique et sensible de Dominique Paravel. Les méandres de l’âme humaine. Prodigieux.
Publié par les majeures Éditions Serge Safran éditeur.
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