Les carnets de l'édition : le métier de responsable cessions acquisitions
Les carnets de l'édition vous font découvrir le métier de responsable cessions acquisitions, aux éditions Zulma Éditions spécialisées dans le domaine étranger, les éditions Zulma recherchent de nouveaux auteurs à traduire, et...
Les carnets de l'édition : le métier de responsable cessions acquisitions
A la fin du 19ème siècle, l’île de Zanzibar se trouve sous l’autorité du sultanat d’Oman, les Omanais ayant délogé les colons portugais deux siècles plus tôt.
Le sultan régnant y exerce son pouvoir d’une main de fer, maintient la population noire en esclavage, traite avec les négriers, et profite d’un harem de dizaines de concubines, le tout dans une opulence éhontée. Mais la révolte gronde parmi le peuple, attisée discrètement par les Anglais, qui convoitent l’île pour ses ressources et sa position stratégique dans l’Océan indien.
Pendant ce temps, la fille du sultan, princesse oisive habituée au confort et au luxe, et Sundus, son esclave eunuque et fidèle serviteur depuis l’enfance, se découvrent un amour et une passion mutuels. Quand surviennent les premiers soubresauts de la révolte qui aboutiront à la chute du sultanat, les deux amants s’enfuient sur le continent africain. Mais leur rêve d’amour et de liberté se heurtera bientôt à la dure réalité, tant leur relation restera incompréhensible et inacceptable aux yeux de leurs contemporains.
Dans ce conte qui s’inspire, tout en s’en jouant, d’un épisode réel de l’histoire de Zanzibar, l’auteur (censuré dans son pays, le Soudan) entremêle plusieurs luttes de libération menées contre différentes oppressions : contre le colonialisme, l’esclavage et la traite négrière, l’autoritarisme du sultan. Pour les libertés individuelles, religieuses, sexuelles, l’indépendance, l’émancipation des femmes.
Entre grande Histoire, légendes et traditions, ce roman (interdit à Oman et au Koweit) est à la fois caustique, provoquant, tragique, sensuel, plein de verve et d’humour. Instructif et d’une liberté de ton fascinante et salutaire.
Je découvre avec ce livre, Abdelaziz Baraka Sakin, son écriture et son univers. C'est loin d'être banal. L'écriture est imagée en même temps que très réaliste, souvent drôle et parfois grave, légère, multicolore et multiple. En bref, c'est un festival.
Le romancier soudanais parle de son pays mais aussi de l’Éthiopie très proche ou plutôt des habitants de ces pays. C'est un joyeux mélange, un métissage heureux : tous ses personnages sont issus de rencontres et de mélanges qui les enjolivent et les enrichissent. Ce roman est une ode au métissage, à la découverte d'autrui et à la vie ensemble. Les femmes y ont la première place.
Le livre passe du roman au conte, de la fable ou la parabole à l'histoire plus prosaïque et au drame, encore une fois un joyeux mélange. Il n'est pas toujours aisé de suivre les déambulations d'Abdelaziz Baraka Sakin, il faut soit tenter de comprendre phrase à phrase, ce qui n'est pas toujours simple, soit se laisser porter, ce qui me semble être la meilleure des solutions et à cette condition, on peut ressentir ce que j'ai tenté -sans doute maladroitement- de décrire un peu plus haut. Le mieux étant de se faire sa propre idée...
Voilà un livre complètement immersif qui te plonge dans un Soudan contemporain à la frontière de l'Érythrée et de l'Ethiopie. Les Jango, pluriel de Jangawi, c'est une population de saisonniers qui viennent cultiver le blé, le sorgho ou le sésame, des travailleurs de la terre nomades :
« Ils sautillent comme de vieux corbeaux dansant autour d'une proie. Ils portent des chemises neuves dont le col souillé par la transpiration, le soleil, le vent du Sud et la terre noire argileuse, témoigne d'une âpre lutte avec les lieux, les éléments, et la recherche de leur gagne-pain. Ils adorent les jeans avec la marque bien en évidence sur les poches : Cons, Want, Tube, Leeman, Winston, etc. Ils ne savent pas ce que cela veut dire mais ils les aiment plus que tout, et ils paient cher pour en avoir. Avec leur ceinture en simili-cuir, on les prendrait predque opour des créatures étrnagères, n'était cet airt de famille que leur silhouette partage avec les objets alentour, en particulier les bottes de sésame bien fagotées. »
La langue ( en arabe dans le texte original ) de Abdelaziz Baraka Sakin est belle et chatoyante, au diapason du bouillonnement de vie de cette comédie humaine à la soudanaise qui rebondit de personnage en personnage, de scène en scène, avec comme seul fil conducteur que celui de raconter ces Jango dont le coeur est la Maison de la Mère, mi-logeuse mi-maquerelle, où les Jango se retrouvent après le travail. C'est souvent savoureux et toujours tendre. Je retiens tout particulièrement le très beau personnage de Wad Amouna dont on découvre l'enfance en prison aux côtés d'une mère incarcérée, puis sa vie adulte d'homme raffiné et différent qui apprend à danser aux futures mariées.
Tendre mais sans concession. L'auteur sait moquer les travers truculents des Jango. Il sait aussi dire avec beaucoup de lucidité leur rapport à la religion, au sexe ou à la vie politique dans un pays autoritaire ( écrit en 2009 sous le régime d'Omar El-Béchir, tombée en 2019 suite à un soulèvement populaire ). Aucun tabou dans ce livre, ce qui lui a valu d'être censuré dans son pays pour « obscénité ». Comme un hommage universel à la liberté.
La littérature est faite pour élargir les horizons. Si j'ai apprécié la découverte de cet auteur et ce roman tourbillonnant, je suis tout de même restée spectatrice un peu lointaine de l'ensemble. Les scènes se visualisaient parfaitement dans ma tête mais je n'ai pas vibré pour les personnages qui les habitaient.
Les conflits et les guerres. Ses ravages et son désastre. Le Darfour vit depuis des décennies avec une violence absolue où s’affrontent les populations sur fond de racisme, d’intolérance religieuse le tout catalysé par les problèmes de sécheresse et la découverte de ressources pétrolières.
L’écrivain soudanais Abdelaziz Baraka Sakin livre un récit plus que poignant sur ce génocide, avec un personnage central : la combattante Abderahman contre les impitoyables Janjawids. Le long de sa route, elle rencontre Shikiri et son ami Ibrahim, enrôlés de force dans l’armée soudanaise. Mais leur soif de liberté (de vengeance aussi) sera plus grande et ils vont, chacun à leur façon, lutter contre la barbarie.
Magnifiquement écrit mais le fil conducteur peut dérouter certains lecteurs avec les nombreux flashbacks. Ils sont pourtant nécessaires afin de mieux cerner la réalité du présent, connaître le passé où l’esclavage était une pratique plus que courante... Et heureusement que l’auteur a l’âme d’un poète parce que la dureté des descriptions est sans appel. Exactions, viols, tortures et ce paradoxe troublant d’un mercenaire Janjawid capable des pires atrocités mais qui se met à pleurer si un compagnon meurt sous ses yeux... Si les derniers chapitres apportent un message d’espoir autour de la magie du Verbe, les cicatrices restent à vif face à la haine rampante et le fanatisme religieux.
Un livre que je recommande fortement et qui peut donner l’envie d’aller rechercher d’autres ouvrages sur ce conflit. Mention spéciale aux Editions Zulma pour avoir été les premiers à proposer à traduire un roman d’Abdelaziz Baraka Sakin.
« Passer la nuit dans le désert, loin de chez soi, ne ressemble à rien tant qu’au néant. Pour un soldat, le désert est synonyme de mort, car un soldat n’est pas un révolutionnaire qui se bat pour une cause nationale contre un ennemi étranger ou de l’intérieur, une cause à laquelle il croit, non ici il s’agit du simple soldat obligé d’aller se battre, dont le sang sert à régler les comptes et les ambitions des politiciens ».
Le Messie du Darfour – Abdelaziz Baraka Sakin – Traduction Xavier Luffin – Editions Zulma – Août 2016
Livre reçu grâce aux Editions Zulma et à la communauté lecteurs.com
http://squirelito.blogspot.fr/2017/08/unenoisette-un-livre-lemessie-du.html
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