"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une maison à Bogotá de Santiago Gamboa, Traduit de l’espagnol (Colombie) par François Gaudry, Éditions Métailiés, 2022
Un livre choisi parce que l’auteur est Colombien et que je suis déjà allée à Bogotá, que j’aime cette ville, que j’y ai de merveilleux souvenirs et que j’espère y revenir un jour…
Je me suis même découvert des affinités avec le personnage principal, toutes proportions gardées, je vous rassure…
Un récit à la 1ère personne, bâti autour des pièces d’une maison… Fasciné depuis l’enfance par une belle maison énigmatique et élégante, un professeur de philologie l’achète lorsqu’il gagne un prix littéraire et revient vivre à Bogotá. Dès qu’il s’y installe avec sa tante, qui l’a élevé après la mort de ses parents dans un incendie, et dont il a partagé la vie de diplomate internationale, il sent que la maison le connaît, qu’à travers elle il retrouve son enfance.
Une personnalité d’anachorète cultivé qui donne à l’écriture une belle ampleur… Le narrateur émaille ses souvenirs d’enfance et de jeunesse et le récit de sa vie, de ses amours et amitiés, de digressions très intéressantes sur la Colombie, les FARC, le contexte historico-socio-politico-économique du pays, les arts et la littérature.
Chacune des pièces de la maison renferme les traces, les souvenirs et les stigmates d’une vie itinérante particulièrement riche et intellectualisée. Le narrateur développe sa passion pour les livres et la langue ; comme il nous fait visiter sa maison, il nous emmène dans sa ville, des beaux quartiers aux pires bas-fonds.
J’ai adoré l’ambiance de ce livre, l’extrapolation à partir de l’espace clos de la maison. Si la fin m’a surprise et déroutée, si j’ai eu besoin de la digérer, j’ai fini par en comprendre la finalité, hautement littéraire.
Un auteur dont les livres vont rejoindre ma PAL, de préférence en VO.
Une très belle découverte.
#UnemaisonàBogotá #NetGalleyFrance #lesglosesdelapiratedespal
Une scène de sexe torride entre deux jeunes échappés d’une soirée, brutalement interrompue quand une main momifiée sort de terre ….
La terre détrempée par les pluies torrentielles livre les quatre membres d’un inconnu, inconnu des personnes décédées mais …. appartenant à un détenu d’un centre pénitentiaire, ayant miraculeusement survécu à l’amputation chirurgicale mais sauvage de ses quatre membres et de son sexe !
S'ensuit une enquête fouillée menée par un procureur et une journaliste qui s'échangent informations, partagent les rendez vous de témoins, et, sur la base des informations complémentaires ainsi recueillies arriveront à mettre la main sur un réseau obscur de paramilitaires.
Un roman où l'auteur se retrouve parmi les personnages, et où son œuvre donne des pistes aux enquêteurs ...
Un roman où la maison de l'écrivain est celle décrite dans Une maison à Bogotá ...
J'ai apprécié y retrouver Julieta, la journaliste assistée de Johana, une ancienne guerillera des FARC, déjà rencontrées dans 'Des hommes en noir'
Un roman noir, très noir, dont la noirceur est encore renforcée par les pluies torrentielles qui inondent Bogotá en ce début d'automne.
Un auteur qui sait se renouveler à chacun de ses romans ... Et dont je vais continuer à suivre les productions
Je remercie NetGalley et les Editons Métailié qui m'ont offert cet ouvrage
#Colombianpsycho #NetGalleyFrance
Avec ce roman noir, j'ai découvert pour mon plus grand plaisir Santiago Gamboa, qui nous vient de Colombie. Colombian Psycho s'inscrit aux antipodes des thrillers nordiques qui ont fleuri et continuent de fleurir. L'auteur propose un roman qui inclut tous les niveaux de truanderie possibles dont regorge la Colombie, et à travers l'enquête criminelle, un constat sociologique détaillé qui ravira tous les lecteurs-ices curieux-ses et avides d'en connaître davantage sur les dynamiques du pays, et de Bogotá en particulier.
Dans une banlieue cossue de Bogotá, des restes humains sont retrouvés à moitié enfouis : bras, jambes, seuls manquent le buste et la tête de ce que l'on suppose, à juste titre, être un cadavre démembré. Qui ne risque pas d'être retrouvé puisque le propriétaire des membres, Marlon Jairo Mantilla, ancien paracos (milice d'autodéfense) est emprisonné à La Picota, condamné à une quarantaine d'années de prison, après avoir entre autres réjouissances violé et tué sa femme. Quelques jours plus tard, un homme est retrouvé massacré chez lui après avoir été religieusement torturé. Le procureur Jutsińamuy, en charge de l'enquête, fait appel à Julieta, une journaliste quadragénaire, secondée par Johana, sa jeune assistante, ancienne guérillera, pour tenter de retrouver les auteurs des crimes. Les enquêtes respectives autour de ces deux affaires vont entraîner le juriste et la journaliste non seulement dans les milieux criminels de Bogotá, et de la Colombie en général. Mais elles vont prendre une dimension supranationale, puisque Jutsińamuy aura l'occasion de rendre visite à ses confrères policiers à Panama, capitale du pays éponyme. Et plus surprenant, encore, notre auteur Santiago Gamboa a créer un double de lui-même, qui est un personnage entier et indépendant de la fiction qu'il a inventée : autant qu'on puisse s'en rendre compte - c'est-à-dire d'après les détails de sa biographie glanés ici et là - les détails sur ce double correspondent à sa propre vie. Cet élément du fil narratif, qui dans cet épais roman de six cents pages, ne reste que l'une de ses composantes, a fait de ma lecture de ce livre l'une de celles qu'on voudrait ne jamais finir.
Lorsque je disais en introduction que ce roman est relativement différent des thrillers nordiques publiés cette dernière vingtaine d'années, c'est que la violence y est totalement à nu, explosive et crasse, elle n'est pas seulement celle de la barbarie des meurtres, qui disons-le, j'ai rarement lu plus recherchée ailleurs. Elle est dans chaque bouffée d'air que les différents protagonistes bogotanais du récit respirent, chaque rue qu'ils traversent, chaque regard qu'ils posent sur la ville, chaque bruit qui est émis. Le narrateur n'est pas tendre avec sa ville, qui est l'objet d'autant de piques de sa part que de fusillades des narcotrafiquants, paramilitaires, miliciens en tout genre. L'enquête est menée donc tambour battant avec un procureur droit comme la justice, incorruptible, Jutsińamuy et ses collègues policiers, l'agent Laiseca, d'un côté. De l'autre, par deux femmes journalistes, figures à part, dans un environnement largement dominé par les hommes, les armes, la drogue et l'argent.
Les crimes s'inscrivent en plein dans la dynamique colombienne, déchirée par ces fameux FARC, diverses milices d'extrême-gauche, mercenaire, narcotrafiquants, petits dealers, criminels de guerre et autres criminels en col blanc. On ne peut pas dire que la Colombie manque de malfaiteurs, et l'auteur ne manque pas de souligner la noirceur de la capitale de son pays à de multiples reprises. De la même façon, le roman est marqué par une narration haletante et foisonnante, autant dans les descriptions des prisons de Bogotá, que les hommes de justice ne manquent pas de visiter à plusieurs reprises que la vie bogotanaise, marqué par une circulation incessante au milieu d'artères souvent encombrées et bouchées. Mais c'est aussi une identité culinaire, à ce propos l'auteur nous étreint de plats locaux tous les plus appétissants les uns que les autres - on est d'ailleurs doté d'un glossaire à ce sujet en postface, qui m'a permis de découvrir le palmier-pêche. Amis gourmets, vous vous délecterez de ces descriptions ! - c'est ce genre de petits détails qui contribuent à la couleur de ce roman. Bogotá ne manque pas de caractère, et la Colombie plus généralement, mais incapable de stopper cette gangrène qui la pourrit de l'intérieur, cette forme de domination colonisatrice. L'un des clichés sur la Colombie est entretenu par les guérilleros farc, dont la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt a fait les frais. Il est intéressant d'en découvrir les origines, à travers l'allusion à Jorge Eliécer Gaitán, homme politique de la première moitié du XXe siècle dont le meurtre demeure irrésolu, très proche des classes sociales moyennes et basses. (...)
Que dire de ce pavé, sinon que c'est un excellent roman ? Foisonnant, qui semble partir dans tous les sens, jouer avec tous les genres et s'en jouer, s'amuser avec les lecteurs et les captiver dans un jeu entre la réalité et la fiction. Que dire d'un auteur qui s'insère en tant que personnage mi-réel-mi-fictif dans sa propre fiction ? Mégalomanie ou envie de s'amuser, de casser les codes ? Évidemment dans le cas de Santiago Gamboa, je penche vers la seconde hypothèse, qui lui permet également de parler de son pays, des années de guérilla, de la corruption au plu haut du pouvoir, des arrangements des politiques avec la justice et avec des gens peu recommandables, pour parvenir à être élus, de milices qui exercent encore un pouvoir certain.
Santiago Gamboa est un conteur hors pair qui nous fait rencontrer un vice-procureur incorruptible et tenace sans une once de violence en lui, originaire d'un des peuples indigènes d'Amérique du sud, les Huitotos, des policiers efficaces, décalés, une journaliste pugnace, une détenue qui souffre d'un trouble dissociatif de l'identité, un détenu démembré et émasculé féminicide qui depuis voue sa vie à Dieu, un gourou, des paramilitaires... Son roman est dense, énergique, sans temps mort malgré son épaisseur de presque 600 pages. Il manie l'humour avec un plaisir évident, l'ironie, le sarcasme, le décalage, l'alternance de belle formule avec du trivial, un sens de la formule qui fait mouche : "C'est fait, collègue, il est sous bonne garde. Il était tout peinard dans sa chambre, du moins avec deux compatriotes spectaculaires de sexe féminin en petite tenue, ou plutôt sans tenue du tout, qui se consacraient à la renommée des services d'escort et de la fraternité latino-américaine." (p.564)
Et son intrigue, alambiquée à souhait, qui nous mène de surprise en rebondissement et vice-versa, qui permet d'explorer la société colombienne, sa justice, tient en haleine le lecteur jusqu'au bout. Bref, du grand art que ce roman de Santiago Gamboa, qui cite abondamment d'autres auteurs, des sud-Américains, des Français... et dont j'ai déjà lu deux autres livres, très différents : Des hommes en noir, un thriller assez dur et Une maison à Bogotá.
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