Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Tiraillée entre deux mondes que sépare le Tibre, Laura a bien du mal à s'affranchir des deux puissantes figures féminines qui ont marqué son enfance et son adolescence : rebelle de pacotille dans le bouillonnement politique et culturel des années 1970 et 1980, elle est insensiblement ramenée à sa double lignée, aristocratique et juive.
Sur la rive droite, dans le quartier huppé de Prati, la contessa veille à tenir son rang et à sauver les apparences, malgré les revers de fortune chez les De Pretis : avare d'effusions, elle fascine sa petite-fille par ses récits de la tradition familiale, si ancienne qu'elle semble s'apparenter à une légende. Elle n'a pourtant pas hésité à se séparer de l'impressionnante bibliothèque accumulée au fil des siècles, pour continuer de recevoir deux fois par semaine tout ce que Rome compte d'hôtes d'importance. Et quand sa fille, la récalcitrante Elena, qui deviendra la mère de Laura, et à qui elle désespérait de trouver un bon parti, lui présente enfin Giuseppe, son futur gendre, peu lui importe qu'il soit juif, l'essentiel étant qu'il ne soit pas dans la gêne et que l'union soit bénie par l'Église.
Son mariage avec ce garçon rencontré dans la station balnéaire de Sabaudia, où les Guerrieri possèdent une maison, conduit Elena à s'éloigner de son envahissante comtesse de mère et à s'installer Via Giulia, sur la rive gauche du fleuve. Au quatrième étage de l'immeuble où a grandi Giuseppe règne zia Rachele, tout le contraire de la matriarche de Prati : la plantureuse vieille dame, dont les poches débordent de dragées qu'elle distribue avec générosité à sa nombreuse parentèle, initie Elena, et plus tard Laura, à l'histoire de sa famille non pratiquante qui s'enorgueillit de lointaines racines romaines. Les lois raciales et la guerre l'ont durablement marquée, elle qui, avec sa fratrie, a été miraculeusement sauvée de la déportation grâce à un réseau de résistants. Après la guerre, les Guerrieri accoleront à leur patronyme chrétien leur nom juif, Sabatelli, abandonné à la montée du fascisme.
Maître dans l'art de tresser ces fortes destinées, Louis-Philippe Dalembert emporte le lecteur par l'intelligence, la finesse et l'humour avec lesquels il évoque le double héritage si lourd à porter pour sa descendante. Le personnage principal de son allègre roman n'en reste pas moins la ville de Rome, dont l'écrivain dessine, chemin faisant, un éblouissant portrait - nourri par sa connaissance intime de l'histoire, des charmes et des secrets de la Ville éternelle.
J’ai eu un peu de mal au départ avec le style de l’auteur pleins de « lors ». Et puis j’ai réussi à me couler dans sa petite musique et j’ai aimé suivre les deux femmes emblématiques de la famille de Laura.
J’ai aimé la contessa, d’une noble famille mais sans le sou qui habite un palais du quartier riche de la capitale, qui ne cesse de sa disputer avec son unique fille Elena.
J’ai aimé la zia, qui possède un immeuble dans un quartier populaire pour y loger sa famille.
J’ai découvert le syndrome K, inventé par certains médecins romains qui, dans leur hôpital, accueillaient des juifs qui décédaient de ce fameux syndrome. Ces médecins avaient assez d’humour pour attribuer à la mystérieuse pathologie l’initiale des Allemands Kesselring et Kappler, respactivement maréchal responsable de la Wehrmacht en Italie, et commandant des services secrets et de la Gestapo à Rome (p.121)
J’ai aimé que ce soit le curé de l’église Santa Maria in Trastevere qui organise la fuite de la famille de zia, et que ce soit dans cette même église que Giuseppe veuille se marier des années plus tard.
J’ai eu un peu plus de mal avec le personnage de Laura Sabatelli Guerrieri De Pretis, elle aussi en rébellion contre sa mère, jeune fille issue à la fois de la noblesse romaine et du peuple Juif. Bien sûr, comme elle est adolescente pendant les années de plomb, elle rencontre un révolutionnaire qui va lui causer des ennuis.
J’ai aimé le chat de zia, Pouchkine, qui donne envie à Laura de découvrir la langue russe pour lire l’auteur dans le texte.
Un roman plein de noms composés : celui de Laura, de l’église, mais aussi celui de l’Institut du Sacré-Coeur de la Trinité-des-Monts où Laura va étudier.
Un roman plein de chansons italiennes, de références aux romans russes dont le chef-d’oeuvre Le Maitre et Marguerite.
Un roman à l’atmosphère particulière qui donne à lire Rome par ses habitants.
L’image que je retiendrai :
Celle de la ville de Rome omniprésente, ses places, le Tibre, le palais Saint-Ange et ses autres monuments.
https://alexmotamots.fr/une-histoire-romaine-louis-philippe-dalembert/
Louis-Philippe Dalembert connaît bien Rome pour y avoir vécu plusieurs années. Aussi, c’est une bonne chose qu’il nous en fasse profiter avec Une histoire romaine, roman qui permet de plonger dans la vie de deux familles plutôt aisées. C’est surtout l’occasion de ressentir au plus près les vicissitudes d’un pays qui connut le fascisme mussolinien allié de l’Allemagne nazie mais aussi « les années de plomb » quelques décennies plus tard.
Pour en arriver à Laura, son personnage principal, Louis-Philippe Dalembert, auteur très attachant rencontré à deux reprises aux Correspondances de Manosque, débute son histoire avec la grand-mère maternelle, nonna Adélaïde, la contessa. Elle vit bien dans un immeuble cossu de la rive droite du Tibre, quartier huppé du Prati. Son mari, un obsédé sexuel, lui a fait quatre enfants : trois garçons et une fille, Elena, avant de mourir.
L’humour discret mais efficace de l’auteur me permet de suivre cette veuve, une bigote qui ne manque jamais les vêpres avant de sacrifier au bridge et à l’apéritif.
Même s’il m’aurait fallu un plan de Rome pour profiter pleinement de cette double histoire familiale, je me laisse entraîner dans ce que vivent ces gens, une vie marquée par les tourments de la Seconde guerre mondiale.
Au passage, Louis-Philippe Dalembert fait référence à de fameux films italiens comme « Rome, ville ouverte » de Roberto Rossellini ou encore « Un Américain à Rome » de Steno avec Alberto Sordi, et cela donne envie de les voir ou de les revoir.
De l’autre côté du Tibre, vit la famille de Giuseppe qui fait connaissance avec Elena dans la station balnéaire de Sabaudia, à quelques encablures de Rome, en 1957. Tous les deux ont fait leurs études à l’Institut du Sacré-Cœur de la Trinité des Monts mais ont cinq ans de différence.
Je vous passe les détails qui amènent les deux tourtereaux au mariage après des fiançailles que la contessa aurait voulu plus grandioses. Même si Elena fait tout pour échapper aux désirs de sa mère, celle-ci parvient toujours à ses fins comme l’auteur le démontre très bien.
De l’autre côté du Tibre, avec vue sur le château Saint-Ange, je découvre zia Rachele, la mémoire vivante de l’immeuble de la famille de Giuseppe, qui a des origines juives. Ce dernier s’étant converti au catholicisme pour épouser Elena, l’auteur rappelle la confiscation de l’or des familles juives puis leur déportation après la rafle du 16 octobre 1943. Plus de 1000 personnes dont 200 enfants ont été déportés à Auschwitz.
Même si la famille de Giuseppe a changé de nom, Guerrini à la place de Sabatelli, elle est obligée d’utiliser un réseau de résistance pour échapper au pire.
Arrive enfin Laura la Romaine dont l’histoire occupe la dernière partie du livre. Fille de Giuseppe et Elena, elle affirme sa personnalité, n’hésitant pas à balayer les traditions mais a recours aux séances de psy alors que sa grand-mère lui conseille la confession : c’est moins cher et c’est gratuit !
Ses amours, ce fameux professeur qui lui vaudra de sérieux ennuis, l’héritage de zia Rachele, la tante Samanta partant vivre en Israël avec mari et enfants, la vie de Laura devient vite chaotique et passionnante.
Tout cela, Louis-Philippe Dalembert (Avant que les ombres s’effacent, Mur Méditerranée, Cantique du balbutiement et Milwaukee blues) le raconte avec précision et moult détails. Je constate qu’il connaît bien les meilleurs restaurants de Rome dont il faudrait noter l’adresse, s’ils ne sont pas trop chers. En tout cas, Une histoire romaine m’a rappelé de bons souvenirs mais m’a surtout donné envie de retourner là-bas pour marcher sur les pas de Laura et admirer une fois encore la Ville éternelle, de chaque côté du Tibre.
Chronique illustrée à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2023/11/louis-philippe-dalembert-une-histoire-romaine.html
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