De la Mitteleuropa, de nombreux artistes nous ont livré de crépusculaires impressions durant l'entre-deux-guerres. Avec cette «Fin du monde à Breslau», Marek Krajewski en latiniste averti poursuit* sa version d'une ville dont la folie, le crime et la transgression n'ont épargné personne en ces...
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De la Mitteleuropa, de nombreux artistes nous ont livré de crépusculaires impressions durant l'entre-deux-guerres. Avec cette «Fin du monde à Breslau», Marek Krajewski en latiniste averti poursuit* sa version d'une ville dont la folie, le crime et la transgression n'ont épargné personne en ces années 20. Entre l'étrange onirisme d'un Schnitzler et les visions horrifiques d'Otto Dix, l'univers dans lequel évolue l'inspecteur Mock «Herr Kriminalrat» est des plus décadents. De tavernes en bordels, l'alcool et la «neige» ne sont pas les moindres maux de cette Babylone peuplée de prostituées, d'aristocrates illuminés, de politiques corrompus, de pro-nazis, d'artistes ratés et autres flics franchissant la ligne jaune. En la matière, Eberhard Mock n'a de leçon à recevoir de quiconque, exprimant à lui seul toute l'ambivalence de cette société. Au prise avec un tueur en série particulièrement sadique, il n'est pas au mieux pour faire la lumière sur cette affaire, bien plus préoccupé par la tournure catastrophique que prend son mariage. Les meurtres s'accumulent, sa hiérarchie le presse et lorsqu'il apparaît que ces crimes pourraient annoncer une probable fin du monde la vox populi se fait entendre. Jamais loin d'une gueule de bois, le très contesté - et contestable ! - Mock usera de son bon sens (et de ses méthodes immorales) pour déjouer les prophéties millénaristes. Si les agissements de cet inspecteur nous répugnent, ces errements en font une figure dotée d'une complexité qui ne peut laisser indifférent. Un regard expressionniste porté sur ce monde de chaos où tous semblent fuir une réalité insoutenable.
* Après «Les fantômes de Breslau» et «La peste à Breslau».