"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Qu’est-ce que ça fait du bien de voir des éditions étrangères partir à la conquête du marché franco-belge.
Bang Ediciones nous arrive de Barcelone et nous livre un titre dit « adulte » (dont le lecteur cible est plutôt adulte) de toute beauté, plein d’imbroglio, d’humour noir, de caricature envers les Etats-Unis et leur Histoire.
Cet éditeur nous arrive donc avec des titres bien engagés d’auteurs hispano-américains.
Et à la lecture de ce titre, il va falloir les suivre de près.
Le scénario de la BD "Américan Dream" de Bazil :
Bazil a un humour cinglant et bien tranchant vis à vis du fameux rêve américain.
Son récit totalement alambiqué et loufoque est une satire profonde et particulièrement humoristique de la soi-disant glorieuse Amérique.
Presque tout y passe : Fast food, Alcoolisme, Business, Politique, Ségrégation et Racisme, Colonisation, Sexe, Carriérisme, Education etc...
Tout est sujet à critique par l'humour et ça fonctionne ! On sourit, on rit, on se régale de l'absurde poussé à son paroxysme.
La plaisanterie est tantôt lourde et grotesque, tout comme elle en devient par la suite fine et exquise.
Tout type et méthodologie d'humour graphique est présenté dans ce livre : comique de situation, comique de répétition, blagues et jeux de mots, références historiques etc...
Mais, derrière cette légèreté désopilante, le lecteur avisé y lira de nombreuses vérités toutes plus catastrophiques et peu reluisantes les unes des autres sur cette Amérique rêvée.
Les personnages sont tous facilement identifiables avec des caractères bien tranchés à l'image du cosmopolitisme légendaire et historique de ce continent américain.
Au-delà de la maîtrise de l'ironie par Bazil, celui-ci semble maîtrisé la narration avec maestria. Dès les premières pages, on se pose beaucoup de questions pour savoir ou celui-ci compte nous mener.
On change régulièrement de protagoniste à suivre, tout semble désordonné mais on se prend au jeu, et l'ensemble finit par s'imbriquer sans que le lecteur ne perde une seule seconde le fil de l'histoire.
Bazil a réussi à impliquer l'image des Etats-Unis aussi dans son découpage narratif : en bref, c'est un gros merdier mais ça fonctionne à merveille !
Le dessin de la BD "Américan Dream" de Bazil :
Le dessin de Bazil convient parfaitement à son récit.
Son trait est très humoristique. Les personnages sont caricaturés et représentatifs du melting-pot transatlantique.
L'ensemble dessin et couleurs reste très minimaliste mais cela est particulièrement efficace. Il y a peu de plan large ou d'ensemble.
Ce genre de satire ne doit effectivement pas s'encombrer de détails superflus dans le but de toucher vite et bien là où ça fait mal.
Les couleurs choisies sont simples, unies avec de 3 à 4 teintes différentes par vignettes. A noter quand même une dominante bleue presque constante...
Le découpage reste classique en gaufrier variant de 7 à 12 cases.
Les bordures de case sont tracées à la main et parfois n'existent pas, mais cela donne un charme fou à l'ensemble et s'associe bien avec le désordre rocambolesque de l'aventure.
Les effets visuels sont peu nombreux et se limitent souvent à de petites onomatopées bien placées.
En final, je ne peux que vous conseiller d'absolument lire cet ouvrage à l'humour décapant et incendiaire.
Cette BD est tout simplement une perle d'humour, rappelant (ou évoquant) de tristes réalités en usant de dérision.
Un véritable "must have" à toute bonne bibliothèque.
L'excellent Bazil nous livre un nouvel ouvrage plein d'humour noir (sans vouloir faire de mauvais jeux de mots...).
Rappelez-vous, nous avions découvert son univers avec l'hilarant "American Dream" (voir ma chronique ici).
Et bien il nous revient avec un humour encore plus décapant et surtout à contre-courant, ou à l'inverse en plein dans le vent (à votre bon choix), des actualités.
De premier abord, on constate très vite la parodie évidente du célèbre "Tintin au Congo" de Hergé.
Les indices grossiers tels que le personnage journaliste belge à la houppette (Pimpin) et son chien acolyte (Mildiou), mais aussi les enquêteurs (De Smeek et Duchmol), vous taperont dans l'œil à n'y pas manquer.
Et je suis sûr que vous en trouverez bien d'autres...
Il y a aussi quelques clin d'œil à d'autres BD comme un certain groom...
Mais au-delà de cette caricature très marrante (humour second degré à apprécier), ce livre est une critique satirique et sévère du colonialisme (et pas uniquement de la Belgique vers le Congo).
Il pointe exagérément mais efficacement sur les travers de chaque peuple, et ça fait mal à tous les niveaux : racisme, éducation, extrémisme, arrogance, égocentrisme, barrières sociales etc...
Cette bd est donc un fabuleux melting-pot de thèmes durs tous encore biens réels et hélas bien loin de disparaître.
Le dessin très caricatural reste minimaliste comme pour "American Dream" mais toujours aussi efficace.
Ce qui est aussi frappant c'est évidemment la ressemblance sans doute volontaire du héros sur les deux ouvrages.
Il n'y a que peu de grandes cases ou de plan d'ensembles. Les effets visuels restent simples et sont posés judicieusement pour évoquer un certain dynamisme visuel.
Les couleurs unies, vivaces et chatoyantes égayent le récit, et la diversité de la palette renforce aussi l'impression de boxon continuel.
A noter que, comme de fait exprès, les teintes noires ou blanches sont omniprésentes et sortent bien sûr du lot. Je ne sais pas si l'intention était voulue, mais l'effet est bien là !
Le découpage chargé, en gaufrier avec en moyenne 10 à 12 vignettes donne toujours une impression de gros désordre complexe à l'image de toutes les intrigues et thèmes abordés, de la multitude de protagonistes etc.…, mais au final il est admirablement bien orchestré afin que le lecteur ne perde pas le fil de l'histoire.
C'est là une structuration et un travail impressionnant.
Un dernier point que j'apprécie beaucoup dans les bd de Bazil, c'est la richesse des dialogues.
Certaines répliques me paraissent parfois véritablement d'anthologie. J'y vois un petit côté façon Michel Audiard
Extrait de dialogue :
- Pimpin à Kitoko "Oh ben t'aurais dû les accompagner, c'est bien Bruxelles. Rien que le Manneken Pies."
- Kitoko "Quoi... le gamin à poil qui fait pipi dans un bassin ? Woaw, le génie artistique des civilisés !"
- Pimpin "euh..y'a pas qu'ça."
- Kitoko "Tu m'étonnes. Une ville entière embellie par le sang des récolteurs de caoutchouc... ça doit en faire des monuments à visiter."
- Pimpin "Et les gaufres ? T'as déjà mangé des gaufres ?"
En synthèse, voilà encore une bonne bd à l'humour cinglant et très critique en regard de l'histoire et le comportementalisme de chaque peuple.
J'ai vraiment beaucoup aimé.
Il n'y a pas encore de discussion sur cet auteur
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !