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Ce roman nous présente un enfant jugé différent mais qui préfère juste la compagnie de la Nature à celle de ses pairs.
Lulu est élevé par sa mère et a des passions un peu envahissante. Il collectionne tous les petits trésors qu'il trouve sur la plage. Le jour où il découvre une bouteille à la mer avec un message, il se lance dans un projet fou avec ses camarades de classe et sa maitresse, celui d'envoyer eux aussi des messages dans des bouteilles et de voir où cela les emportera. Une aventure qui va lui amener à consolider sa passion et à entretenir une relation avec une personne d'un autre pays.
Un roman touchant car il cultive la différence et met en avant les passions qui ne devraient jamais être laissées de côté. L'écriture poétique et entrainant fait que ce roman se lit d'une traite.
Chez Lulu, il y a du Lucien Ginsburg. Pourtant, cet homme-là vient de créer un poisson extra-ordinaire, le Piscis detritivore. Vous n’en aviez jamais entendu parler ? C’est normal car en fait, soit Lulu n’existe pas, soit vous ne le connaissez pas encore.
Lulu est un gamin solitaire qui vit avec sa mère, qui ne sait pas trop comment être mère mais qui aime son fils à la folie. À l’école, ce n’est pas mieux, car Lulu avec sa veste sur le dos ne ressemble à personne. Il cultive cette singularité en se satisfaisant d’être à l’écart des autres gamins.
Lulu, ce qu’il aime c’est être seul sur la plage. Là, sa mère lui laisse une certaine latitude sans être sans arrêt à le surveiller, alors il peut bouger, rêver, chercher des trésors enfouis dans le sable ou déposés par les vagues. Là il devient lui-même, ce petit collectionneur d’objets divers, coquillages, plumes, morceaux de verre polis par les flots, déchets plastiques, ou bouteilles à la mer.
Lulu s’émerveille de l’ordinaire, de la beauté simple de la nature, de la vie marine, coquillages ou simples déchets comme déposés là pour lui. Chaque jour il emporte son butin, rempli sa chambre, et vibre de joie, de bonheur, étudie ce qu’il rapporte et cherche à connaître les noms de chaque coquillage, de chaque petit animal marin, allant même jusqu’à les expliquer aux autres élèves. Et y trouvant une forme de légitimité qui lui donne un bel équilibre.
L’immensité de la mer comme équilibre, évasion, horizon.
L’immensité de la mer comme lien avec le monde, à travers ces bouteilles à la mer qu’il récolte, décrypte, et auxquelles il répond sans relâche.
L’immensité de la mer comme un pont avec ces autres, cet autre aussi fou que lui et qui devient son ami.
Et puis la vie, sans famille ou sans père, avec ou sans mère, avec des amis, un ami, plus personne. Mais toujours la mer, son immensité, son infini qui rassure, cette liberté qu’on éprouve à la regarder.
https://domiclire.wordpress.com/2023/11/24/lulu-lena-paul-le-garrec/
Ma mère, ma mer et mon père
Léna Paul-Le Garrec a réussi un premier roman très touchant. En nous racontant la passion, puis l'obsession, du petit Lucien pour les objets que la mer laisse sur la plage, elle livre un roman initiatique sensible et poétique.
Du plus loin qu'il s'en souvienne, Lucien a toujours chéri la mer. Il garde cette image de l'Atlantique balayée par les vents, du sable et des rochers, et de cette sensation forte de liberté. Lui qui vit seul avec sa mère trouve dans les embruns et dans les ciels changeants sa raison de vivre. Dès qu'il en a l'occasion, il parcourt la plage à la recherche des trésors livrés par les marées. Sa collection de coquillages va d'abord lui permettre de montrer à ses camarades de classe tout le savoir que sa passion lui permet d'accumuler.
Une passion qui va vite virer à l'obsession, passant ses journées à sonder la plage et à chercher dans les livres comment trier et classer ses trésors: «Je suis submergé d’informations: les coquillages, les plumes d’oiseaux, les bois flottés. Ma tête commence à être aussi envahie que ma chambre. À force de tout mémoriser, je me demande si mon cerveau n’est pas allé se réfugier dans mon cœur.»
Dans le petit carnet qui ne le quitte plus, il consigne la date, l’heure, le lieu et le contenu de toutes ses trouvailles. Et élargit son catalogue avec des pièces en métal qu'il découvre aux côtés d'une vieille dame un peu excentrique et sa drôle de machine jusqu'aux bouteilles.
Ces dernières, lorsqu'elles contiennent un message, vont former un espace à part dans son accumulation d'objets, car elles contiennent un puissant moteur, l'imaginaire. Qui a laissé ce message et dans quel but? Peut-on retrouver leur propriétaire? Et si oui, va-t-il répondre au courrier qu'il leur adresse? En se rendant compte tout à la fois du caractère très aléatoire de ce mode de communication, il va aussi se rendre compte qu'il existe une internationale des bouteilles à la mer et qu'il n'est pas le seul à être passionné. Avec l'hymne de Police dans la tête, il va lancer à son tour les message in a bottle.
Léna Paul-Le Garrec a construit son roman en deux parties que l'on pourrait résumer à une quête de la mer (la mère) à laquelle succéderait une quête du père. Chacune des parties étant accompagnée d'un style et d'une narration qui lui sont propres, marquant ainsi ce moment de bascule quand vient le temps pour Lucien de se demander qui il est. Quand il se rend compte qu'il s'est construit sur un vide: «mes fondations sont creuses, suspendues dans un néant. Nous ne sommes pas seulement notre mémoire, nous sommes aussi nos oublis, les trous de notre mémoire, nos absences, nos comblements, la fiction de ces comblements.»
Il part alors pour de nouvelles aventures. Mais ça, c'est une autre histoire, celle de l'âge d'homme, une fois que l'enfance s'est effacée sur le sable. Pour constater, au bout de ce chemin, qu'«on ne naît pas nu, on hérite d’une mémoire souterraine, on s’emmaillote d’une mythologie.»
https://urlz.fr/mF4l
Ce joli roman s'ouvre sur la présentation du Lulu du titre, un « érudit déjanté à la blouse jamais blanche », créateur du Piscis détritivore, poisson de la taille d'un dauphin à l'énorme système digestif, se nourrissant exclusivement de détritus pour nettoyer les mers de la pollution humaine.
« Je me hisserai sur la dune de mon existence et avec l'assurance d'un scaphandrier, j'exposerai à tous ma quête. Elle n'est pas la résultante d'une succession d'imprévus, elle prend ancrage dans les fatras de mon enfance, dans les tréfonds de ma consolation. »
C'est lui le narrateur adulte qui va nous conter son histoire d'enfant. J'ai apprécié ce pas de côté qui focalise le temps narratif sur l'enfance, sans jamais s'échapper vers l'âge adulte du prologue, excellente façon de montrer à quel point l'essentiel réside dans les premiers âges de la vie. On découvre ainsi la constellation des spécificités qui vont faire de Lulu un être à part, très spécial.
Enfant chétif, solitaire, introverti sans doute surdoué, surprotégé par une mère étouffante, tout le temps inquiète, à qui il se doit de lui « renvoyer les faiblesses qu'elle imagine », Lulu découvre la liberté au contact de la mer, avec une émotion que décrit magnifiquement la plume subtile et sensible de Léna Paul-Le Guarrec.
« Je me souviens de tout. Chaque recoin de sable, chaque bout de rocher, chaque aile d'oiseau. On ne se souvient pas toujours de ses premières fois, elles ne marquent pas toutes. Les premières fois ne pas toujours les meilleures, elles peuvent aussi être les pires, les plus fades, les plus médiocres. Ce dont on se souvient, c'est de la première intensité, de la première fois où submerge l'émoi. Nos sens envahissent notre mémoire, la travestissent. Cette première fois là n'est pas la meilleure. La place va me réserver bien d'autres moments de joie. Ce qui compte ce n'est pas la première fois. Ce sont les suivantes, bien plus tard, après, lorsque arrive l'habitude. C'est l'émotion qui surgit qui est la plus belle, la plus pure, la plus réelle. En dehors des artifices de la passion. Ça commence comme ça. L'hiver, sur la plage. Ça ne peut commencer autrement. »
La mer est quasiment un personnage à part entière, presque le principal d'ailleurs. C'est elle qui forme Lulu et le libère de l'emprise maladive de sa mère. C'est très touchant de voir naître ses passions, ses obsessions, ses collections. Chaque trouvaille ( coquillages, bois flottés, plumes, bouteilles à la mer ) lui donne envie de « sourire dans (son) cerveau ».
La première partie centrée sur l'enfance, la mer et la mère m'a totalement convaincue. Moins la deuxième, celle de l'adolescence, de la quête d'identité et du père, un peu plus explicative alors que la première était ( plus ) dans l'épure et le mystère, maitrisant les ellipses qui permettent de lire entre les lignes. Disons que dans la deuxième partie, j'ai moins lu entre les lignes. Malgré cette réserve, la tendresse, la poésie et la subtilité de ce roman initiatique m'ont touchée.
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