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Au tournant du millénaire, l’auteur, originaire du Chaco, zone tropicale du nord-est de l’Argentine, décide de s’offrir un rêve : parcourir la Patagonie, immense région légendaire du sud de son pays, où il n’a encore jamais mis les pieds. Avec un ami, ils embarquent dans une petite Ford Fiesta rouge, en route pour un périple de 40 jours et de 4000 km, qui les emmène de Corrientes près de la frontière du Paraguay à Rio Gallegos juste avant le détroit de Magellan et la Terre de Feu, en longeant l’Atlantique, avant de remonter par la mythique Ruta 40, parallèle à la cordillère des Andes.
A l’époque, l’Argentine traverse une grave crise financière, et le tourisme n’a pas encore explosé. De toute façon l’auteur et son compère ne sont pas là pour les cartes postales. Si son ami Fernando prend beaucoup de photos, Mempo, lui, est en quête d’inspiration pour le roman qu’il est en train d’écrire. Les deux quinquas baroudeurs parcourent ainsi des kilomètres de ligne droite au milieu de la pampa aride et monotone, déserte et sublime, soumise au terrible vent patagon, avant de crapahuter au pied des montagnes sur des pistes défoncées qui conviendraient bien mieux à un 4×4 de luxe. Le voyage est émaillé de visites mais surtout de rencontres souvent improbables, parfois poignantes, de confrontations avec le dénuement et la solitude parfois extrêmes de ces lieux et de leurs habitants. L’auteur tour à tour s’émerveille de ces paysages magnifiques (« Là-bas […] il y avait la paix, des moutons, des cieux immenses, du vent, la mer et des glaciers parfaits et superbes« ) ou s’agace de l’incurie et la corruption des autorités, et de l’inertie de ses compatriotes : « Tandis que je conduis sur la route n°40, je suis sans cesse fasciné par tant de beauté stérile. Dans ce pays tout particulièrement, un paradis même s’il est peuplé d’indigents, autant de richesse inutile devrait ébranler toute forme d’indifférence. Mais elle est impuissante dans cette Argentine qu’on dirait blindée. L’immensité et la vitesse réduite me font rêver à tout ce qui pourrait être réalisé ici. […] En Patagonie, ce n’est pas seulement l’argent qui fait défaut mais l’imagination, l’audace. […] Mais aujourd’hui, la plupart des jeunes regardent ailleurs : dans la direction indiquée par la télé et la bière. Ce n’est pas leur faute mais celle de la dictature – elle a produit une génération de parents pleins de ressentiment – et de la dissolution de l’Etat« . L’auteur trouve aussi ce qu’il cherchait : des idées pour terminer son roman, qu’il continue à écrire au fil du voyage.
Road-trip de l’auteur, road-trip des personnages de son futur roman, cette mise en abyme est parsemée d’extraits de celui-ci, mais aussi de réflexions, de citations et de références (trop) pointues à la littérature et au cinéma sud-américains, et manque donc un peu de fluidité. Mais avec ce ton drolatique et finalement indulgent et bienveillant, avec son émerveillement sincère, l’auteur m’a collé une de ces nostalgies du voyage et des grands espaces… Patagonie, te reverrais-je un jour ?
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