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Une chanteuse mais aussi une bonne écrivaine Agnès BIHL, découverte d’un beau texte par ce livre, une gouaille un peu particulière mais j’aime car on y trouve des expressions détournées et des réparties cinglantes. On rit, on pleure, assez triste mais drôle aussi.
Le jour ou Madeleine se retrouve en maison de retraite, ses copains ne le supportent pas et cela entraîne toute une aventure qui nous mènera, sans cesse du rire aux larmes, et tous les personnages vers de grands changements dans leur vie. J'ai aimé le sujet abordé par l'auteure qui n’a pas la langue de bois comme je l’ai dit et j'ai été touchée et choquée par le sort réservé à nos anciens dans notre pays dans les maisons de retraite ou autres, bon je savais un peu mais par cette histoire, on en apprend encore et franchement qui aurait envie de finir ses jours, enfermé, oublié, annihilé ? hélas c’est pourtant bien le sort d’un grand nombre de nos aînés.
Choisie une nouvelle fois parmi les heureux sélectionnés à une opération Masse Critique – Babelio, j’ai eu l’opportunité de recevoir le premier roman d’Agnès Bihl, La vie rêvée des autres (éd. Don Quichotte, mars 2015). Ce titre me faisait envie, car il m’évoquait de manière plus ou moins lointaine une autre des mes lectures, A Mélie, sans mélo, de Barbara Constantine… Une histoire au sein de laquelle gravite plusieurs personnages, qui semblent emplis de tendresse et de bons sentiments, avec lesquels nous plongeons dans leurs souvenirs personnels et leur intimité…
A soixante-dix sept ans, Madeleine se retrouve placée en maison de retraite par ses deux petites-filles. Absolument pas en phase avec cette idée, elle se retrouve pourtant contrainte de se plier au bon vouloir de Delphine et Magali, et finit ainsi prise en charge dans ce type d’établissement. Entre désillusions, solitude et dépit face à l’attitude de certains soignants qui ne la respectent pas vraiment en tant qu’adulte à part entière, difficile de s’adapter… Difficile d’accepter d’être mise au rebut par sa propre famille, elle qui a toujours été pleine de verve et de vie ! Mais tout cela, c’était sans compter sur ses fidèles acolytes, Jacky et Ferdinand, qui n’ont absolument pas l’intention de la laisser croupir entre ces murs…
Chaque chapitre laisse la possibilité à l’un des personnages d’exprimer son point de vue sur le fond de l’histoire, d’évoquer ses souvenirs, son ressenti quant à sa propre vie. Certains protagonistes vous taperont probablement sur les nerfs, d’autres susciteront probablement votre sympathie, votre empathie. Au-delà d’un simple partage de faits et / ou de souvenirs, tous ces éléments nous amènent à mieux cerner tous les acteurs de cette histoire, et imperceptiblement, ce qui se joue autour de la vie de Madeleine et de ceux qui l’entourent. Et c’est après coup, en rédigeant ces quelques lignes, que je comprends alors tout le sens du titre donné à ce roman, que vous comprendrez à votre tour en le lisant…
Mais au-delà du sens premier que l’on perçoit à la lecture de cette histoire, à savoir l’histoire d’une dame âgée et de son entourage, Agnès Bihl en profite pour véhiculer un message plus subtil, mais tout aussi important selon moi : la façon dont la vieillesse est perçue dans notre société, la manière aussi dont certains établissements et certains soignants s’occupent de nos aînés. Abrutis par certains médicaments, histoire de ne pas trop les entendre bien sûr, infantilisés, parfois même maltraités, comme l’auteure ne manque pas de le mentionner, sources de ses dires à l’appui indiqués en notes de bas de page (preuve qu’elle n’invente rien). Et alors : quoi de mieux que la fiction, susceptible de toucher un plus large public qu’un éventuel essai sur le sujet, pour dénoncer quelque chose qui nous touche et qui nous révolte?
Si avec ce livre, vous pensiez vivre un road-trip infernal ou quelque chose dans cette idée, vous risqueriez d’être déçus, sa force ne réside pas là-dedans… En revanche, si vous êtes amateurs de belles histoires (au sens positif du terme), d’aventures humaines, sans pour autant verser dans la mièvrerie (loin de là), vous devriez être comblés !
Si je devais résumer ce que j’ai ressenti pendant cette lecture, je vous dirais que j’ai vibré au rythme des émotions que m’ont apportées ce livre : de la tendresse, de l’humour, de la peine parfois, quelques larmes presque… En bref, tout ce qui se dégage autour du personnage de Madeleine, point central de l’intrigue.
(Mention spéciale aux notes de bas de pages insérées par l’auteure pour éclaircir certains points de l’histoire. Précisions souvent pleines d’humour et d’ironie, et parfois juste avec sérieux…)
Une lecture idéale et indispensable pour cet été…
Inventer des personnages et des situations, ou pas, pour parler de la vie, un sacré challenge qu'Agnès Bihl relève avec brio. Génial est le qualificatif qui convient le mieux après avoir refermé ce livre.
«Quand on voit son passé au fond d'un cendrier et que l'horizon tient dans un écran télé, il en faut de la force, pour ne pas se laisser couler. Ce serait tellement plus simple.» C'est avec ces mots que commence «La vie rêvée des autres».
Drôle, percutant et impertinent, le travail littéraire de l'auteur-interprète Agnès Bihl surprend, elle ose tout.
Elle n'hésite pas à mettre en avant un personnage raciste et homophobe Jacky, Ferdinand, Delphine, Magali et Mado, les protagonistes de cette fiction bouleversent le lecteur, leur force de caractère et leurs faiblesses nous touchent.
Une écriture poétique et provocante, sans retenue, un langage d'aujourd'hui, une langue qui résonne.
Notre coeur fait boum de la première à la dernière page.
Agnès Bihl m'avait déjà bluffé avec son recueil de nouvelles, 36 heures de la vie d'une femme, elle récidive avec son premier roman. Quelques passages un peu longs, assez rares cependant, donc je les évacue très vite. Le reste, eh bien, il est excellent. Ce qui me ravit c'est le sens de la formule de l'auteure, je pourrais en citer un nombre incalculable, des sortes d'aphorismes, d'expressions détournées, de réparties cinglantes (par exemple un dialogue entre copines) :
"Pas futé, ton bonhomme.
- C'est même le roi des cons. Ne le sous-estime pas.
- Et sexuellement il est comment ?
- Parfait pour chronométrer la cuisson des pâtes." (p.37)
A chaque fois, sa phrase sonne juste, tombe dans le mille. C'est drôle, ironique, tendre, tragique, ... car elle joue de tous les registres. Si le livre est globalement positif et joyeux, certaines pages sont sérieuses et bien senties, comme celles qui concernent la maltraitance que subissent les personnes âgées dans certaines maisons de retraite, ou les violences faites aux femmes, le racisme, la surabondance de soi-disant informations dans les journaux télévisés ou radiophoniques. Ce qui est bien, c'est que le raciste mis à part, qui est vraiment un gros "Connard" (dixit Agnès Bihl), l'auteure n'est jamais manichéenne, les maltraitants ont des circonstances qui peuvent expliquer certains comportements sans les excuser pour autant (les pages dans lesquelles elle décrit Jean-Christophe et Delphine au plus mal, où l'on sent monter l'acte, le viol dit-pudiquement-domestique, et l'après la honte de l'un, la peur et le dégoût de l'autre, en sont une illustration parfaite. Jean-Christophe reste un pauvre type, un salaud ordinaire, mais la montée en lui de cette pulsion est bien décrite). A chaque fois, je trouve qu'elle est juste, c'en est même énervant, parce qu'elle dit ce que je pense mais elle le dit mieux que moi. Moi qui m'énerve régulièrement ici contre les propos racistes, je me trouve lourdingue parfois, mais Agnès Bihl, avec la même colère est beaucoup plus fine (que voulez-vous je ne suis qu'un pauvre mâle... et puis le talent on l'a ou on ne l'a pas. Agnès Bihl l'a) : "Madeleine avait des envies de meurtre à chaque fois qu'elle croisait ce type, elle n'avait jamais pu s'habituer à ce genre de fumier. C'est dingue. Son Christ est juif, ses chiffres sont arabes et son berger allemand, mais Connard trouvait le moyen d'être raciste quand même." (p. 192)
En plus de toutes ces bonnes raisons de lire ce roman, j'ajouterai que l'auteure a su créer des personnages attachants avec leurs côtés chiants, leurs névroses et leurs difficultés à vivre mais leur volonté de ne pas nuire aux autres surtout à leurs amis et aux amis de leurs amis... Une famille très élargie dont on a envie de faire la connaissance, qui passera des journées à l'Île d'Yeu, qui reste l'une des mes îles préférées (avec Bréhat -mais il m'en manque encore beaucoup à visiter dans l'Atlantique ou la Manche ; si parmi mes lecteurs certains ont de bons plans voire des invitations pour m'en faire découvrir d'autres, n'hésitez pas, contactez-moi)
Bref, un excellent premier roman à l'écriture qui fait mouche. Agnès Bihl est aussi auteure-compositrice-interprète, je m'étais juré d'écouter ses albums après ma lecture de son recueil de nouvelles, je l'ai fait -légalement- sur Internet, point encore en vrai chez moi. Cette fois-ci promis, je le fais.
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