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Né en 1929, romancier et chroniqueur, Bernard Frank écrit actuellement au Nouvel Observateur, après avoir été au Matin de Paris et au quotidien Le Monde.
Après En soixantaine (chroniques, 1961-1971) et Mon siècle (chroniques, 1952-1960), deux recueils parus chez Julliard, voici les années 80 arpentées et moquées par un Bernard Frank en embuscade, au Matin de Paris, où l'élection présidentielle de 1981 installe le journal dans la roue de la gauche, mais où la venue de Max Gallo (en 1985) dans un quotidien mué en gazette officielle pousse Frank vers la sortie... Avant cela, en une poignée de rosseries et d'admirations, avec ce ton patelin qui n'appartient qu'à lui, avec cette cruauté érudite où l'on reconnaît l'un des grands critiques vraiment libre de ce temps, il aura écrit là le meilleur de lui-même. Les années 80 ? Politique et littérature, gauche et droite. Le Figaro est-il la Pravda ? Louis Pauwels entre-t-il dans la résistance au socialisme ? Faut-il refuser un poste de ministre des Beaux-Arts ?
Quand Frank ne tranche pas dans le vif de l'actualité, il brocarde ses contemporains, et même ses aînés. Alain Peyrefitte ? « Il a bien fait de déclarer qu'il traînerait devant les tribunaux tous ceux qui prétendraient que ce n'était pas lui qui avait écrit ses livres, bref qu'il se servait de nègres. C'est déshonorer les nègres que d'imaginer qu'ils pourraient écrire aussi médiocrement que Peyrefitte ». Jean d'Ormesson ? « Un Sacha Guitry qui serait passé par Normale Sup ». Un Gide à la neutralité suspecte ? « Il y a toujours eu un embarquement, un départ, une Tunisie pour empêcher Gide de devenir Chardonne ou Morand ».
Quand elle ne griffe pas, la chronique se fait cours de littérature, en douceur, comme une infusion d'intelligence. L'art de la nouvelle ? « Les nouvellistes sont des déflationnistes qui s'ignorent ». Ou, à propos de Michel Tournier : « La littérature est à la rigueur un rattrapage de l'existence, elle supporte moins facilement d'être envisagée comme une session de rattrapage à l'agrégation ».
Ailleurs, Frank se rêve sous-préfet à Dieppe, amant de Madame Bovary. Il converse avec Françoise Sagan. Il y a du bonheur dans ces pages.
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