"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Ce shojo est dans le pur style des méandres amoureux adolescents avec la narration des hésitations, jalousies et incompréhensions aussi bien chez les filles que chez les garçons. Leur coeur ne cesse de faire les montagnes russes. C'est aussi très focus sur les amours de jeunesse : les protagonistes ont tous un(e) ami(e) d'enfance et l'amitié ne sait si elle tend vers l'amour ou si c'est un leurre. Comme d'habitude, la figure de l'adulte est absente ou défaillante excepté le barman qui est le Jiminy Cricket de ce premier tome (la figure du barman comme confident et de bons conseils est récurrent dans l'oeuvre de Ai Yazawa, notamment dans Paradise Kiss). Ces jeunes n'ont aucun autre problème que l'amour (pas de problème scolaire, pas de problème familiaux avec leur parents et/ou la fratrie, pas de problèmes avec leur physique, pas de problème d'argent...).
L'intrigue tend toutefois à se complexifier quelque peu pour laisser le suspense et amorcer le deuxième tome (sur quatre - version deluxe 2013).
La mangaka n'hésite pas à glisser régulièrement des petits clins d'oeil à une autre de ses oeuvres qui est dans la même veine "Je ne suis pas un ange" (la chanson "le sourire de l'ange", le Sudô-saure, etc.). Mais le chat "Kuro" fait plutôt penser à celui de "Last Quarter" (manga du même auteur mais très sombre).
Ce dernier tome est en deux parties. La première s'attache à rassembler les morceaux du puzzle et tenter de mettre du sens dans l'histoire. Arriver à penser l'impensable est difficile et douloureux mais le sens finit par s'imposer comme suit : Adam, un chanteur anglais, aima passionnément Sayaka KAMIJOU, une jeune japonaise , prodige au piano qui suit ses études en Angleterre. Ils vont fêter ensemble les 17 ans de la jeune fille avant qu'elle ne meurt d'une leucémie foudroyante. Il va la suivre très vite dans la mort par overdose volontaire (suicide), juste après la sortie de son seul et unique album avec le groupe Evil Eye.
La deuxième partie est comme un deuil que n'arrive pas à faire la mangaka pour dire au revoir à ses personnages.
Ce manga est doux, triste, sensible, et questionne sur l'amour, la mort, ce que l'être aimant peut exiger de l'être aimé, le deuil et la non possibilité de deuil.
SPOIL
Adam (une âme errante) est derrière tout cela. Son âme est condamnée à errer éternellement pour s'être suicidée (pas de paradis possible). En rencontrant Mizuki un soir, il perçoit l'envie de mourir de la jeune fille et son désarroi d'amour (familial, amoureux, amical). Il se matérialise devant elle, joue "Last quarter" et il reconnaît en Mizuki la même sensibilité qu'avait montrée Sayaka. Il passe un pacte (avec le diable pour l'enfer?). En échange, il pourra y aller avec Mizuki et ainsi, d'une certaine façon, ne plus jamais être séparée de Sayaka.
Adam met donc tous les souvenirs de Sayaka dans l'âme de Mizuki (vide de tout puisqu'elle ne veut plus rien et rejette sa propre vie). Une autre interprétation peut être qu'Adam n'a pas permis à l'âme de Sayaka de partir en paix et elle erre aussi, prenant posséssion de Mizuki à la demande d'Adam.
Hotaru peut entrer en résonnance avec Mizuki dû à une faille temporelle : elles ont eu un accident de voiture le même jour à la même heure et c'est le chat qui fait le lien des deux âmes dans l'entre deux mondes. Hotaru va garder son âme et se réveiller à l'hôpital, Mizuki va rester prisonnière et se charger de l'âme de Sayaka.
Ce qu'Adam n'avait pas prévu, c'est que Mizuki se retournerait en entendant la voix de Tomoki alors qu'elle traversait le carrefour pour le rejoindre lui, Adam. Elle n'était donc pas entièrement tournée vers lui, et elle n'est pas non plus morte sur le coup.
Adam, finit par libérer l'âme de Mizuki (qui va se réveiller à l'hôpital) pour la première interprétation ou celle de Sayaka pour la deuxième interprétation, et il part de nouveau errer ça et là avec le souvenir et l'absence douloureux de Sayaka dans son coeur.
Ce deuxième tome (sur trois) est aussi touchant que le 1er. Le fantôme d'Eve est donc l'âme de Mizuki, une jeune fille réelle de 17 ans, dont le corps est dans le coma à l'hôpital suite à un accident de voiture le même jour qu'Hotaru. Il y a toujours un chat en filigrane, nommé Adam...
L'histoire continue a être sensible. On partage les espoirs et le désarroi des enfants qui cherchent des éléments sur Mizuki, sur la maison inhabitée, sur Adam pour tenter de retrouver ce dernier et permettre à Eve d'aller au paradis et à Mizuki de retrouver son âme pour se réveiller. Cette histoire a un petit côté mystique doux et triste.
Mais la vérité qui semble se dessiner remet tout en cause : comment Eve et Mizuki peuvent-elles être une seule et même personne alors qu'il y a 20 ans d'écart (au minimum) qui les séparent selon les indices recueillis (la maison est inhabitée depuis plus de 20 ans, la bague d'Eve porte les initiales S.K. qui ne correspondent à rien, les souvenirs d'Eve ne correspondent pas avec la vie de Mizuki en dehors de ceux concernant Adam) ?
Quand enfin, une piste s'ouvre devant eux : le disque du groupe "Evil Eye" et son tube "Last Quarter" va être réédité. Le chanteur n'est autre qu'Adam, mort de façon peu claire (suicide par overdose de drogues ?) il y a une vingtaine d'année. Un blog donnent des éléments biographiques sur le groupe. Et si celui qui l'administre en savait plus ? Et comment dire à Eve qu'Adam est mort alors qu'elle l'attend ? Est-ce que cela va tuer Eve et Mizuki aussi ?
Ce manga se présente comme un "shojo love soul" (soul en évoquant la musique). Et c'est une pépite de sensibilité, de fantastique et d'amour tout en finesse et en émotions, mais sans mièvrerie. Le fil conducteur est, étrangement, un chat...
Ce premier tome commence par la vie de Mizuki, adolescente qui va avoir 17 ans et qui décide de rompre avec l'école, sa famille et son job d'appoint suite à une rupture avec son petit ami, Tomoki. Celui-ci a l'habitude de la tromper et d'être pardonné mais il a été trop loin en couchant avec sa meilleure amie. Mizuki se renferme et n'a plus envie de vivre (ce point est crucial). Elle prend ses affaires et s'enfuit dans la nuit sous le premier quartier de lune (=last quarter) brillant. C'est là qu'elle rencontre Adam avec qui elle va vivre un amour exclusif mais de seulement 15 jours et isolée avec lui dans une maison inhabitée. Il va sortir un jour sans rien lui dire puis il va lui demander de le rejoindre à un carrefour en pleine nuit. En traversant la route pour le rejoindre, elle entend une voix derrière elle qui l'appelle : Tomoki. Elle se retourne, reste interdite, oublie de traverser et malheureusement une voiture la percute. Son histoire s'arrête là...
Celle d'Hotaru commence. Petite fille d'environ 10 ans, elle rencontre par hasard un fantôme féminin dans une maison inhabitée, et ce, en poursuivant un chat. Elle avait déjà rencontré, dans un étrange monde, ce fantôme alors qu'elle était inconsciente à l'hôpital après avoir été renversée par une voiture (comme Mizuki). Elle est la seule à pouvoir la voir et l'entendre. Les amis d'Hotaru (1 fille et 2 garçons) vont l'aider à libérer le fantôme qui ne demande qu'une chose : retrouver Adam. Ils vont la nommer Eve (en référence à Adam et Eve) et essayer de reconstituer le puzzle de tout cela.
Cette fin de première tome nous laisse bouleversés et dans le même désarroi qu'Eve et les enfants... C'est manga très sensible et cohérent dans l'invraisemblance.
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