Un moment privilégié avec l’auteur de la bande dessinée "Azur Asphalte" : attention, places limitées !
Les livres d’Hubert Haddad m’impressionnent et me troublent. Certains m’ont emporté dans un ailleurs où la tragédie et la beauté de la vie cohabitaient. Il y a dans son écriture une poésie, une musique qui embarquent dans les profondeurs de l’être. D’autres livres se sont déployés sans moi. Je restais à côté.
Son nouveau livre m’a tout de suite séduit et parlé. Au coeur d’une guerre dont l’atrocité n’est pas ignorée et dont l’auteur rappelle régulièrement la portée, nous suivons le parcours de Clemens, jeune enfant qui découvre la musique et ne peut compter sur elle. Son talent le protège et la musique devient son alliée. Comme souvent dans ses livres, Hubert Haddad parle du présent pour mieux aborder l’absence. Au fur et à mesure de son avancée, on voit surtout les êtres disparaître autour de ce protagoniste. Ils fuient, ils sont arrêtés, ils sont assassinés. La tragédie l’enserre et seule la musique peut encore faire entendre sa voix.
Clemens reste un mystère pour moi. Il est difficilement atteignable et parfois réduit à sa virtuosité. Qui est-il véritablement ? Peut-il être et s’épanouir dans cette guerre, dans ce monde ? Rien n’est vraiment sûr. Existe sa passion. Les autres personnages tentent de protéger leur vie mais leurs lumières s’éteignent progressivement. Les premiers chapitres sont notamment portés par deux femmes, Maria-Anke et Handa, dont l’attention propre à chacune envers Clemens installent tout le récit dans une émotion bouleversante qui, elle, ne s’éteint jamais.
La solitude tragique d’un enfant violoniste au milieu des bombes.
Un roman bouleversant sur le nazisme et la situation des enfants. La guerre, l’innocence des enfants, la musique.
Les années 30 en Allemagne - Clemens Oberndorf est un enfant choyé par sa mère. Quand il la perd, il se retrouve balloté de foyer en institut avec seul repère, son violon dont il joue en virtuose. Une bulle de paix, de rêve, de douceur tandis qu’autour de lui, le nazisme progresse, la guerre s’installe. Et surtout, comme pour tous les jeunes de 8 à 14 ans, la menace d’enrôlement dans la Hitlerjugend (la jeunesse hitlérienne).
« On y enrégimentait les enfants dès les premières classes. Les instituteurs et institutrices terrorisés ou consentants affichaient des photos du Führer au-dessus du tableau noir. »
C’est un roman prenant, surprenant par sa densité, par le contraste saisissant entre la violence, la brutalité de la guerre, des interdits, et la beauté du violon quand Clemens joue.
Grâce à une écriture riche et précise, l’auteur démontre avec beaucoup de profondeur, la solitude extrême de l’enfant. Son seul lien à la vie et à l’amour est son violon. Une solitude émouvante car banalisée par l’enfant, qui n’attend rien de l’existence.
Un gamin qui n’intéresse et ne compte plus pour personne :
« Il n’attendait rien de précis, rien qui eut visage humain. Nul dans ce monde ne s’inquiétait de lui ; existait-il même quelqu’un de vivant pour se souvenir de Clemens Oberndorf à cette heure indécise ? C’était presque un soulagement de ne manquer à personne. Quand on ne craint plus de chagriner quelque fidèle ami, une mère pas trop aimante ou un vain petit père, la mort violente devait équivaloir à l’inaudible fission d’une bulle de savon : un blop infime dans un paysage sans limites. »
Ce qui est parfaitement démontré également est l’absence de la valeur de la vie. Qu’il s’agisse de celle d’un adulte, et encore plus de celle d’un enfant.
Être malléable qui fournit une chair à canon supplémentaire.
L’innocence sacrifiée, le talent inutile….
Un roman bouleversant terriblement actuel, où la vie des innocents est sacrifiée au profit de dirigeants totalitaires.
Merci aux éditions Zulma pour cette belle découverte.
https://commelaplume.blogspot.com/
Clemens Oberndorf est un enfant allemand dont la vie bascule avec l’arrivée du nazisme au pouvoir. Alors que sa mère atteinte de troubles psychologique lui est retirée, il navigue de parents éloignés en foyers, tentant d’échapper aux jeunesses hitlériennes.
Sa seule constante est son amour pour la musique, et son violon hérité de son grand-père, dont il joue en virtuose. Cela lui ouvre certaines portes et lui permet de libérer son esprit grâce à Schumann, Liszt, ou Mozart :
« La musique habite un monde inaccessible, elle est comme l'âme des absents. »
Dans ce nouveau monde où la force brute et physique prédomine sur les arts, où les livres sont brulés et la musique interdite, Clemens doit lutter pour poursuivre sa passion. Sa seule manière de combattre l’inconcevable est de jouer sa musique, une sonate passionnée contre le chant apocalyptique de la guerre et des bombes qui détruisent tout dans un fracas mortel.
« Du ciel, seules les étoiles ne sont pas tombées. »
Hubert Haddad écrit un livre très poétique malgré ce sujet difficile, s’arrêtant sur des instants volés à la guerre: le chant d’un oiseau, la beauté d’une fleur, la magie de la forêt noire, l’envoutement de la musique. Certains passages musicaux sont sublimes, on peut voir et entendre les notes s’envoler des pages. Une belle découverte, ce livre est d’ailleurs dans la première sélection 2024 du Prix Renaudot.
C’est le 5 Septembre qu’est sorti le nouveau roman d’Hubert Haddad, "La symphonie atlantique". Je l’ai lu et, inutile de vous faire languir davantage, je dois avouer que je l’ai beaucoup aimé. Que ce soit dans le fond ou dans la forme j’ai trouvé le récit absolument magnifique.
"La symphonie atlantique" porte bien son titre. Aussi musical que poétique, le texte s’écoute autant qu’il se lit et, telle une symphonie et ses quatre mouvements, se compose de quatre chapitres. A travers la vie de Clemens, "Un garçonnet d’une blondeur de blé mûr, la figure semée de taches de soleil et les yeux pénétrés d’un bleu mourant d’aurore…", violoniste virtuose, nous assistons à l’horreur de la montée du nazisme.
Les notes de Mozart, Mendelssohn et bien d’autres, tirées de ce fameux violon ayant appartenu à son grand-père, se confondent alors petit à petit avec la musique des bombes larguées par les alliés en pluie diluvienne. Clemens se réfugie près de son violon et en tire des mélodies toujours plus belles. C’est grâce à lui, d’ailleurs, et à la protection de Fraulein Herminya "Forte femme aux diagnostics redoutés, l’infirmière était la seule autorité de l’institution qui se faisait craindre des sergents instructeurs." qu’il échappe à un enrôlement forcé dans les jeunesses hitlériennes.
Hubert Haddad aborde la seconde guerre mondiale, thème souvent approché en littérature, d’une manière originale. Il fait revivre une culture germanique décriée par les nazis et donne la parole aux enfants et aux civils soumis aux bombardements alliés. A une époque où le monde s’embrase de toute part, ce récit résonne particulièrement et nous fait toucher du doigt tout ce que la folie des hommes à de destructeur.
L’écriture de l’auteur confine au sublime. Elle est d’une richesse incomparable, d’une beauté magique. Les mots semblent virevolter au gré des mouvements de l’archet sur les cordes. Et les sonorités relèvent de la "grande musique". Quant aux mots, hors du commun et finement tressés, ils sont d’une haute teneur et font de l’ouvrage une véritable œuvre d’art.
"La symphonie Atlantique", une merveille et un nouveau coup de foudre.
Je remercie les Editions Zulma pour cette lecture prodigieuse.
https://memo-emoi.fr
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