"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Auteur de pamphlets et de romans, Alain Freudiger publie pour la première fois un recueil de nouvelles. Treize nouvelles sur le thème plus ou moins apparent de la rupture. La plupart d'entre elles se situent dans un univers a priori réaliste, au bureau entre collègues, dans les locaux d'une association, dans l'appartement d'un couple, devant un immeuble lors d'une crise de colère et pourtant des détails, symboliques, comiques ou absurdes de plus en plus présents nous font douter de la réalité des scènes. Ces petites scènes qu'on aurait pu dire décrites par un observateur attentif glissent vers un quotidien légèrement fantastique et étrangement inquiétant.
Amateur de la contrainte en littérature et grand admirateur de Perec, Alain Freudiger s'essaie à sa façon faussement neutre à une écriture blanche mais particulièrement pertinente de l'expression du quotidien. Travailée mais jamais fastidieuse, l'écriture révèle des personnages ennuyés, coincés, exapérés ou heureux juste avant un moment de basculement. Une des nouvelles du recueil, « Molly » avait reçu en 2013 le Prix « Naples raconte » de la prestigieuse université de traduction, L'Orientale de Naples.
Saynètes croquées sur le vif où le fil conducteur, le lien entre ces historiettes disparates (et souvent un peu bizarres) semble être la solitude : celle qui accable un vieil homme seul, celle qui accentue la colère d'un père, celle encore qui rejette ce membre d'une association...
Une humanité un peu à l'abandon, perdue dans sa tristesse et dans des situations parfois cocasses, parfois teintées de nostalgie.
Il y a pourtant dans toutes ces nouvelles une grande tendresse pour ces personnages un peu de guingois, un peu cabossés : j'ai beaucoup aimé Molly et ses illusions déçues, ou encore Flambeaux ; j'ai souri en lisant A la plus belle ;o)
Dommage cependant que l'ensemble soit inégal, je n'ai pas compris le sens de certains récits (je pense à Espagnes qui donne son titre au recueil : l'histoire d'une "construction" soudain rongée par les vers ?) et j'ai trouvé certaines chutes un peu "conceptuelles".
Cette couverture est magnifique, le titre prometteur, mais les 13 nouvelles sur le thème, parait-il, de la rupture et la recomposition (?!) m’ont laissée de glace, et même parfois agacée. La narratrice de la 11ième s’angoisse à cause d’un haricot moisi quand le locataire de la 4ième est persuadé qu’un castor ronge les poutres de l’immeuble et que des collègues, dans la 9ième, règlent mollement leur compte en réunion. Je n’ai eu aucune empathie pour les acteurs, aucun sentiment pour leurs situations, aucune indulgence pour leurs préoccupations, excepté pour Molly, la seule qui a su éveiller mon intérêt. Mais l’écriture est très intéressante, parfois poétique, parfois pincée, parfois drôle, toujours juste elle change et s’adapte à chaque nouvelle. Pour cela je suis allée jusqu’au bout, pour l’écriture…
J'aime beaucoup les recueils de nouvelles, ça permet de faire une pause entre deux lectures un peu musclées et puis, c'est pratique, car on peut les lire dans l'ordre que l'on veut et y consacrer un temps court. Ici 13 nouvelles sans lien entre elles, totalement indépendantes et très différentes les unes des autres. J'ai aimé l'écriture générale, de nombreuses figures de style, des jeux de mots, du vocabulaire. En revanche, j'ai parfois été surprise par le choix d'univers, le concept de certaines nouvelles auxquelles je n'ai pas trouvé beaucoup d'intérêt. J'ai donc eu des impressions et un intérêt inégal pour chacune d'entre elles, parfois souriante, perplexe, amusée, surprise, dubitative... La temporalité aussi est très différente certaines nouvelles se passent aujourd'hui ou dans un passé plus ou moins lointain. Mes préférées sont "Molly" et "Flambeaux", celles que j'ai le moins appréciées sont "tout va bien" et "
Ce n’est donc pas totalement conquise, mais pas totalement déçue que j'ai fini ma lecture. Le format et le livre sont vraiment sympas, les nouvelles sont courtes et l'ensemble est plutôt pas mal. Ce fut une découverte pour moi ne connaissant pas l'auteur.
VERDICT
Comme c'est le cas pour beaucoup de recueils il y a du bon et du moins bon, à vous de vous faire votre idée. Un cadeau sympa à faire.
https://revezlivres.wordpress.com/2016/10/07/espagnes-alain-freudiger/
Quand Babelio m’a contactée pour chroniquer ce livre, je me suis dit que lire des nouvelles changerait un peu de mes lectures habituelles. Ce type de récits étant très agréable également. De plus, le résumé m’a plu, pour le côté humain dont j’imaginais que les nouvelles allaient être imprégnées. Et c’est effectivement le cas. Ces treize histoires nous embarquent dans un pan de la vie de personnages ordinaires, pointant du doigt certains faits de société, certaines faiblesses et travers de l’Homme.
« Dans son dernier courrier, dont il était remarquablement satisfait, Edmond dénonçait la collusion et le copinage des grands décideurs, managers, dirigeants, qui formaient comme une sorte de caste miteuse, s’échangeant les places et les accès dans les fondations, les partis, les conseils d’administration, se renvoyant les balles et les ascenseurs, se protégeant et se tenant les coudes les uns les autres, sous le couvert du bien du pays, ou de l’économie, ou de la saine moralité, mais faisant passer leurs propres intérêts avant ceux du peuple, oligarchie parasitaire en place depuis bien longtemps et qui ne chutait après un scandale ou une gestion catastrophique que pour mieux rebondir en un autre lieu, virginité refaite et prestige immaculé. »
Diverses émotions envahissent chaque nouvelle. La colère, la peine, la folie, les sentiments amoureux, l’envie, la désillusion… L’écriture bascule également d’une nouvelle à l’autre selon les sentiments qu’elle veut nous transmettre. J’ai trouvé cela maîtrisé.
Certaines nouvelles étaient assurément incongrues, d’autres touchantes, d’autres dérangeantes. Passer d’un univers à un autre aussi différent peut déconcerter, car oui, chaque récit est éloigné du précédent. D’une ambiance poétique à une atmosphère colérique, il n’y a qu’un pas.
La nouvelle qui m’a le plus marquée est la deuxième, Elle est morte. J’ai trouvé les relations humaines face au deuil décrites de façon juste. Après le soutien de nos pairs, de nos collègues, de nos amis, vient la solitude et le désintéressement, voire le rejet. Le deuil doit être fait, on doit aller mieux. Et si ce n’est pas le cas, le deuil vous éloigne. Ici, un an après le décès de sa femme, jour pour jour, le protagoniste endeuillé se retrouve peu à peu face à lui-même lors de cette journée marquante et triste pour lui. Les dialogues de ses collègues de travail sont terriblement pertinents dans la retranscription de leur façon de penser qui reflète complètement la dure réalité. Les phrases lancées les unes à la suite des autres sont autant de coups de mitraillettes dans le soutien, l’empathie et l’altruisme des Hommes.
« Moi au fond je ne me fais pas de souci, il va s’en remettre. C’est juste une rechute. Oui, tu as sans doute raison. Il faut lui faire confiance. Et puis il est grand. Si ça se trouve il est même peut-être plus solide que nous. En tout cas avec ce qu’il a enduré, quelle dignité. Ouais. Pas comme d’autres qui passent leur temps à geindre. Tu vises quelqu’un ? Bon arrêtez maintenant. Et Armand ? Ça suffit aussi avec Armand, il faut le laisser, ça lui passera. On ne peut rien faire de toutes façons. »
Mais de manière générale, je dois avouer que je suis plutôt passée à côté… Autant la lecture était fluide et assez plaisante, autant les points de chute des nouvelles ne m’ont, en majeure partie, pas plu. Je les ai trouvé confus, comme inachevés parfois. Je n’ai pas toujours bien saisi où l’auteur voulait en venir. Je suis donc restée perplexe la plupart du temps. Pour moi, une nouvelle doit éblouir par son final, et malheureusement ici ce ne fut pas le cas pour moi.
Pour résumer, hormis quelques passages marquants, ce recueil m’a globalement déçue. L’espoir d’une fin appréciable et mémorable pour chaque nouvelle est souvent tombé à l’eau. Je n’ai pas toujours saisi l’éventuel sens caché dans les récits. Une lecture très mitigée en somme…
Ma chronique sur mon blog : https://ducalmelucette.wordpress.com/2016/09/14/lecture-espagnes-dalain-freudiger-rentree-litteraire-2016/
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